Sportissimo. Mfumu : « Le football passion a disparu au profit de l’argent »

Vendredi 25 Janvier 2019 - 11:23

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Si l’engouement et l’effervescence se font sentir par moment lors des prestations des Diables rouges toutes disciplines sportives confondues pendant des compétitions internationales, Mfumu Di Fua Di Sassa est aux antipodes. Dans sa récente publication "Brin d’histoire" dans laquelle il parle sans peine de l’histoire du Congo, il met à l’évidence la disparition de la passion en évoquant le football : « Le football congolais, à la lumière du Chan 2018 » en pages 23 à 26. Il note que l’actuelle génération des footballeurs est loin de rivaliser en exploits la génération des « Brésiliens de l’Union africaine et malgache (UAM) », ancêtres des Diables rouges. Mais avant l’équipe s’appelait « Les lions » et c’est pour cette raison que l’emblème de la Fédération congolaise de football est constitué d’un lion sur un ballon. Ce qui fait dire à Léopold Bernard Foundoux Mulélé que ça ne va pas. L’on aurait pu avoir un Diable rouge sur le ballon. Et, c’est à juste titre , d’ailleurs, que l’armée a gardé l’appellation « Lions ». Retraçant la genèse des Lions, en passant par les Brésiliens de l’UAM, et Congo sport, avec les champions d’Afrique des nations de football à Yaoundé au Cameroun ? en 1972 ? avant que l’équipe nationale ne porte le nom des Diables rouges, Mfumu Di Fua Di Sassa fait ressortir la différence entre ces deux générations au niveau du talent intrinsèque ainsi que de l’investissement physique et mental de ces faiseurs de spectacles avec le ballon rond.

Après le sacre de Congo sport devenu les Diables rouges à la cette 8e édition de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) en 1972, deux ans plus tard, le Club athlétique renaissance aiglons remporte la palme de champion d’Afrique des clubs en 1974. Depuis lors, que s’est-il passé ? Mfumu revisite l’histoire de cette époque passée : « A l’évidence, la passion a disparu. Passion des dirigeants, passion des joueurs pour le football. Même la fierté de se parer du maillot de l’équipe nationale n’existe plus. Ceux qui ont porté à bout de bras cette discipline sportive en 1962 (Coupe des Tropiques), 1965 (Premiers Jeux africains), 1972 (CAN), et 1974 (Coupe d’Afrique des Clubs champions) n’avaient rien des capitaines d’industrie qui gèrent le football actuel dans le monde. Ce sport est, alors, au Congo, l’œuvre de dirigeants pas fortunés du tout. Flavien Bongo, Jacques Ndinga, Makoundia, Service Etienne, Lokoua, Ehouango, Pascal Kakou, Mangaphout, Yhomby-opangault, Maître Gomes, Clotaire Okoumou, Dos Santos, Sita, etc., dirigeants des différentes équipes de football congolais, avaient la passion chevillée au corps. Avec leurs revenus, ils ont contribué aux succès du football congolais au plan continental. Pour les joueurs, le football était un hobby, sous-tendu par la passion. À une certaine époque, les Mulélé, Wamba-La-Josée, Tostao, Miéré Chine et autres jouaient, le matin au foot-pelote, et l’après-midi au stade Eboué, au football d’élite. Preuve de leur abnégation et de leur passion, ils allaient aux entraînements à pied, parfois transportés par un supporter sur une Peugeot BB, scooter en vogue, alors. Pas de prime de match mais la passion comme viatique. Les supporters faisaient des kilomètres à pied pour se rendre au stade. C’était le football passion. Tout ceci est remis au grenier des souvenirs. » Et aujourd’hui ? Il répond : « Tout est affaire de sous. L’argent, encore, toujours l’argent. Du côté des joueurs, il est fréquent, sans avoir foulé le terrain, qu’ils exigent le paiement des primes de match, oubliant qu’une prime est, en fait, une rémunération accordée à un salarié, ici le footballeur, à titre de récompense, c’est-à-dire  un bien moral ou un objet matériel que l’on reçoit en témoignage d’une satisfaction de la part d’un tiers, ici, l’Etat. La vénalité a phagocyté la raison et la fibre patriotique. Tout est désormais, dans le monde du football, assujetti à l’argent. Fini la passion, fini le jeu ».

 Le football congolais circule entre deux camps, celui de la passion disparue et celui de l’argent. La génération passée jouait au football pour son plaisir et celui du public. Les joueurs étaient des artistes en dilettante qui faisaient de l’art pour l’art. La génération actuelle est dans la spirale de la professionnalisation de ce métier de la balle aux pieds. Au-delà du vedettariat et des honneurs, la pratique du sport en général et du football en particulier constitue le socle de la vie en famille et le baromètre de participation à l’édification de la paix et de l’unité des peuples pour le développement de la société.

                                                                                             

Pierre Albert Ntumba

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