60e anniversaire de l'indépendance. Cardinal Fridolin Ambongo : « Le constat est sans appel, nous avons honteusement échoué »

Mercredi 1 Juillet 2020 - 18:04

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Outre l’adresse à la nation du chef de l’Etat, Félix Antoine Tshisekedi, la journée du 30 juin 2020 commémorant le soixantième anniversaire de l’indépendance du pays a été également marquée par l’homélie sous forme de bilan de l'archevêque métropolitain de Kinshasa.

Alors qu’il officiait une messe à la cathédrale Notre-Dame à l’occasion de cette célébration, le cardinal Fridolin Ambongo en a profité pour dire certaines vérités en rapport avec la marche du pays durant soixante ans. Une marche à reculons qui a vu la RDC régresser et péricliter dans les méandres du sous-développement. Le pays, à en croire cet homme de Dieu, est devenu de loin beaucoup plus pauvre qu'avant l'indépendance. C’est non sans raison qu’il parle d’un échec collectif car la responsabilité de l’échec est partagée. « Nous avons honteusement échoué. Nous n’avons pas été capables de faire du Congo un pays plus beau qu’avant. Nous n’avons pas aidé notre peuple à redresser son front plus que jamais courbé. En tout, nous avons collectivement failli », a-t-il indiqué tout en pointant un doigt accusateur à l’élite congolaise qui, à lents égards, est le principal responsable de la situation actuelle de la RDC.

Pour lui, le Congo a accédé à l’indépendance sur un coup de tête de ses politiciens qui n’ont pas eu le temps de mûrir l’idée ni de préparer leurs congolaises. Contrairement aux pays voisins, dit-il, l’indépendance du Congo, obtenue le 30 juin 1960, a été une indépendance plus rêvée que réfléchie. Occuper les postes  des Blancs, s’asseoir sur les sièges des Blancs, jouir des avantages qui étaient réservés aux Blancs, c’est tout ce qui faisait courir les acteurs politiques de l‘époque, à en croire Mgr Fridolin Ambongo. Et il a ajouté : « Alors qu’ailleurs, on réfléchissait sur le sens de l’indépendance, on préparait les gens aux conséquences de l’indépendance, nous, au Congo, nous rêvions l’indépendance; de telle sorte que notre indépendance a été rêvée avec émotion, avec passion, avec l’irrationalité ». Soixante ans après, a-t-il constaté, cette culture de jouissance et du moindre effort continue malheureusement à caractériser les dirigeants du pays justifiant ainsi le retard pris par la RDC en termes de développement.

Au plan politique, l'ancien évêque de Mbandaka-Bikoro, dans le Grand Équateur, a mis l’accent sur l’actuelle guéguerre entre les partenaires de la coalition au pouvoir autour des propositions de loi visant la réforme de la justice. Cette controverse est, d’après lui, symptomatique de la fin de la coalition FCC-Cach qui a montré ses limites. Il plaide pour sa disparition pure et simple. « Il n’y a de coalition au pouvoir que de nom. De part et d’autre, c’est le désamour, le cœur n’est plus à l’ouvrage. Au lieu de travailler ensemble autour d’un programme commun de gouvernement, les coalisés ne se font plus confiance. Ils ont développé un rapport dangereux de rivalité qui risque d’entraîner tout le pays dans le chaos définitif. Pendant ce temps, l’action gouvernementale est complètement paralysée et le service légitime à rendre à la population est sacrifiée. Le peuple est abandonné. En définitive, la coalition au pouvoir a perdu sa raison d’être. Elle devrait normalement disparaître. C’est de la responsabilité de ceux qui se sont coalisés, le président et le président sortant, de faire éclater cette coalition qui conditionne le développement de notre pays », a déclaré le cardinal Fridolin Ambongo. Il présage même que rien de bon ne sortira de ce pays aussi longtemps que cette coalition sera aux commandes de la République.  

Il a appelé la population à barrer la route aux trois propositions de loi du tandem Minaku-Sakata qui, d’après lui, ne vise qu’à protéger ceux qui se sentent coupables. Et de fustiger certaines velléités ressenties dans le chef de la majorité parlementaire actuelle tendant à remettre en question les espoirs de la population pour un pouvoir judiciaire réellement indépendant et au service du pays.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Mgr Fridolin Ambongo

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