Messe en mémoire des victimes du 31 décembre : l'Épiscopat catholique fait monter la pression

Samedi 13 Janvier 2018 - 17:44

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L’Épiscopat congolais a annoncé , le 12 janvier, au cours d’un culte spécial à la cathédrale Notre-Dame de Kinshasa, que désormais le 31 décembre «resterait dans l’histoire comme le jour des martyrs de l’accord de la Saint-Sylvestre ».

 Jamais la cathédrale Notre-Dame du Congo n’a connu une affluence aussi grandiose pour une messe comme celle du 12 janvier. La ferveur religieuse avait ponctué cet office spécial convoqué par l’Episcopat pour célébrer la mémoire des victimes de la manifestation du 31 décembre 2017. L’église, assez exiguë pour contenir la masse des fidèles présents, était débordée. La présence des diplomates étrangers, de la représentante des États-Unis, du secrétaire du nonce apostolique ainsi que de quelques opposants (Martin Fayulu, Félix Tshisekedi, Vital Kamerhe et autres) avait donné une connotation particulière à cet office certes religieux mais à forte résonance politique. Le cardinal Laurent Monsengwo, en froid actuellement avec les autorités du pays à cause de ses derniers propos qualifiés d’attentatoires au pouvoir établi, a laissé le soin à l’un de ses auxiliaires de dire l’homélie, se contentant juste de diriger la messe.     

Les interventions de différents membres du clergé ayant ponctué cet office religieux ont été interrompues à plusieurs reprises par des salves d’applaudissements d’une assistance approuvant tout à la ligne. De quoi donner des ailes aux prélats catholiques qui, depuis la répression de la marche catholique du 31 décembre, ont le verbe haut. L’Église, ainsi que l’a martelé le porte-parole de la l’Episcopat catholique dans son intervention, « était dans son rôle et continuerait à appeler les Congolais à se mobiliser ».

L’abbé Donatien Nshole, qui a fait soulever la salle, relayait par là un message des évêques catholiques, plus que jamais déterminés à barrer la route à ceux qui voudraient confisquer le pouvoir. Mais le temps fort de cette messe, animée dans un climat tendu, a été l’homélie dite par l'évêque auxiliaire Donatien Bafuidinsoni qui a eu des mots justes pour traduire les aspirations d’une assistance chauffée à blanc. « Si nous avons perdu un frère, une sœur, nous avons gagné des héros, des vrais, parce qu'ils ont mêlé leur sang à celui de tous ceux qui sont morts pour l'alternance au pouvoir, gage de la démocratie », a-t-il déclaré. Tonnerre d’applaudissements.  

Nouvelle scène de violence         

Alors que pour le gouvernement il n’y a pas eu de morts le 31 décembre 2017 en rapport direct avec la marche des catholiques, Mgr Donatien Bafuidinsoni et tous ceux qui se sont relayés sur la chaire ont égrené le nom des six victimes de la répression policière ayant caractérisé cette manifestation. Il a aussi annoncé que désormais, le 31 décembre « resterait dans l’histoire comme le jour des martyrs de l’accord de la Saint-Sylvestre ».

Alors que la messe tendait vers sa fin, des chants hostiles au régime fusaient de l’extérieur et devenaient de plus en plus audibles au fur et à mesure. La police tenta en vain de calmer la ferveur des fidèles auxquels se sont joints des militants des partis politiques et autres badauds. C’est dans cette euphorie que le culte s'est terminé et, dans la foulée, quelques leaders politiques de l’opposition, escortés par des partisans hystériques, ont improvisé une procession, prenant de court les forces de l’ordre. En un temps deux mouvements, les opposants Vital Kamerhe de l’UNC, Jean Claude Mvuemba du MPCR et Félix Tshisekedi de l’UDPS, accompagnés de leurs militants scandant des slogans hostiles au pouvoir, se sont retrouvés hors des périmètres de l’église, revalant à pas feutré le boulevard ex-24 novembre.

Ce qui a pris les allures d’une marche improvisée, occasionnant un embouteillage sans précédent,  a été arrêté à mi-chemin, au niveau de la maison communale après interposition d’une jeep de la police. Face à une foule devenue incontrôlable, la police a eu recours au gaz lacrymogène et aux tirs de sommation. « À la demande pacifique de la police de se disperser, les manifestants ont répondu par des jets de pierre. Dans l'impératif de rétablir l'ordre public, les forces de l'ordre ont été amenées à les disperser  à coup de gaz lacrymogènes », explique le colonel Mwanamputu, le porte-parole de la police.

C’est dans la confusion et la panique généralisée qu'a pris fin cette marche improvisée avec, à la clé, « deux blessés légers, dont l'un aux pieds et l'autre à la hauteur de son nez », à en croire le bilan dressé par la police.

Alain Diasso

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