Interview. Pépé Felly Manuaku : « Le programme de mes 50 ans de carrière va se dérouler pendant toute une année »

Samedi 17 Novembre 2018 - 15:00

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Arrangeur, guitariste-soliste, ancien du légendaire orchestre Zaiko Langa- Langa, le leader de New Zaïko et désormais professeur d’université en Suisse a 64 ans et a célébré, à Kinshasa, ses 50 ans derrière la guitare. Le créateur de la note dansante "sébène" que livrent depuis plus de vingt-cinq ans les orchestres du registre Ndombolo nous fait sa lecture artistique après sa longue carrière musicale. 

Les Dépêches du Bassin du Congo (L.D.B.B. ): Cinquante ans après, quels sont les actifs et les passifs de Pépé Felly Manuaku ?

Pépé Felly Manuaku (P.F.M.): Les actifs et le passif… C’est difficile de répondre à cette question. Dans le contexte artistique, il appartient aux historiens et aux critiques d’art de pouvoir procéder à l’inventaire. Mais à moi de parler de moi-même, de soi-même, ce n’est pas évident.

L.D.B.B: Qu’est-ce qui a changé dans le personnage mythique de Felly Manuaku, après toutes ces années ?

P.F.M.: Ce qui a changé ? Peut-être j’ai atteint une certaine maturité… mais la personne est restée la même. Rien n’a changé.

L.D.B.B.: Pensez- vous à la relève ?

P.F.M. : Bon… la relève est là ! La relève se prépare. Le New-Zaïko, le groupe qui est en train de travailler avec moi à Kinshasa, est composé de jeunes hommes qui ont l’âge de mes propres enfants. Alors pour moi, c’est une façon de leur transmettre le travail. Je leur apprends les artifices du métier et partage avec eux ma propre expérience, mon parcours. Mes propres enfants aussi sont artistes, l’aîné de mes garçons est au Conservatoire au Canada. Il a entrepris une démarche qui consiste à amener la rumba congolaise dans la musique mondiale.

L.D.B.B.: Instrumentiste qui a su traverser le temps, direz-vous que la musique congolaise évolue ?

P.F.M.: Oui, la musique congolaise évolue tant bien que mal. Comme dans toutes les musiques, on trouve de bonnes et de mauvaises, à l'instar des aliments qui ne sont pas tous bons. On a la bonne nourriture et on a aussi de la mauvaise. Mais en présence, ça dépend. Ce qui peut être bon pour moi ne le serait pas forcément pour vous. C’est comme ça aussi. C’est la même la chose avec la musique congolaise.

L.D.B.B.: Pensez-vous que le métier de guitariste soliste attire de nos jours ?

P.F.M.: D’abord, je dois dire qu’un soliste n’est pas seulement un artiste libre. Dans mon groupe, New Zaïko, quand je fais le casting pour embaucher un guitariste, j’accepte celui qui peut me faire de la rythmique et du solo. En fait, le soliste peut être le trompettiste, le flutiste ou bien le chanteur aussi quand il fait la voix lead. Même le batteur peut l’être aussi. Alors, parler des guitaristes lead ou bien accompagnateurs, chez moi cela n’existe pas, on est guitariste tout court. Et un bon guitariste doit remplir un certain nombre des critères, notamment un bon rythmicien.

L.D.B.B.: Vous êtes à cheval entre Kinshasa et la Suisse. Y-a-t-il un calendrier pour votre groupe New Zaiko et de l’autre côté, de projet pour la République démocratique du Congo ?

P.F.M.: Alors, peut-être vous ne le savez pas… je suis professeur visiteur à 50 ans, à l’universitaire de Lumerik, en Irlande. J’y vais deux fois l’an. A la session de World musique, j’enseigne les étudiants de la licence et le doctorat en musique. J’ai eu la chance, pendant ce voyage-ci, de discuter avec le directeur général de l’Ina, le Pr Yoka Lye, qui a fait intervenir même le chef de travaux, le Pr Maluengo, pour que je puisse apporter mon petit savoir et partager ma petite expérience avec les étudiants de cet institut, parce que tout n’est pas rose. Il y a de trucs faciles et des choses difficiles. Il y a de chemin qu’on peut suivre et également à ne pas suivre. Il y a tout dans tout. Cette reconnaissance qui revient ici au pays à mon égard me fait énormément plaisir. Et puis, je suis vraiment ouvert à pouvoir partager mon expérience avec ceux qui veulent embrasser ce métier qui fait de moi ce que je suis aujourd’hui.

L.D.B.B.: Pensez-vous, comme d’autres, que la rumba congolaise perd sa place au niveau africain ? 

P.F.M. : En fait, c’est comme une roue qui tourne, c’est un cycle. Il y a le nouveau cycle qui va s’ouvrir, donc pas de panique. Il y a un tout qui va se remettre sur le rail, pas de soucis.

L.D.B.B.: Apres cet hommage,  y a-t-il un autre programme sur la carte ?

P.F.M. : Oui ! Ce programme de festivités des 50 ans de ma carrière va se passer pendant toute une année. Il a commencé le  26 août à Kinshasa et va couvrir toute l’année 2019. La suite, ce sera en Irlande, en université de Limerick. Et puis, c’est cela qui a interpellé des amis, des frères d’ici sur place. Ils se sont dit que les 50 ans de carrière de Pépé Felly Manuaku doivent commencer là où il a démarré sa carrière.

 

Propos recueillis par Karim Yunduka

Légendes et crédits photo : 

Pépé Felly Manuaku

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