Bastonnade des journalistes à Boende : le ministre de l’Intérieur interpellé

Samedi 28 Mai 2022 - 16:00

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Le comité exécutif de l’Observatoire de la liberté de la presse en Afrique (Olpa),  a protesté contre les actes de torture infligés à Cédar Sabiti Amuri, Junior Batu Ngole et Samuel Matela à Boende, chef-lieu de la province de Tshuapa, par les agents de l’Agence nationale des renseignements (ANR).

L'Olpa attend du vice-Premier ministre l’ouverture des actions disciplinaires à l’encontre des auteurs des actes décriés qui portent atteinte à la liberté de la presse. Dans sa correspondance signée par son secrétaire exécutif, Alain Kabongo Mbuyi, cette organisation indique que Cédar Sabiti Amuri, Junior Batu Ngole et Samuel Matela ont été convoqués par téléphone, le 19 mai, au bureau de l’ANR/Boende, et soumis à une bastonnade sur ordre du responsable provincial de l’ANR. « Ce n’est qu’après ce passage à tabac qu’ils ont été soumis à un interrogatoire serré. Au cours de leur audition, ils ont été accusés d’‘’offense aux services de l’ANR’’ », a expliqué Olpa. 

Cette accusation, selon cet observatoire, est consécutive à la diffusion, le 18 mai dans la soirée, sur les antennes de Radio Libérale FM, d’une émission intitulée « Echos de l’éducation » présentée par Samuel Matela, avec comme invités Cedar Sabiti Amuri et Junior Batu Ngole, au cours de laquelle les journalistes ont émis de vives critiques sur la baisse du niveau d’enseignement à Boende.

Ils ont, selon cette source, souligné la présence des agents de l’ANR dans les centres des examens d’Etat pour surveiller les élèves finalistes, appelant ces agents à faire preuve du sens de responsabilité et à bannir toute compromission. « Les trois journalistes ont été jetés au cachot de l’ANR comme des malfrats sans vêtements pendant 24 h. C’est en début d’après-midi du 20 mai 2022 qu’ils ont été transférés au parquet de Boende, où ils ont été relaxés par un magistrat pour insuffisance des charges. Le journaliste Samuel Matela s’en est sorti avec des douleurs atroces au niveau de la colonne vertébrale, du crâne et du bas ventre. Il a été conduit d’urgence à l’hôpital général de Boende pour des soins appropriés durant 4 jours », a expliqué cette association.

D’autres faits similaires à travers le territoire national

Olpa a indiqué qu’au centre du pays, dans la province du Kasaï, Adama Kankonde, journaliste à la radio locale Umoja de Nsumbula, a été, lui aussi, interpellé, le 19 mai à son domicile, par des éléments de la police nationale congolaise (PNC/Nsumbula) sur ordre de l’administrateur du territoire de Kamonia, Musua Kapinga. « Il a été conduit manu militari au cachot du sous-commissariat de police après avoir été auditionné par un officier de la police judiciaire », a souligné cette organisation.

A l’en croire, lors de son audition, le journaliste a été accusé d’avoir insulté l’administrateur du territoire au cours d’une émission intitulée « Le débat », diffusée le 18 mai, sur les antennes de la radio locale Umoja de Nsumbula. Il est également indiqué qu’à Kinshasa, Donat Kuyula, journaliste à l'hebdomadaire "The Post", a été interpellé le 17 mai par des éléments de la police militaire et conduit au camp militaire Kokolo où il a été détenu pendant plusieurs heures.

Une autre professionnelle des médias, Nathalie Lokwa, journaliste à Congo education broadcasting system, station privée émettant à Kinshasa, a été interpellée, le 19 mai, par les éléments de la police de circulation routière à la place Assanef, à Lingwala. C’était au moment où il effectuait un reportage sur les tracasseries policières subies par les automobilistes. 

Selon la même source, dans la province du Sud-Kivu, Godefroid Ametumwa Byamungu, directeur à Radio communautaire Sauti ya Amani, station émettant à Luberizi, dans le territoire d’Uvira, continue de recevoir, depuis le 3 mai, des appels téléphoniques provenant du chef du groupe armé Maï-Maï Kijangala, M. Kijangala, le menaçant de représailles.

Ces menaces sont consécutives à la diffusion, le 1er mai , d’une information faisant état de la perte d’un bastion de cette milice située aux moyens plateaux d’Uvira, après des combats avec les Forces armées de la République démocratique du Congo. Ce chef milicien, note l’organisation, exige que le journaliste fasse un démenti sur cette information et diffuse la version selon laquelle les forces loyalistes auraient subi des revers et deux de leurs seraient capturés. « Il a promis de tuer le journaliste si sa radio ne diffusait pas ce démenti », a souligné cette association.

Et d’ajouter qu’Innocent Muhala, directeur à Radio communautaire Mutula Luvungi (RCML), station émettant à Luvungi, territoire d’Uvira, a reçu plusieurs menaces de mort et des représailles, les 4 et 11 avril, de la part du chef milicien du groupe armé dénommé Bihaga Bishambuke, M. Muhirwa. A l’en croire, ce dernier reprocherait au journaliste de diffuser régulièrement sur les antennes de RCML, des informations accusant son groupe d’être à la base de l’insécurité qui sévit dans cette partie du pays.

A l’Equateur, le siège de la Radiotélévision Sarah, station privée émettant à Mbandaka, est toujours assiégé par les éléments de la Police nationale congolaise, depuis le 18 novembre 2021, après que ce média avait été suspendu pour une durée de soixante jours par le ministre provincial chargé de l’Intérieur, Ordre public, Sécurité, Population, Décentralisation et Affaires coutumières, Alain Elodji Basi.

L’Olpa conclut que plusieurs personnes travaillant dans les services dépendant directement du ministère de l’Intérieur, Sécurité et Affaires coutumières s’adonnent à cœur joie dans la commission des actes portant gravement atteinte à la liberté de la presse alors que d’autres, par contre, brillent par l’inaction et assistent parfois à des attaques contre les professionnels de la presse sans leur apporter une quelconque assistance. Il pense qu’il est grand temps de briser cette spirale de violences contre le personnel des médias durant cette période où le pays prépare les élections générales pour l’année prochaine avec la crainte de voir les actes d’intolérance contre les médias monter en flèche et se généraliser.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

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