Lutte contre le Covid-19 : déconfinez-vous en musique !

Mardi 28 Avril 2020 - 15:59

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Les bouleversements engendrés par le fléau du Covid-19 menacent gravement nos sociétés. Pour se préserver, elles déploient tous les moyens possibles. Si à court terme, dans l’urgence, la réponse est médicale, à long terme, celle-ci devrait plutôt porter sur le questionnement « civilisationnel », pour chercher à comprendre les raisons d’une telle catastrophe sanitaire.

Et la menace est si grave que les hommes ont été contraints de tout cesser, pour déférer à la convocation capitale du vilain virus. Parmi les mesures d’endiguement de la pandémie, se trouvent en bonne place le confinement et la distanciation sociale. Or, dans le même temps, l’ennui gagne du terrain, entraînant avec lui des vices qui peuvent s’avérer préjudiciables à la société. D’où la nécessité de lui déclarer également la guerre. A cet égard, la musique peut-elle jouer un rôle ?

D’entrée de jeu, nous répondrons par l’affirmative, en invoquant l’usage qu’en font les disc-Jockey, pour rompre l’isolement. Tentative de compréhension.

La compréhension pose toutefois quelques difficultés, tant les « voix » de la musique paraissent insondables ! Parce qu’elle met en scène des notions aussi volatiles qu’impondérables, telles que les sentiments, les émotions, la musique paraît nimbée d’une sorte de magie, qui en rend la saisie et la définition difficiles. En s’y essayant malgré tout, on pourrait la définir comme « l’art qui permet à l’Homme de s’exprimer par l’intermédiaire de sons, qui sont combinés de façon à être harmonieux ». Cette combinaison les inscrivant dans un projet artistique, différent du simple bruit, qui est aussi du « son », mais dépourvu de finalité pensée d’avance : le plaisir.

Le plaisir est donc la constante qu’on va retrouver dans la majorité des approches de la musique. Il est l’élément « envoûtant » qui fera que, l’auditeur, sous son emprise s’oublie. A l’extrême, des phénomènes de transe peuvent même advenir. De là résulte le pouvoir « exorcisant » de la musique, qui en fait l’instrument d’évasion par excellence, à l’instar du voyage.  Et dans ces dimensions-là, les limites naturelles semblent ne plus opérer. Il en est ainsi par exemple du temps, qui soudainement devient réversible, par le mystère de la musique, en permettant de remonter le temps, en …souvenirs ! N’est-ce pas magique ?

C’est sur cette vertu-là de la musique, que les populations enfermées, cloisonnées, vont pouvoir miser pour espérer s’extraire de la dureté ambiante des temps et de l’espace. La musique adoucit les mœurs a-t-on coutume de dire. Supposément vrai en temps normal, elle devrait l’être à plus forte raison, en ces temps anxiogènes. Certaines opinions allant même jusqu’à lui prêter des propriétés thérapeutiques, dans sa forme scientifique, qu’est la musicothérapie. Dans un autre avatar, on la retrouvera sous le doux visage de la « berceuse », où elle servira à favoriser l’endormissement.

La distanciation sociale et l’immobilité rendues nécessaires par l’endiguement du Covid-19, induisent des risques d’exacerbation des tensions sociales. En effet, le temps passé en activité extérieure fait respirer les familles, en ouvrant des parenthèses dans leur quotidien. Or, cette respiration est supprimée en période de confinement, où les parents et leurs enfants se « frottent » à longueur de journée, voire de soirée. Dans cet étouffement, la moindre incompréhension suffit à mettre le feu aux poudres. On en vient jusqu’à redouter des risques de « flambée » de divorces.

En Afrique, où les populations vivent habituellement dans des espaces plus ouverts, on peut espérer que la situation se présente différemment.

Certains disc-jockeys ont bien perçu la souffrance sociale. Ils réagissent, en apportant un peu de douceur dans ce monde de « brutes », grâce à cette musique « partagée », qu’ils livrent à domicile. Ce que l’aphoriste américain Mason Cooley, que nous avons paraphrasé dit en ces termes : « La musique nous offre un endroit où aller, lorsque nous devons rester où nous sommes ».

Tout compte fait, plus que de révéler l’utilité de la musique, qui est déjà bien établie, ce phénomène révèle plutôt celle du disc-jockey, dans l’un de ses aspects encore méconnus du « thérapeute social ». De cet épisode, la profession devrait sortir grandie, parce que le regard porté sur elle par la société aura changé, comme devra également changer la société elle-même, si elle veut survivre.                                                                                                                                                                                                                 

Guy Francis Tsiehela chroniqueur musical

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