Centrafrique : la violence et l’insécurité persistent, selon des experts de l'ONU

Mardi 6 Août 2013 - 4:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel

La sonnette d’alarme sur la situation des droits humains dans ce pays a été tirée le 5 août par un groupe d’experts indépendants des Nations unies. Ils ont exhorté les autorités centrafricaines actuelles à prendre des mesures pour mettre fin aux violations de ces droits maintes fois décriées

« Nous sommes gravement préoccupés par les allégations d’assassinats, d’actes de torture, de détentions arbitraires, de violences contre les femmes, de disparitions forcées, de justice populaire, ainsi que par le climat généralisé d’insécurité et par l’absence d’État de droit qui prévalent dans le pays depuis ces cinq derniers mois », ont déclaré les experts. Ils ont souligné que « l’État de droit est quasi inexistant », et que « les abus de pouvoir et l’impunité sont devenus la norme » en Centrafrique. Ils ont demandé de garantir que les responsables de ces actes ne restent pas impunis.

Le rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Christof Heyns, a souhaité qu’une enquête soit menée afin de punir les auteurs et autres commanditaires des violations des droits humains. « Il y a eu plusieurs assassinats, parfois en représailles après des incidents de justice populaire contre des membres de la coalition Séléka. Environ 46 cas auraient été documentés […]. Je lance un appel pour une enquête approfondie, transparente et indépendante sur tous les cas suspectés d’exécutions arbitraires pour identifier les responsables et les traduire en justice », a-t-il insisté.

Pour sa part, le rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, Juan E. Méndez, a averti que la torture était « généralisée » et noté qu’au moins vingt-cinq personnes seraient mortes à la suite d’actes de torture et autres traitements inhumains ou dégradants. « J’exhorte les autorités à s’assurer que toute allégation de torture ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant fera l’objet d’une enquête par les responsables de l’application des lois et que les auteurs de ces actes seront sanctionnés », a-t-il déclaré. Et d’ajouter que le droit international des droits de l’homme interdisait de « façon absolue et non dérogeable la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

Le groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires a reçu des allégations de disparitions forcées. Le groupe d’experts a exprimé sa profonde préoccupation face aux allégations selon lesquelles nombre de civils ainsi que d’officiers et de soldats de l’armée centrafricaine auraient été enlevés par des groupes armés de Séléka. Le 14 avril 2013, un sergent-chef du bataillon amphibie et un soldat de première classe de la garde de l’ex-président auraient été arrêtés et emmenés vers une destination inconnue. « Tout acte de disparition forcée est une offense à la dignité humaine et aucune circonstance quelle qu’elle soit ne peut être invoquée pour justifier ce crime abominable », a rappelé le groupe de travail.

Rashida Manjoo, la rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, a indiqué que les Centrafricaines subissaient des humiliations intolérables.  « L’Etat a la responsabilité d’exercer la diligence requise pour prévenir les actes de violence contre les femmes, diligenter des enquêtes et punir les auteurs de ces actes, qu’ils soient commis par l’État ou par des personnes privées. Les femmes et les filles qui ont souffert doivent avoir accès à l’assistance médicale, psychologique et sociale, entre autres, ainsi qu’à des mécanismes de justice effectifs et à des recours justes et efficaces », a-t-elle déclaré. « De nombreux cas de violence contre les femmes, en particulier des abus sexuels et des viols, ont étés rapportés dans toutes les localités que les combattants de Séléka ont traversées », a affirmé Rashida Manjoo. À en croire ses propos, entre le 13 et le 16 avril dans le quartier Boy-Rabe de Bangui, de nombreuses femmes et jeunes filles, quelques-unes âgées de 12 à 14 ans, auraient été violées durant des opérations qui avaient pour but de pacifier et de désarmer le quartier.

Rappelons que plusieurs mouvements rebelles rassemblés dans la coalition  Séléka ont repris les hostilités contre le gouvernement le 22 mars . Deux jours plus tard, ils sont entrés dans la capitale, Bangui, et ont pris le pouvoir. Actuellement, la Centrafrique est gouvernée par un Conseil national de transition dirigé par Michel Djotodia et par un gouvernement transitoire de trente-quatre membres formé le 12 juin.

Nestor N'Gampoula