Mont Ngafula/Kinshasa : les habitants du quartier Sans fil excédés par la montée de l’insécurité

Mercredi 21 Août 2019 - 16:54

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À défaut d’une prise en compte de leurs desiderata auprès des autorités, la population de ce quartier périphérique se dit prête à se prendre en charge en se faisant elle-même justice.

La criminalité a repris son droit de cité dans la ville-province de Kinshasa. Dans certains quartiers, en effet, le phénomène tend à devenir le lot quotidien de la population qui ne sait à quel saint vouer. Réduit à l’expectative, l’État protecteur est quasi inexistant. Abandonnés à leur triste sort, de nombreux Kinois, particulièrement ceux de la périphérie, n’ont que leurs yeux pour pleurer. À l’ouest de Kinshasa, l’ampleur du phénomène requiert une intervention urgente et énergique des forces de la police pour l’enrayer.

Dans la commune de Mont Ngafula, il n’est plus bon, par ces temps qui courent, de se retrouver en dehors de son toit à des heures indues. Le risque est grand d’être pris pour cible par des hommes sans foi ni loi qui, la nuit tombée, squattent les avenues en quête d’éventuelles proies. Les habitants des quartiers « Mitendi », « Sans fil », « Matadi Mayo », « Benseke », « Zamba télécom » et autres sont fréquemment visités de nuit, ces derniers temps, par des « Kulunas », ces fameuses bandes des gangsters qui ne se font pas prier pour voler, violer, piller et tuer. Dans ces bas quartiers semi-urbanisés de Kinshasa - encore en friche - situés aux confins du Kongo central, les résonances des coups de balles meublent désormais les nuits. L’époque où l’on pouvait se pavaner au-delà de minuit sans la moindre crainte, ou laisser traîner dehors quelques biens de valeur sans arrière pensée, est révolue. Les antivaleurs ont réussi à prendre le dessus sur le bon sens et la morale.

Au quartier Sans fil, on ne cesse de compter les morts. Des paisibles citoyens continuent à faire les frais de l’immobilisme de la police. Les scènes d’assassinat se succèdent à un rythme effréné dans cette juridiction, précisément à « Série 10 », une entité située à la lisière d’un espace vert transformé en bastion des criminels. C’est dans cette brousse qui longe les habitations que se terrent, sous les feuillages et les ramures, ces « Kulunas ». Ils ont, pour le besoin de la cause, réquisitionné presque certaines concessions privées transformées en base opérationnelle. Tels des maquisards en retrait, ils tentent de donner un semblant de contenu à leur vie déréglée. Avec femmes et enfants, ils se compteraient par centaines, prêts à faire couler le sang des innocents. Ces dernières semaines ont été vécues dans la torpeur par les habitants de ce quartier. Ils ne s’expliquent pas la persistance de l’insécurité alors que plusieurs d’entre ces gangsters appréhendés ont subi le châtiment extrême tandis que d’autres se retrouvent en tôle, entre les mains de la police.

L’ultime fait venu allonger la liste déjà ensanglantée de cette série macabre est le vol à main armée opérée, dans la nuit du 20 au 21 août, sur une boutique attenant au domicile de son propriétaire. Venus par dizaines, ces « Kulunas » qu’accompagnaient leurs dépendants, ont eu le temps de percer le mur, à l’aide des marteaux, burins et autres instruments accommodés à ce genre d’opération, avant de pénétrer à l’intérieur. Tenant en respect des voisins enfermés de l’extérieur, ne leur laissant aucune possibilité d’intervention, une poignée de ces visiteurs impromptus emportaient tout ce dont ils avaient besoin pendant qu’un autre groupe, le fusil pointé sur des maisons environnantes, veillaient à ce que rien ne bouge. L’occupant de la boutique a eu la vie sauve grâce à la clémence d’un des bandits après avoir été battu à coup de crosse. La police n’a eu que le temps de constater, dans la matinée, les dégâts au grand désenchantement d’une population apeurée, de plus en plus gagnée par la psychose.

Ainsi va la vie au quartier Sans fil, dans la commune de Mont Ngafula, transformé en un espace de non droit. D‘où l’interpellation des habitants de ce coin de la capitale aux autorités militaires et policières pour que des dispositions efficaces soient prises afin de sécuriser les personnes et leurs biens. Ils en appellent au renforcement des unités de la police affectées dans ces quartiers, à la multiplicité des postes de police et à l’organisation fréquente des patrouilles nocturnes, de sorte à décourager toute velléité d’attaque de la part des criminels. Autrement, la population se dit prête à se prendre en charge en se faisant elle-même justice. Dossier à suivre.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Des éléments de la Police nationale congolaise

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