Crise à l’UDPS : Félix Tshisekedi attendu en sapeur-pompier

Jeudi 23 Mai 2019 - 18:46

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Lorsqu’il fut contraint par la Constitution de prendre ses distances vis-à-vis de sa formation politique pour cause d’incompatibilité des fonctions au terme de son élection à la magistrature suprême, le chef de l'Etat ne pouvait imaginer que celle-ci pouvait à nouveau sombrer dans les travers des querelles intestines.

Elément catalyseur d’un parti écartelé entre plusieurs sensibilités, Félix Tshisekedi a su, de part sa forte personnalité, gérer les tempéraments dans un environnement vicié par les intrigues et autres coups bas. Obligé de se plier à la Constitution, Fatshi s’est délesté de son poste de président de l'Union pour démocratie et le progrès social (UDPS) pour arborer les attributs de chef de l'Etat. Jusqu’à la nomination d’un intérimaire à la tête du parti, en la personne de Jean-Marc Kabund, l’ancien secrétaire général aujourd’hui promu à la deuxième vice-présidence de la chambre basse du parlement, tout semblait baigner dans l'huile, du moins apparemment.

En fait, le calme qu’affichait l’UDPS de l’extérieur n’était qu’un trompe-œil, un arbre qui cachait la forêt. Il a suffi que Jean- Marc Kabund prenne la liberté de nommer un nouveau secrétaire général pour que les vieux démons de la division ressurgissent. La nomination d’Augustin Kabuya est aujourd’hui au cœur de l’embrouillamini qui gangrène le parti présidentiel. Deux camps, aux vues diamétralement opposées, s’affrontent, avec en toile de fond, l’interprétation de l’article 26 des statuts régissant le parti.

Une véritable guerre de tranchées

D’un côté, l’on retrouve les pro Jean-Marc Kabund qui soutiennent sa décision estimant qu’elle rentre dans ses prérogatives en tant que président intérimaire du parti jouissant de la plénitude de ses pouvoirs. De l'autre, ses contradicteurs recrutés parmi quelques cadres du parti, pensent qu’il a outrepassé ses limites au mépris des statuts qui prônent l’installation d’un triumvirat (Secrétariat général – Convention démocratique – Commission électorale permanente) pour gérer le parti en cas de décès, de démission ou d’empêchement définitif du président, en attendant la convocation du congrès censé combler la vacance. D’où le rejet de l’acte pris par Jean-Marc Kabund qui, selon ses détracteurs, est de nul effet puisque son auteur ne peut plus assumer son poste de président de l'UDPS. Entre-temps, les arguments juridiques ne manquent pas pour alimenter un débat interne devenu finalement ennuyeux, chaque camp cherchant à tirer la couverture de son côté. Plus grave, la bataille a quitté les allées du juridisme pour se muer en une véritable guerre de tranchées avec l’intrusion des militants chauffés à blanc, instrumentalisés, voire manipulés pour servir des intérêts mesquins des cadres en lutte de repositionnement.

C’est dans cette ambiance délétère marquée par de rixes et autres échauffourées que se négocie le rapatriement de la dépouille de feu Etienne Tshisekedi. La crainte est que cette situation, si jamais elle persistait, ne fasse ombrage aux obsèques du « père de la démocratie » avec, à la clé, l’étalage au grand jour des dissensions qui rongent le parti de l’intérieur. La situation devient d'autant plus urgente qu’il faille trouver la parade, hic et nunc. L’implication directe et personnelle de Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo est désormais requise pour tenter de sauver les meubles. Les deux camps, à en croire des indiscrétions, seraient allés dernièrement chez le chef de l'Etat, espérant le voir trancher en faveur des uns ou des autres. Ce que, pour l'instant, il s'est refusé à faire. Mais il faudra bien qu’il prenne une décision, quel qu’en soit le prix, pour l’intérêt du parti.     

Elevé au rang de Haute autorité politique de référence de l’UDPS avec droit de regard consultatif sur les directives du Directoire qu’il avait, du reste, mis en place avant son « retrait temporaire » de la présidence du parti, l’on croit savoir que Félix Tshisekedi a encore un mot à dire dans ce qui se passe à la 11e rue Limete. Il a intérêt à s’impliquer, au plus vite, dans la résolution de cette crise qui laisse un arrière-goût de déliquescence d’un parti aux abois et sans repères, qui finalement n’existe que de réputation. Jadis fer de lance et fierté de l’opposition congolaise, l’UDPS est curieusement en train de perdre de son crédit au moment où les élections locales et municipales pointent à l'horizon.

Pour un parti politique qui, depuis plus de trente ans, a lutté pour la conquête du pouvoir, l’enjeu véritable aujourd’hui devrait être tout autre, à savoir la préparation des élections de 2023, et non la gestion des crises à l'emporte pièce qui ne le font pas grandir.       

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Le siège de l'UDPS

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