Cinéma: Leslynna Bery distinguée pour son film contre la drépanocytose

Samedi 23 Février 2019 - 10:51

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

La jeune écrivaine et artiste pluridisciplinaire congolaise a participé, du 7 au 9 février, à la cinquième édition du festival komane dans la ville de Dschang, à l’Ouest du Cameroun. Elle a été primée pour "Demain est à nous", un court métrage contre la drépanocytose. Entretien.

Les Dépêches du Bassin du Congo (L.D.B.C) : Leslynna Bery, dites-nous ce que c’est que le festival Komane.

Leslynna Bery (L.B.) : Le festival komane est une manifestation du cinéma qui a pour vocation la vulgarisation des films éducatifs. Komane veut dire comment éduquer par le cinéma, selon le directeur du festival, Martial Kouamo Nkegne, réalisateur et scénariste de profession. Cette cinquième édition a été parrainée par Man No LAP, producteur camerounais.

L.D.C.B. : Comment avez-vous fait pour y participer ?

L.B.: C’est Achille Tekoumo, un ami camerounais à qui j’ai balancé la bande annonce de mon film "Demain est à nous", qui m’a demandé d’entrer en contact avec le directeur du festival, me disant que mon film pouvait l’intéresser par rapport au thème et à sa visée éducative.

L.D.C.B. :Parlez-nous de ce film.

L.B. : Comme l’indique le titre, "Demain est à nous" est un film qui parle des jeunes souffrant de la drépanocytose, mais qui ne se laissent pas abattre. Ils pratiquent le sport, vont en boîte, profitant de ce que la vie leur offre malgré un peu de répit pour être heureux. Ils croient aussi en l’amour. "Demain est à nous", c’est le vivre autrement des drépanocytaires. J’ai seulement voulu montrer que cette maladie génétique qui affaiblit le malade, qui le pousse parfois à se renfermer à cause des moqueries des amis de l’école, du quartier ou des certains parents…, n'est pas contagieuse et qu’il faut arrêter de stigmatiser les victimes qui ont droit à vivre comme tout le monde. Dans un mois, par exemple, c’est vingt jours de souffrances pour dix jours de vie normale, selon les différents cas.

L.D.C.B. :D’où vous est donc venue l’idée de réaliser ce film ?                                  

L.B. : J’ai longtemps côtoyé des drépanocytaires durant mon parcours scolaire. Ils étaient très souvent sujet aux railleries et ne venaient plus à l’école. Je me moquais également d’eux par ignorance comme les autres. Des années plus tard, étant catéchiste et présidente du groupe des Elisa que j’ai créé dans la paroisse où j’exerçais, un parent m’emmena sa fille de 12 ans qui aimait la danse liturgique et qui voulait intégrer le groupe. Elle était souvent pâle et avait des yeux d’une coloration jaunâtre.Très intelligente, gentille mais souvent malade, elle finit par être évacuée en France. C’est en 2009 que j'ai voulu en savoir plus sur la maladie, parce qu’elle avait emporté l’enfant d’une connaissance.  Je ne savais pas comment sensibiliser contre ce fléau destructeur, j’étais limitée. Devenue réalisatrice scénariste quelques années après, l’envie de mener ce combat a rebondi plus fortement. J’ai donc eu l’initiative de rencontrer quelques acteurs de la santé qui m’ont aidée à participer aux réunions de plusieurs associations des drépanocytaires du Congo. Pour préparer la Journée internationale de la drépanocytose qui se tient chaque 19 juin, on m’avait donc proposé d’écrire un scénario afin de le réaliser, voilà comment "Demain est à nous"  est né.

L.D.C.B. : Ce projet a donc été financé et c’est grâce à une subvention que vous êtes allée représenter le Congo au Cameroun ?

L.B. : Hélas non, nous n’avons pu obtenir de financement. Il fallait investir nos petites économies, bousculer quelques amis et connaissances. J'ai été confrontée à plusieurs obstacles ; mais face aux ravages de la drépanocytose, j'ai été assez motivée pour aller jusqu’au bout du projet.

L.D.C.B. : Que représente pour vous votre distinction ?

L.B. : Cela me touche au plus profond du cœur et me stimule à faire plus. D’ailleurs, c’est le thème qui a retenu l’attention des membres du jury. Personnellement, je ne m’attendais à aucun prix, je voulais juste profiter de cette plate-forme pour divulguer un message en faveur des drépanocytaires. Imaginez donc ma surprise et ma joie en entendant mon nom parmi les nominés, et surtout cette fierté en recevant le prix de la main du Dr Armand Nghemkap, médecin urgentiste de la France, grand homme de culture et délégué du festival éducatif pour la diaspora; les félicitations du Dr Tami, enseignant en art cinématographique; les encouragements et orientations du président du jury, Francis Noukiatchom, réalisateur et producteur… Tout ceci me donne l’espoir que par ce film, des familles entières arrêteront de se briser à cause de cette douloureuse maladie qu’est la drépanocytose et je souhaite, au Congo et ailleurs, l’initiation des programmes de soins gratuits aux drépanocytaires, un peu pour emboîter le pas au plaidoyer de Mme Antoinette Sassou N'Guesso.

Aubin Banzouzi

Légendes et crédits photo : 

Illustration

Notification: 

Non