Médecine pour tous: la dyspnéeJeudi 28 Février 2019 - 10:30 La dyspnée ou essoufflement anormal est une sensation de gêne respiratoire ressentie de façon aiguë ou progressive par un individu. Elle survient généralement au repos ou lors d’une activité modérée. Elle doit être documentée dans de brefs délais pour en évaluer le degré de gravité et en rechercher la cause en vue d’un traitement approprié. Mécanismes de la dyspnée Chez un sujet normal, la pression artérielle en oxygène (pO2) et en dioxyde de carbone (pCO2) est constamment en équilibre sous l’action de trois composantes du système de contrôle de la respiration : les centres de contrôle encéphaliques, les récepteurs et les effecteurs. Les premiers, localisés dans l’encéphale, contrôlent les mouvements et le rythme respiratoires, les seconds (centraux et périphériques) répondent aux variations en pCO2 et en pO2 artériels (chémorécepteurs ou récepteurs chimiques), les derniers enfin (muscles du thorax principalement), exécutent les mouvements respiratoires. Toute élévation significative de la pCO2 ou toute baisse de la pO2 dans les artères déclenche l’accélération du rythme respiratoire (normal à 10-20 mouvements respiratoires par minute) qui peut atteindre 30 à 40 par minute, voire plus. C’est alors la dyspnée. Les causes Selon les types de dyspnée, on retiendra les principales causes ci-après. Dyspnée aiguë, d’installation récente et rapidement évolutive, constituant une urgence : a) maladies cardiaques (œdème aigu des poumons [OAP], péricardite liquidienne ou hémorragique avec compression cardiaque [tamponnade]) ; b) maladies des poumons (embolie pulmonaire, crise d’asthme, pneumonie, pleurésie, pneumothorax, corps étranger, etc.) ; c) traumatismes thoraciques et intoxications diverses. Dyspnée d’installation progressive : insuffisance cardiaque, insuffisance respiratoire, obstructions bronchiques (asthme++), pneumopathies diverses (tabagisme, tuberculose, SIDA, etc.), anémie, obésité, etc. Comment connaître le niveau de gravité de la dyspnée ? Les critères de gravité sont définis par les stades suivants de la dyspnée établis par l’Association newyorkaise de cardiologie : stade 1=pas de dyspnée ; 2=dyspnée aux efforts importants ; 3= dyspnée aux efforts peu importants, 4= dyspnée au repos. Les critères respiratoires se déclinent ainsi : fréquence respiratoire ≥ 30/minute, mise en mouvement de tous les muscles respiratoires, cyanose (coloration bleu foncé des lèvres ou des extrémités), difficultés de parler, saturation en oxygène du sang artériel (SaO2) < 88%. Les critères circulatoires comportent : un pouls accéléré à >120/minute, une chute de la tension artérielle ou son élévation en cas de rétention élevée de pCO2. La démarche diagnostique L’interrogatoire du patient doit être minutieux et apporter des informations sur les points suivants : a) antécédents respiratoires et cardiovasculaires (cf. paragraphe sur les causes) ; b) notion sur les affections spéciales telles que l’allergie, la tuberculose, les angines et le rhumatisme articulaire aigu, les affections liées au sida, la drépanocytose, l’anémie, le paludisme chronique, le tabagisme, la prise de médicaments, etc. ; c) caractères de la dyspnée et son stade de gravité. L’examen clinique permet de caractériser la dyspnée et de faire l’inventaire du retentissement de l’affection causale (signes d’insuffisance cardiaque et/ou respiratoire, niveau de la pression artérielle, gros foie, œdèmes des jambes avec ou sans phlébite, cyanose, ictère conjonctival (« yeux jaunes »), etc. Les bilans complémentaires constituent une étape importante. Ainsi, la radiographie thoracique et le dosage de pO2, de pCO2 et des bicarbonates sont déterminants dans l’embolie pulmonaire, la pneumonie, l’insuffisance respiratoire et le gros cœur. L’électrocardiogramme (ECG) est contributif au diagnostic de l’embolie pulmonaire, de l’infarctus du myocarde, des péricardites et des arythmies. L’échocardiographie-Döppler trans-thoracique affirme les lésions cardiaques et leur gravité. Les bilans biologiques évaluent la gazométrie et recherchent une anémie, un diabète, une insuffisance rénale, une infection sévère, une embolie, un infarctus du myocarde, un sida, etc. Le scanner et la scintigraphie pulmonaire peuvent servir de recours dans certains cas (embolie pulmonaire notamment). Traitement à envisager Le traitement à conduire est fonction du diagnostic étiologique et du degré de gravité du tableau clinique. Les détresses respiratoires (embolie pulmonaire, œdème aigu des poumons, tamponnade, collapsus, notamment) sont prises en charge en réanimation. Les autres formes requièrent principalement un traitement étiologique, médical et/ou chirurgical. Conclusion La dyspnée doit être prise au sérieux et faire l’objet d’une consultation médicale le plus tôt possible. Seul le médecin décidera ou non d’une hospitalisation. Tout attentisme dans ce domaine expose à la survenue de situations pouvant être incontrôlables.
Christophe Bouramoué, professeur émérite, nbouramoue@yahoo.fr Notification:Non |