Afrique de l’Ouest : de nombreuses interrogations sur la raison d’être de la coopération militaire Ouagadougou-Bamako

Lundi 12 Septembre 2022 - 16:15

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Le Mali et le Burkina Faso, deux pays sahéliens en proie à des attaques de groupes islamistes, vont « renforcer leur partenariat militaire » au grand dam du G5 Sahel, une alliance militaire sous-régionale qui combat les groupes djihadistes, et dont Bamako s’en était retiré en mi-mai dernier. Les autorités maliennes invoquaient alors une « perte d’autonomie » au sein de cette organisation formée avec la Mauritanie, le Tchad, le Burkina et le Niger. Aujourd’hui, le peuple ainsi que de nombreux observateurs s’interrogent sur le bien-fondé de la coopération militaire bilatérale.

« Nous entendons, dans les jours à venir, mieux examiner et renforcer le partenariat militaire qui existe entre nous, pour davantage relever les défis sécuritaires auxquels les populations, nos peuples sont confrontés », a indiqué le président burkinabè, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, dans un communiqué rendu public à l’issue de sa récente visite au Mali. Une information confirmée par la présidence malienne.

Les deux pays se sont certes engagés à mutualiser leurs efforts pour lutter efficacement contre les djihadistes, mais cela n’a pas jusqu’à ce jour empêché les terroristes à poursuivre leurs attaques à travers les territoires malien et burkinabè. Au Mali, par exemple, des dizaines de civils ont été tués la semaine dernière dans la localité de Talataye (nord) par des djihadistes affiliés à l’organisation Etat islamique, qui étend son rayon d’action au prix de nombreuses exactions.

La junte militaire malienne compte sur les nouveaux équipements qu’il vient de recevoir de la Russie pour combattre les groupes islamistes qui y sévissent. « Nous consolidons notre capacité de reconnaissance et d’attaque avec des avions de chasse L39 et Sukhoi 25, qui s’ajoutent au Super Tucano et d’autres appareils déjà en dotation. Ainsi que les hélicoptères d’attaque de type Mi24P, qui s’ajoutent au Mi35 et au Mi24 déjà livrés », a confié le ministre de la Défense malien, Sadio Camara. En mars dernier, la Russie avait déjà livré plusieurs hélicoptères de combat et des armes au Mali qui a accueilli en grand nombre ce que les militaires au pouvoir présentent comme des instructeurs russes.

Que peut-on attendre du pacte Mali-Burkina ?

Pour ce qui est du Burkina Faso, il faut signaler qu’il a été à nouveau endeuillé par une nouvelle agression qui a fait au moins trente-cinq morts, le 6 septembre, soit un au lendemain du discours à la Nation du président dans lequel il saluait une « relative accalmie », dans plusieurs localités, régulièrement éprouvées par les attaques terroristes.  Ce massacre est intervenu alors que le gouvernement assure avoir intensifié les « actions offensives » de l’armée et initié un processus de dialogue avec certains groupes armés, via des leaders religieux et coutumiers. Un processus qui a permis, selon Paul-Henri Sandaogo Damiba, à « plusieurs dizaines de jeunes » de déposer les armes.

Devant la multiplication des violences terroristes au Mali et au Burkina, la population se demande pourquoi les dirigeants des deux pays ont préféré créer un partenariat militaire parallèle à la force du G5 Sahel au lieu de continuer d’agir dans le cadre de cette alliance régionale. Pourtant, fin août, le Burkina Faso et le Niger - pays également frappé par les groupes islamistes - avaient invité Bamako à « revenir assumer ses responsabilités » dans le cadre d’une coopération sous-régionale dans la lutte antidjihadiste. Le Tchad avait aussi lancé un appel similaire à l’endroit de Bamako. Les trois pays réagissaient à la décision des autorités de transition au Mali, empêchées d’assurer la présidence du G5 Sahel et de sa force conjointe, qui s’en étaient retirées pour cause, entre autres, d’une « instrumentalisation » au sein de l’organisation régionale.

Il est vrai que la coopération militaire Mali-Burkina a d’ores et déjà été engagée, mais que peut-on concrètement attendre de celle-ci, après que la junte malienne s'est retirée de la force conjointe mais aussi détournée de la France et de ses alliés pour se tourner vers la Russie ? Sera-ce un partenariat pérenne auquel les deux pays pourront en tirer profit pour leur sécurité ? Seul l’avenir nous le dira.   

 

 

Nestor N'Gampoula

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