Afrique de l’Ouest et centrale : le manque de financements aggrave la faim

Jeudi 14 Décembre 2023 - 19:45

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L’insécurité alimentaire continue de s'aggraver en Afrique de l'Ouest et centrale où le nombre de personnes souffrant de la faim devrait atteindre 49,5 millions en 2024, ont averti, le 12 décembre, des agences onusiennes. 

Selon la directrice régionale par intérim du Programme alimentaire mondial (PAM) pour l’Afrique de l’Ouest et centrale, Margot Vandervelden, « la faim aiguë reste à des niveaux record dans la région, mais le financement nécessaire pour faire face à la situation ne suit pas ». « Un financement insuffisant signifie que les personnes souffrant d'une faim modérée seront contraintes de sauter des repas et de consommer des aliments moins nutritifs, ce qui les exposera au risque de retomber dans des phases de crise ou d'urgence, perpétuant ainsi le cycle de la faim et de la malnutrition », a-t-elle déploré. 

Conflits, climat et prix élevés

La faim aiguë en Afrique de l'Ouest et du centre serait principalement due aux conflits. Des conflits qui auront déplacé de force des millions de personnes de leurs maisons et de leurs exploitations agricoles, à l'impact de la crise climatique et aux prix élevés des denrées alimentaires et des carburants. Selon une analyse régionale de la sécurité alimentaire, la production de céréales et de tubercules dans la région sera légèrement supérieure à la moyenne des cinq dernières années en raison de l'amélioration des pluies en 2023. Malgré les efforts déployés par les gouvernements et les partenaires, la région connaîtra globalement une augmentation de la faim de 4% par rapport à la même période en 2023, a indiqué le Cadre harmonisé de novembre 2023 de la sécurité alimentaire. Environ 94 millions de personnes en Afrique de l'Ouest et centralee sont en situation de « stress » en matière de sécurité alimentaire entre octobre et décembre 2023. Sans assistance, ces communautés risquent de passer à des niveaux de « crise » et « d'urgence » dans les jours à venir.

La situation nutritionnelle des enfants et l’émaciation

Pour l’étude, la situation nutritionnelle reste préoccupante, en particulier au Sahel, où les niveaux d'urgence d'émaciation des enfants ont été atteints et dépassés dans plusieurs pays cette année, notamment dans certaines régions du Mali, du Nord-Ouest du Nigeria et du Burkina Faso. Cette situation est due à la fragilité des systèmes alimentaires, qui ne répondent pas aux besoins nutritionnels spécifiques des femmes et des enfants, à l'accès limité aux services sociaux de base et aux mauvaises pratiques en matière de soins et d'hygiène. En Afrique de l'Ouest et centrale, plus de deux ménages sur trois n'ont pas les moyens de s'offrir une alimentation saine. Et huit enfants sur dix âgés de 6 à 23 mois ne consomment pas le nombre minimum de groupes d'aliments dont ils ont besoin pour une croissance et un développement optimal.  « Les enfants d'Afrique de l'Ouest et centrale ont droit à une alimentation nutritive, sûre, abordable et durable », a déclaré la directrice régionale de l'Unicef pour l'Afrique de l'Ouest et centrale, Félicité Tchibindat.  Le coût d'un régime alimentaire nutritif quotidien dans le Sahel central (Burkina Faso, Mali et Niger) est de 110% plus élevé que le salaire minimum journalier dans la région. À titre de comparaison, le coût d'une alimentation saine en Afrique est aussi élevé que celui des États-Unis, alors que le produit intérieur brut américain est plus de trente-cinq fois supérieur à celui de l’Afrique.

Agir d’urgence pour sauver des vies

Face à la spirale de l'insécurité alimentaire et de la malnutrition, le PAM, la FAO, l’Unicef appellent les gouvernements nationaux et les partenaires financiers à  donner la priorité aux programmes qui renforcent les systèmes alimentaires et les moyens de subsistance résistants au climat ; investir dans les systèmes de protection sociale ; améliorer la gestion des ressources naturelles, notamment l'eau, en tant qu'accélérateur de la résilience et du développement. Des mesures qui permettront de sauver des vies et de prévenir le risque de malnutrition chez les enfants dans les régions les plus touchées par l'insécurité et les crises économiques (Burkina Faso, Tchad, République démocratique du Congo, Mali, Nigeria, Niger). Face à la persistance de l'insécurité alimentaire et nutritionnelle, Robert Gueï, de la FAO pour l’Afrique de l’Ouest et  le Sahel,  appelle à agir d'urgence pour sauver des millions de vies en plaidant pour l'accélération de la mobilisation des ressources afin de financer les plans de réponse nationaux et de faciliter l'accès aux zones confrontées à l'insécurité ou difficiles d'accès, notamment au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Nigeria. Il faut « briser ce cercle en nous attaquant aux causes profondes de la faim et en renforçant la résilience des familles en Afrique de l'Ouest et centrale », a plaidé Margot Vandervelden.

Noël Ndong

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