Libye : Ils ont signé !Jeudi 17 Décembre 2015 - 18:45 Les députés et hommes politiques des deux camps opposés ont signé au Maroc un accord de sortie de crise, mais il s’annonce d’ores et déjà fragile. C’est un accord accouché aux forceps que l’ONU a arraché aux rivaux libyens qui se déchirent, et leur pays avec eux, depuis l’écroulement du régime de Mouammar Kadhafi en octobre 2011. L'accord a été signé à Skhirat, au Maroc, par des membres des Parlements rivaux, à savoir: l'Assemblée basée à Tobrouk et reconnue par la communauté internationale et le Congrès général national (CGN) siégeant à Tripoli, ainsi que par des hommes politiques et des représentants de la société civile. Environ 88 des 188 membres de l’un, et environ 50 des 136 députés et représentants du CGN l’ont signé. Ces chiffres montrent le déficit à combler pour faire revenir l’espérance totale de sortie de crise dans une Libye devenue terrain d’entraînement du djihadisme. La communauté internationale reste pour cela très circonspecte. L’ONU et l’Italie, en pointe dans ce dossier, ne cachent pas l’ampleur du chemin qui reste à parcourir pour une sortie de crise véritable. « C'est un jour historique pour la Libye », s’est réjoui l'émissaire de l'ONU, Martin Kobler. Mais c’est pour tout de suite appeler à compléter l’essai : « La porte est toujours ouverte pour tous ceux qui n'étaient pas ici aujourd'hui. Ce n'est que le début d'un long parcours pour la Libye », a dit M. Kobler. « L'alternative est bien pire », a-t-il averti. Même satisfaction sans triomphalisme du côté italien où, en raison des liens historiques et de la proximité géographique, une déliquescence prolongée de la Libye est perçue à Rome comme porteuse de menaces. Paolo Gentiloni, ministre italien des Affaires étrangères présent à Skhirat, s’est réjoui de ce « jour d’espérance ». Mais il a aussi invité les signataires à traduire cette espérance dans le concret et à la consolider par des gestes forts pour l’avenir. La Haute représentante de l’Union Européenne pour les Affaires étrangères, Mme Federica Mogherini, elle aussi italienne et qui a longtemps dirigé la diplomatie de son pays, a dit depuis Bruxelles, qu’il faut désormais œuvrer à rechercher les causes qui produisent des conflits, pas seulement à les éteindre. Le monde entier veut y croire : amener les camps rivaux libyens autour d’une même table n’a pas été chose aisée. Qu’ils aient « signé à moitié » ne devrait pas cacher la difficulté d’un dossier où le précédent émissaire de l’ONU, l’Espagnol Bernardino Leon, s’est littéralement « cassé les dents ». L'accord signé jeudi prévoit la mise en place d'un gouvernement d'union nationale et d'un conseil présidentiel, au début d'une période de transition qui devrait durer deux ans et qui s'acheverait par des élections législatives. L'un des signataires libyen de l'accord, Saleh el-Makhzoum, a parlé lui aussi « d'un tournant décisif sur la voie de la construction de l'Etat », et d'un « premier pas vers le rétablissement de la stabilité », mais quelle portée ont de tels propos ? Il s'est présenté comme représentant le CGN, bien que cette instance ait publié mercredi, après une séance en présence de 73 des 136 députés, un communiqué affirmant n'avoir délégué aucun de ses membres au Maroc. « Celui qui n'a pas été mandaté par le CGN pour signer ou parapher un accord en son nom est, et restera, sans légitimité », avait dit le président du CGN, Nouri Abou Sahmein, devant les députés, en rejetant le gouvernement proposé par l'ONU. Premier pas donc, mais que seront les pas suivants et quand ? La mission de l'ONU pour la Libye n'a pas dit comment elle comptait mettre en œuvre l'accord signé, ni comment le gouvernement d'union pourrait travailler si les deux gouvernements rivaux restaient en place. Il y avait « en Libye deux gouvernements et deux Parlements. Maintenant nous allons nous doter d'un troisième gouvernement au lieu de réunir les deux autorités rivales », constate Mahmoud Abdelaziz, membre du CGN, mais lui aussi hostile à l'accord. L’avenir s’annonce incertain ! Lucien Mpama Notification:Non |