Arts plastiques: Doctrovée Bansimba dévoile son art à Amsterdam

Samedi 23 Juin 2018 - 12:25

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L'exposition solo des peintures de l'artiste congolaise se tiendra du 26 juin au 29 juillet, dans la capitale hollandaise, à la galerie 23 sous une thématique de son choix," Tchikumbi", qui est tout simplement une coutume ancestrale remontant à l'ancienne société Kongo, mais aussi une pratique institutionnalisée se présentant sous différentes formes en Afrique. L'artiste en fait une sorte de plaidoirie.

 

Le tchikumbi, affirme Doctrovée, est un rite initiatique à l’endroit de la jeune fille nubile qui se pratique au Kouilou, chez les Vilis, région de l’ancien royaume Loango et Yombé, où elle a passé une bonne partie de sa vie. Une région se situant précisément au sud du Congo Brazzaville. C'est une cérémonie d’initiation, de fécondité, précédant les noces des jeunes filles nubiles et consiste en l'apprentissage, dans un cadre de rigueur que renforce l'isolement pour accommoder des jeunes filles à la collectivité, leur faire savoir des mythes approximatifs de la création humaine, des codes spécifiques relatifs au rôle des futures femmes, mères, dames de cour, souveraines, leur apprendre surtout à vivre tout en respectant de nombreux interdits, "tchina".

Induite de tukula, poudre traditionnelle de couleur rouge et parée de beaux colliers, la tchikumbi est internée dans une maison en compagnie de deux de ses camarades choisies par cette dernière, légèrement plus jeune qu’elle n’étant pas encore nubile, qui l’accompagneront toute la période de quarante-cinq jours pour renoncer à son enfance, qui fera désormais partie du passé.

Ce sujet, pour notre jeune artiste, convoque une problématique des plus actuelles pour l'Afrique, celle de sa jeunesse. Le tchikumbi est l'une des nombreuses traditions africaines résistant à l'usure du temps, aux péripéties historiques. C’est le passé avec nous car, dit-elle, qui ne sait d’où il vient ne manquera pas de trébucher en chemin où il va. Résidant depuis quelques années à Paris, Doctrovée n’a pas oublié ses racines. Pour ne pas perdre la culture de son pays natal, elle tient à la vulgariser à travers la peinture.

Dans la ferveur des changements mondiaux actuels, déclare-t-elle, ce passé peut se présenter à la jeunesse avec des effets étourdissants. Ce passé intrigue, dit-elle.  Les belles parures et les sourires séducteurs de la tchikumbi frappent à l'œil, fascinant les histoires glorieuses d'une Afrique digne dont le nom se traduit en civilisations aussi nombreuses que grandioses.

Parlant des tableaux qu'elle exposera la semaine prochaine dans la Galerie 23, à Amsterdam, elle explique : "Le tchikumbi incarne à la fois le passé et le présent, les personnes qui vous font face ou vous tournent le dos". Dans « Romance », une de ses œuvres, la pomme offerte à la jeune fille par le prétendant symbolise l'heure de la défloration d'un passé qui a encore la savoureuse fraîcheur d'une vierge.

Les personnages aux visages masqués peuvent susciter un sentiment de confusion au point qu'on ait envie de leur demander d'enlever leurs cagoules bariolées ou de le faire soi-même ; ces personnages symbolisent l’inconnu. On pourrait aussi se demander si, masquer comme tel, le passé incarné dans le tchikumbi ne serait pas en train de sonner l'heure de sa propre mise à mort. Puisque « le visage est ce qui nous empêche de tuer », nous rappelle Emmanuel Levinas, rapporte-t-elle, cependant, ce passé est aussi en réalité un reflet, une passerelle, une sorte de pagaie au présent pour emboîter les pas du futur.

Aubin Banzouzi

Légendes et crédits photo : 

Photo1: Une des œuvres de l'artiste peintre Doctrovée Bansimba Photo2: Doctrovée Bansimba posant aux côtés de ses toiles

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