Affaire Chebeya : l’ombre des policiers fugitifs hante toujours le procès

Mercredi 22 Avril 2015 - 15:45

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Les audiences en appel des assassins présumés du défenseur des droits de l’Homme, Floribert Chebeya, et de son chauffeur Fidèle Bazana ont repris le 21 avril après près de deux ans d’interruption.

Le procès Chebeya a rebondi le 21 avril à la Haute cour militaire qui a siégé en appel en audience foraine à l’ex-prison de Makala après près de deux ans d’interruption. Pour cette reprise du procès, seuls cinq des huit prévenus se sont présentés devant la barre au nombre desquels Daniel Mukalay, numéro deux des services spéciaux de la police à l'époque des faits. Quant aux trois autres accusés en cavale, le tribunal a longuement débattu sur la manière de les impliquer dans cette affaire en leur absence sans que cela n’influe sur le cours du procès. Ces trois agents de la police en fuite, en l’occurrence Paul Mwilambwe, Christian Ngoy Kenga Kenga et Jacques Mugabo ont été condamnés à mort en 2011. Leur absence au procès complique quelque peu la donne lorsqu’on sait le rôle qu’ils ont joué dans l’assassinat du défunt président de la Voix des sans-voix (VSV), Floribert Chebeya, et de son chauffeur Fidèle Bazana.

Toutes les parties prenantes au procès ont livré leur perception en rapport avec cette équation gravitant autour d’une éventuelle suspension des poursuites à l’encontre des prévenus en fuite. Le conseil des prévenus et le ministère public qui ont appuyé cette démarche ont évoqué le souci de la célérité pour toute justification enjoignant la Cour à juger uniquement les accusés présents tout en opérant une disjonction des poursuites entre eux et les accusés en fuite conformément à l’article 94 du Code de procédure civile. Surfant sur cette proposition, l’organe de la loi a noté que le fait de chercher à notifier les trois fugitifs et de les impliquer dans le procès en leur absence allait ralentir la procédure et pénaliser les cinq prévenus qui sont à Kinshasa et qui attendent depuis 2010 de connaître leur sort.

Alors que l’État congolais, à travers ses représentants, a plaidé pour la surséance des poursuites et que la Cour statue séparément, la partie civile, elle, s’est carrément opposée à la disjonction et à la surséance de l’affaire. Pour elle, il serait maladroit de se passer des actes et des propos tenus par le policier Paul Mwilambwe dont les révélations sur les circonstances du décès de Floribert Chebeya enfoncent davantage l’ex-patron de la police, John Numbi, principal suspect dans cette affaire. Tenant à ce que ces éléments soient pris en compte, la partie civile a proposé que le défaut soit requis pour l’agent de police en cavale et qu’une commission rogatoire soit constituée afin de l’entendre sur PV à partir de Dakar de sorte à ramener son audition au procès, à défaut de l’extrader à Kinshasa. Le débat houleux s’est terminé en queue de poisson. Aucune option n’a été levée sur cette controverse. Finalement, la Cour a pris l’affaire en délibéré et renvoyé l’audience au 30 avril prochain afin de rencontrer les préoccupations des uns et des autres.     

Rappelons que le corps de Floribert Chebeya avait été retrouvé dans son véhicule le 2 juin 2010, dans la périphérie ouest de Kinshasa. La veille, il s’était rendu à un rendez-vous à l’inspection générale de la police, où il devait en principe rencontrer le général John Numbi. Le corps de son chauffeur, Fidèle Bazana, n’a toujours pas été retrouvé jusqu’à ce jour.

 

Alain Diasso