Mali: une enquête réclamée sur le décès de Soumeylou Boubèye Maiga

Mardi 22 Mars 2022 - 16:20

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Une coalition de partis maliens a réclamé une enquête sur la mort de l'ex-Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, le 21 mars à Bamako, où il était en détention malgré les appels adressés par ses proches à la junte pour son évacuation sanitaire vers l'étranger.

L'ex-Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, était membre de la direction du Cadre d'échange qui a estimé, lundi soir dans un communiqué, qu'il était « mort en détenu politique, dans des conditions très troublantes ». Le Cadre a rappelé que les autorités n'ont pas donné de suite favorable aux nombreuses demandes d'évacuation alors que, selon les médecins, « son pronostic vital était engagé ». Le Cadre « exige l'ouverture d'une enquête indépendante pour faire la lumière sur les circonstances de ce décès et en situer les responsabilités ».

Soumeylou Boubeye Maiga, figure emblématique de la scène politique malienne, a été détenu pendant plusieurs mois à la prison centrale de Bamako, dans une affaire de détournement d’argent qui serait liée à l'achat de l'avion présidentiel et d’équipements militaires. Il était en soins depuis quelques semaines dans une clinique de la capitale, faute d'avoir bénéficié d'une évacuation sanitaire à l'étranger. Après une détérioration de son état de santé, des médecins avaient demandé son évacuation à l'étranger pour des soins. En décembre 2021, la famille avait souligné, en citant les conclusions de médecins, « l'impérieuse nécessité » de l'évacuation de Maïga vers l'étranger, ce à quoi les autorités n'ont pas donné leur feu vert. Le 2 mars, son épouse avait saisi le chef de la junte malienne, le colonel Assimi Goïta, dans une lettre ouverte au sujet de son état « critique ».

Les réactions se sont multipliées après l’annonce de la mort de l’ancien Premier ministre. Toutes ont salué la mémoire d’un homme d’Etat qui a servi son pays. Beaucoup ont déploré les circonstances de sa mort. Le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a déclaré avoir appris « avec tristesse » le décès de l’ancien Premier ministre. Le chef de la Mission de l'ONU au Mali, El-Ghassim Wane, de son côté, s'est dit saisi d'une « grande tristesse ».

Les présidents ivoirien, Alassane Ouattara, et nigérien, Mohamed Bazoum, ont dit leur consternation suite au décès de Soumeylou Boubèye Maïga. Le chef de l’Etat nigérien dit avoir appris « avec consternation la mort » de Soumeylou Boubèye Maïga, sur Twitter. « Sa mort en prison rappelle celle du président Modibo Keita (1960-1967). Je pensais que de tels assassinats relevaient d'une autre ère », a-t-il laissé entendre.

Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, qui s'est dit « ami personnel » du défunt, a présenté ses « sincères condoléances » à la veuve. Ancien journaliste formé au Sénégal et en France, Soumeylou Boubèye Maïga avait été auparavant ministre des Affaires étrangères, de la Défense et chef des services de renseignement. Candidat malheureux à la présidentielle de 2007, il était chef d'un parti, l'Alliance pour la solidarité au Mali- Convergence des forces patriotiques. Depuis août 2021, l'ancien Premier ministre avait été détenu à la maison d'arrêt centrale de Bamako. Il avait été transféré en décembre dans la clinique où il est décédé. Soumeylou Boubèye Maïga avait été incarcéré après avoir été inculpé de « faux, usage de faux et favoritisme », dans le cadre d'une enquête sur l'achat d'équipements militaires et l'acquisition d'un avion présidentiel, en 2014, alors qu'il était ministre de la Défense. Nommé Premier ministre en 2017, il avait été contraint à la démission après le massacre de quelque 160 civils peuls en avril 2019 à Ogossagou (centre) par de présumés chasseurs dogons et après une série de manifestations dénonçant la mauvaise gestion du pays. Depuis 2012, l’histoire du Mali est marquée par des coups d’Etat et une instabilité qui menace aussi les pays voisins. A la tête du pays, le colonel Assimi Goïta s'est engagé à céder la place à des civils après des élections dont la date n'a pas été fixée. Le retour des civils au pouvoir au Mali est source de contentieux avec les pays ouest-africains, qui ont sanctionné en janvier dernier la junte pour avoir révoqué son engagement initial d'organiser l’élection présidentielle en février.

Yvette Reine Nzaba

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