Territoire de Fizi/Sud-Kivu : controverse autour de l’érection de Minembwe en commune rurale

Samedi 3 Octobre 2020 - 17:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Depuis que le ministre de la Décentralisation et Réforme institutionnelle, Azarias Ruberwa, a procédé à l’installation du bourgmestre de la commune rurale de Minembwe, en territoire de Fizi, la polémique bat son plein dans l’arène politique.

La démarche d'Azarias Ruberwa n’a pas du tout l’air de faire l’unanimité dans la classe politique. Beaucoup y perçoivent une intention délibérée de consacrer la balkanisation du pays via la cession indirecte de cette entité au Rwanda. Nonobstant leurs appréhensions, Minembwe est aujourd’hui administrée comme commune. L’évènement a eu lieu le 28 septembre dernier grâce à l’implication d’Azarias Ruberwa. Plus d’une année après leur nomination par l’ancien président Joseph Kabila, Gaz Mukiza et son adjoint ont été officiellement installés en présence d’une forte délégation  politique, militaire et diplomatique.

Pour le gouverneur du Sud-Kivu et d’autres congolais partageant les mêmes convictions que lui, cette manifestation est de bon augure pour Minembwe secouée, près de quatre années durant, par une crise sécuritaire sans précédent. Théo Ngwabidje est d’avis qu’avec une administration pilotée par de nouveaux administrateurs issus des différentes communautés locales, la commune rurale de Minembwe va désormais humer l’air frais de la cohésion et de la concorde entre ses multiples composantes ethniques. Il croit à l’instauration de la paix dans cette entité qui s’inscrit désormais sur la voie de la paix. « Nous ne voulons plus entendre des affrontements entre les enfants, la population et d’autres communautés. Nous voulons un travail d’instauration de la paix par l’armée. Que tous les enfants de toutes les communautés reviennent ici à Minembwe : les Fuliro, les Bembe, les Nyindu, les Banyamulenge, nous sommes tous des enfants de la province du Sud-Kivu », avait-il lancé le jour de l’investiture du bourgmestre de Minembwe et de son adjoint.

C’est dans un contexte d’insécurité ambiante sur fond d’affrontements récurrents entre des milices Mai-Mai réfractaires à l’érection de Minembwe comme commune rurale et la coalition des groupes armés Ngumino, Makanika, Twigwaheno, Adroid, etc., favorable à ce projet, que l’autorité urbaine de cette nouvelle juridiction a été installée. Aujourd’hui, un doigt accusateur est pointé sur le ministre de la Décentralisation et Réforme institutionnelle perçu comme l’instigateur de ce qui est considéré, à tort ou à raison, comme un acte de haute trahison. Initiateur d’une question orale au ministre, le député national Muhindo Nzangi en est plus que convaincu.  

Pour lui, Azarias Ruberwa a profité de son autorité pour imposer  « l'installation singulière de la commune rurale de Minembwe, tambour battant ».  Cet acte de haute portée politique et symbolique, fait-il observer dans une correspondance lui adressée le 28 septembre,  « risque d'envenimer les relations entre les Congolais dans la région d'une part et raviver les suspicions d'un déclenchement  du processus de balkanisation d'une partie du pays d'autre part ».  Et d’ajouter que cette situation « plante notamment un décor d'une aggravation programmée de la méfiance entre les Congolais de la région ».

Abondant dans le même sens, l'ancien candidat malheureux à la présidentielle de décembre 2018, Martin Fayulu, voit dans cette initiative un projet de balkanisation et demande aux Congolais de s’y opposer avec la dernière énergie. « Cette initiative téméraire est une sérieuse menace à l'intégrité territoriale de la RDC. J'invite le peuple congolais à la vigilance, de manière à faire échec à ce plan de balkanisation du pays », a-t-il écrit sur son compte Twitter.  Une chose est vraie, c’est que Minembwe a désormais un nouveau statut et l’on ne pourra plus faire en arrière. Ce décret, qui existe depuis 2018 à l’époque de l’ex-Premier ministre Bruno Tshibala, est aujourd’hui entré dans sa phase d’application. Il appartient aux différentes communautés locales  d’enterrer la hache de guerre pour regarder dans la même direction.             

Alain Diasso

Notification: 

Non