Nouveau quinquennat. Denis Sassou N'Guesso attendu sur plusieurs fronts

Mercredi 14 Avril 2021 - 17:00

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Le mandat qui débute ce vendredi, à partir de la prestation de serment du président de la République élu, ne ressemblera peut-être en rien à ceux qu’il avait accomplis auparavant en raison de sa spécificité. Il y a lieu, en effet, de l’envisager sous le signe du parachèvement d’une œuvre de construction nationale amorcée de longue date entre volonté de moderniser le pays et d’immenses contraintes conjoncturelles.

Ce 16 avril 2021, comme il le fit il y a cinq ans, le président Denis Sassou N’Guesso prête serment pour un nouveau quinquennat à la tête du Congo. Les adeptes de l’inventaire n’ont de cesse, chaque fois qu’ils font allusion à cette échéance, de rappeler que le dirigeant congolais cumule plus de trois décennies au pouvoir. A la vérité, au long de ce parcours, à chaque mandat gagné correspondaient des défis à relever pour le titulaire, et un train de demandes pour la population. De toute évidence, pour les cinq printemps à venir, devant les besoins toujours croissants de ses compatriotes, Denis Sassou N’Guesso est face à l’impératif de réussir. Décryptage.

L’exposé des motifs

Le 5 mars, lorsqu’il lance officiellement sa campagne électorale en présence de ses nombreux partisans amassés place du Rond-point Lumumba, à Pointe-Noire, la capitale économique du Congo, Denis Sassou N’Guesso tient en main un opuscule d’une soixantaine de feuilles. Son « projet de société », pour tout dire. Sur la première et la dernière page de celui-ci il est écrit : « Ensemble, poursuivons la marche ». Il en commente les grandes lignes séance tenante, et poursuit cet exercice durant deux semaines dans les douze chefs-lieux des départements du Congo.

Ce document ayant été largement distribué pendant la campagne électorale, nous nous contenterons ici de revenir sur la vision essentielle que le candidat de la majorité présidentielle, élu à l’issue du scrutin présidentiel du 21 mars avec un score parlant de 88,40%, a partagée aux Congolais qu’il a rencontrés aux quatre coins du pays au cours de cette période de grande mobilisation. Ceux qui voudraient en savoir plus trouveront sans doute ce « projet de société », dans les bureaux de l’immeuble ayant abrité la direction de campagne du candidat.

La compétition interdépartementale

L’un des messages les plus entendus du vainqueur de la présidentielle du 21 mars lors de sa campagne électorale portait sur la priorité qu’il promet d’accorder à l’agriculture dans le pays. Il s’agit, expliquait Denis Sassou N’Guesso, de réduire la dépendance du Congo en matière d’importation des produits alimentaires. Près de 700 milliards FCFA par an, concédait-il. Produire suffisamment sur place ce que l’on consomme puis en exporter l’excédent inverserait cette dépendance de façon progressive, soutenue et durable. Le Congo devra cependant poursuivre des réformes pour se relever de la double crise économique et sanitaire dont les effets sur la reprise de la croissance restent sévères.

Le candidat ajoutait que cette politique de diversification de l’économie passera par la mécanisation de l’agriculture à partir des tracteurs montés dans les ateliers de la zone industrielle et commerciale de Maloukou qui est implantée à quelque 35 km de Brazzaville sur la RN2. En fonction des potentialités dont ils disposent, de l’adhésion des Congolaises et des Congolais qui y habitent, les douze départements du Congo entreraient ainsi dans une compétition saine de valorisation des sols, de transformation et de commercialisation de produits agricoles, d’élevage et de promotion du tourisme.

Du succès de ces initiatives annoncées dépendrait aussi la forte utilisation de la main-d’œuvre jeune dans un pays où, comme on le sait, la couche juvénile est confrontée aux problèmes d’embauches. Est-il donc possible que dès l’entrée en fonction du futur gouvernement, des directives fermes et des objectifs à atteindre seront prescrits aux hommes et aux femmes en qui incomberont les charges ministérielles dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage, du tourisme et de l’industrie ?  

Le front social

Il n’est pas aisé de déterminer ce que c’est que le front social tant il est problématique de l’enfermer dans le carcan de la satisfaction des seuls besoins courants d’une catégorie de la population. Le front social est transversal à d’autres domaines de l’activité humaine. Il part de la dette mensuelle de l’Etat vis-à-vis des fonctionnaires qu’il emploie, à la mise en adéquation des structures éducatives et sanitaires.

Par ailleurs, améliorer les conditions d’accès des gens à l’eau potable, à l’électricité et à l’internet, prémunir la jeunesse contre les mauvaises fréquentations et la consommation des drogues, s’acquitter de la pension du retraité et de la bourse de l’étudiant, viabiliser les marchés domaniaux, encourager l’initiative privée, viabiliser les transports publics et les voiries urbaines, sortir l’arrière-pays de l’enclavement sont des demandes qui se valent.

A ce titre, nous nous permettons de citer les neuf points de concentration de « Ensemble, poursuivons la marche », en ce qu’ils représentent par leur interdépendance, le concentré des engagements pris par Denis Sassou N’Guesso pour le prochain quinquennat : « Consolider les fondements du vivre ensemble, relancer l’économie et créer des emplois, soutenir le développement de l’agriculture, s’approprier le développement durable, assurer le progrès social pour tous, éradiquer des antivaleurs, redynamiser la vie culturelle nationale, revitaliser le sport, réorganiser la diplomatie et contribuer à la paix et à la stabilité en Afrique et dans le monde ».   

La paix civile

Après des années des guerres civiles à répétition, le Congo a recouvré la tranquillité. Mais la paix civile, l’expérience l’a montré, doit toujours être consolidée par la pratique quotidienne des institutions publiques et des citoyens. Beaucoup avaient redouté que le processus électoral dont la première manche vient de s’achever avec la proclamation définitive des résultats de la présidentielle par la Cour constitutionnelle provoque à nouveau des heurts au sein de la société en raison des précédents vécus en 2016.

Tout s’est terminé dans le calme, la preuve que les Congolais peuvent surmonter leurs divergences par le dialogue et la concertation. Il revient toutefois aux instances chargées de veiller à la paix civile de faire en sorte que les droits et libertés garantis par la Constitution aux citoyens soient assurés en toutes circonstances, et que la stabilité de laquelle chacun peut aller et venir sur le territoire national demeure.

L’extérieur

Ayant toujours su vivre en bonne intelligence avec ses voisins et ses partenaires africains et des autres parties du monde, le Congo a apporté depuis plusieurs années sa contribution à la recherche des solutions aux conflits qui secouent de nombreux pays notamment en Afrique. Pour l’exercice qui commence, Brazzaville devra poursuivre sur cette voie tout en améliorant au quotidien sa gouvernance interne pour harmoniser ses vues avec l’extérieur sur les questions d’intérêt commun. La coopération bilatérale et multilatérale et la promotion des investissements étrangers se nourrissent de ces préalables.

Ces dernières années, les processus électoraux en cours sur le continent focalisent l’attention de la Communauté internationale et tout particulièrement des pays dont l’expérience dans ces mécanismes est séculaire. En tout état de cause, la reconnaissance que l’Afrique attend des puissances extérieures devrait être à la mesure des efforts que les pays qui la composent fournissent pour réduire les inégalités, améliorer les conditions de vie de leurs populations et faire que les élections ne débouchent pas sur des conflits fratricides. 

Enfin, l’homme !

Les développements qui précèdent tournent autour des écueils qui jalonnent le mandat présidentiel 2021-2026. Pour avoir accompagné le dénouement pacifique de l’élection majeure du mois passé, les Congolais espèrent être payés en retour de leurs efforts par la mise en œuvre concrète des engagements pris par le président de la République. Il est tout à fait indiqué aussi qu’autant qu’ils se sont mobilisés à leur tour, les meneurs du camp de la majorité présidentielle attendent eux également d’être récompensés.

Pour autant, ce nouveau quinquennat est celui des fidèles qui se sont distingués pendant la campagne électorale, mais aussi celui de ces Congolaises et Congolais venus de partout, qui tiendront le pari de démontrer par la pratique, que le chef de l’Etat a eu raison de leur confier de lourdes tâches. En termes de rétributions ou de « retour sur l’investissement » pour ces acteurs politiques, il n’est pas faux de dire que de Denis Sassou N’Guesso nombre de ses collaborateurs ont été récompensés à divers et plusieurs titres. En vue de « poursuivre la marche ensemble », les termes du contrat politique en cours de signature gagneraient à s’appuyer sur une valeur inestimable en la circonstance qui s’appelle « la preuve par le résultat ».

Sans que l’on prétende que ceux qui seront nommés viendront d’une autre planète, disons que les demandes non-exhaustives répertoriées plus haut font la spécificité de ce quinquennat-ci. Attendons l’acte I de celui-ci : la grande prise de parole de vendredi au Palais des congrès.  

Gankama N'Siah

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