Construction du CFCO : deux universitaires réclament le dédommagement des victimes

Jeudi 14 Décembre 2017 - 18:00

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Le sujet a été soulevé par Olivier Le Cour Grandmaison, spécialiste des questions de citoyenneté et de celles qui ont trait à l’histoire coloniale, et Louis Georges Tin, président du Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN), au cours d'une conférence de presse animée le 12 décembre, à l’Institut français du Congo.

 

Les deux universitaires sont intervenus sur le thème « Congo Océan et travail forcé », à la demande de Sylvie Dyclo, présidente du Festival Mantsina sur scène. Ils ont parlé respectivement de l’histoire de la construction du Chemin de fer Congo-Océan(CFCO) et des réparations qui nécessiteraient d’être apportées à la population et aux  localités environnantes. 

Le 22 juillet 1922, ont-ils rappelé, les autorités françaises de Brazzaville signent une convention avec la société de construction des Batignolles pour réaliser la ligne du chemin de fer, destinée à relier Brazzaville et Pointe-Noire sur la côte atlantique. Malheureusement, cette construction a été terriblement meurtrière, les conséquences étant dramatiques pour la population concernée. La même société, ont-ils dit, a construit la ligne du chemin de fer reliant les villes de l’Indochine à celles de la chine. Là aussi, les travaux ont causé plusieurs morts.

Ce n’est qu’en 1928, devant l’ensemble des membres de la commission ad hoc, qu’André Maginot, ministre des Colonies, annonce le taux de mortalité dans le chantier de construction du chemin de fer qui est de 57 %.  Ce chiffre suscite alors du scandale auquel vont réagir, André Gide et Albert Londres.

Les deux orateurs ont fait savoir que le travail forcé dans les colonies n’a été aboli que le 11 avril 1946, suite à la proposition de loi déposée par le député de la République française, Félix Houphouët-Boigny, à l’Assemblée nationale. Malgré cette abolition, le travail forcé a perduré jusqu’au début des années 1960, et n’a cessé qu’avec l’indépendance.  

Le travail forcé, crime contre l’humanité, réparation oblige !

Le président du CRAN, Louis Georges Tin, œuvrant sur le racisme et le colonialisme, l'a révélé au public venu nombreux écouter l’histoire de la construction du CFCO que beaucoup de Congolais ignorent. L’organisation qu’il préside, a-t-il indiqué, a lancé depuis 2013 une action judiciaire contre Spie Batignolles et Clayax Acquisitions, entreprises issues de la société de construction des Batignolles et ayant le monopole de construire des chemins de fer. Ces sociétés existent encore.

 Elles doivent, selon lui, réparer les préjudices causés à la population et aux localités riveraines. « Plusieurs pays sont également concernés, notamment le Tchad, le Cameroun, le Gabon, la Centrafrique, etc.  Quand il y a crime contre l’humanité, il doit y avoir une réparation en conséquence.  Le temps de cette réparation est arrivé ; la réparation est le principe de toute justice, il n’y a pas de paix sans justice, il n’y a pas de justice sans réparation. » , a-t-il martelé.

Comment se feront ces réparations ?

Louis Georges Tin pense qu'«il faut déjà commencer à faire l’inventaire des lieux sacrifiés, identifier ces lieux au Congo et ailleurs, identifier les besoins de la population concernée.  De même, apporter dans certains villages de l’eau, de l’électricité ; construire des écoles, des infrastructures, cette fois-ci sans travail forcé ».

Pour lui, ce travail doit être fait en collaboration avec les villages. Les personnes exprimeront les besoins qui sont les leurs. « La civilisation à laquelle nous sommes appelés aujourd’hui, c’est la civilisation de la vérité, la justice, l’humanité. Contribuons-y ensemble. », a-t-il signifié.

Signalons que l’ONG de France, le Cran, est basée à Paris, avec des antennes en Belgique, aux Etats-Unis, au Brésil.  Cette ONG lutte également pour la restitution des trésors coloniaux. Nombreux de ces trésors, a informé Louis Georges Tin, se trouvent dans les différents musées, notamment à Bruxelles, à Paris, à Londres,etc. « Nous travaillons pour qu'ils reviennent dans les pays d’origine.  La restitution est en marche, nous l’avons obtenu, le président Macron s’y est engagé.», a-t-il affirmé.

La 14e édition du Festival Mantsina sur scène se déroule du 10 au 20 décembre, à Brazzaville. Des rencontres autour de spectacles, conférences, projections, lectures et animations musicales enrichissent sa programmation.  

Rosalie Bindika

Légendes et crédits photo : 

Photo : Les deux universitaires pendant la conférence de presse

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