Patrimoine : à la découverte de la danse "Mondo Assamafou"

Vendredi 18 Octobre 2019 - 12:54

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Chaque année à partir du mois de juillet  jusqu'à septembre à l’école primaire Antonio-Agostinho-Neto à Brazzaville, dans le sixième arronsissement Talangaï, se réunissent des milliers de pèlerins, venus de différents coins, se réclamant fièrement adeptes du groupe folklorique. Ce festival de danse traditionnelle est l’occasion pour les plus curieux de découvrir une spiritualité à la fois contemporaine, ancestrale, intemporelle où sont prononcées des paroles de prospérité à l’égard des adeptes, le tout au rythme impressionnant des tambours, des chants et louanges.

Une création des peuples mbochis et koyo dans les départements des Plateaux et de la Cuvette, la danse "Mondo", autrement appelée kiebé-kiebé, constitue une exclusivité culturelle et sociale de la République du Congo, bien que peu connue du grand public. Appelé gardien de nuit ou chasseur, le kiebé-kiebé représente des esprits non humains, les forces de la nature et de la nuit qui ont habité la terre des hommes avant. « Ce culte de danse traditionnelle est une sorte de médecine traditionnelle dont le principe est de croire en l’âme, aux esprits pour trouver un remède qui soignera le corps et l’esprit grâce à la nature, une sorte de thérapie spirituelle relevant de sa propre conception de la médecine. Les rituels, les incantations et les remèdes sont proposés au patient pour renouer ses liens profonds avec la terre et la nature », a indiqué George Ibara.

La danse est incarnée à travers de grands masques couverts de raphia, coiffés d’un tablier et constitués de tissus végétaux de couleur rose, bleue, rouge, des plumes d’oiseaux et autres signes variés. Les porteurs de ces masques sont généralement des initiés appartenant à une société secrète, leur identité étant inconnue des non-initiés. Au temps des ancêtres, le masque de kiebé-kiebé ne sortait que la nuit. Mais de nos jours, il est exposé en pleine journée, lors des occasions spéciales telles que les cérémonies traditionnelles, les jouissances populaires, les décès de l’un des adeptes, etc. Ce sont des grands moments au cours desquels les adeptes font des démonstrations spectaculaires diverses allant de la danse tournante des masques, accompagnés des chants et rythmes des tambours. Le kiébé-kiébé est l’une des valeurs culturelles et sociale les plus influentes, les plus vivaces et lorsque les pratiquants courent, leur danse fascine et effraie les enfants qui fuient en criant de peur et de joie.

La danse kiebé-kiebé est parfois perçue comme une façon pour les adeptes de renouer avec leur tradition ancestrale bousculée par des siècles de christianisation, d’évangélisation, de colonisation. Comme toute tradition, ce culte des esprits offre à ses fidèles une mythologie sur leurs origines, les lois de la nature et les relations sociales. « Ce n’est pas l’aspect religieux qui prédomine pour moi, le kiebé-kiébe, c’est un rythme extraordinaire, un comportement, une façon d’appréhender le monde, une musique qui chante et crie la révolte des esclaves, et nous fait découvrir nos propres racines », a expliqué Paul Ikama, l’un des vétérans de la danse, rencontré à l’école Antonio -Agostinho -Neto.

Par ailleurs, selon  Itoua Knaga, l'un des plus anciens danseurs, cette danse est diabolisée par certaines personnes, souvent assimilée à du fétichisme, à l’occultisme, alors qu' elle est source de bonheur et de prospérité pour ses centaines de milliers d’adeptes aujourd’hui répandus à travers le pays. Elle tire ses origines dans la religion animiste et fait partie intégrante des bonnes mœurs. Le culte kiebé-kiebé est associé à un grand nombre de mythes et légendes populaires, qui en font l’un des cultes les plus anciens et les plus énigmatiques au Congo. « Le mot kiebé-kiebé aurait, d’ailleurs, deux significations bien distinctes "sers-toi de tout ce dont tu as besoin dans la nature" ou  "ce que l’on ne peut élucider". Ce culte est fortement ancré dans la vie sociale et quotidienne des Mbochis et Koyo », a-t-il renchéri.

    

Cisse Dimi

Légendes et crédits photo : 

Un danseur de "Mondo Assamafou"

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