Devant le congrès : Joseph Kabila annonce un gouvernement de cohésion nationale

Mercredi 23 Octobre 2013 - 19:15

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La nouvelle équipe gouvernementale comprendra aussi bien les représentants de la majorité que ceux de l’opposition et de la société civile.

« J’annonce, dans le cadre de la politique d’ouverture prônée depuis mon investiture, qu’un gouvernement de cohésion nationale sera bientôt mis en place ». C’est en ces termes que s’est exprimé Joseph Kabila le 23 octobre devant les deux chambres du Parlement réunies en congrès au Palais du peuple à la lumière des recommandations issues des concertations nationales. Devant son homologue de la République du Congo, Denis Sassou N'Guesso, de la présidente de la Commission africaine, Dlamini Nkosazama Zuma, et de nombreux invités, Joseph Kabila a indiqué à son peuple et aux institutions de la RDC la marche à suivre afin de matérialiser lesdites recommandations.

« C’est à un changement profond que nous sommes collectivement appelés, changement de mentalité, de méthodes et de comportements », a-t-il déclaré avant de dévoiler les contours du prochain gouvernement. Celui-ci comprendra aussi bien les représentants de la majorité que ceux de l’opposition et de la société civile. Il aura pour mission prioritaire de rétablir la paix et l’autorité de l’État sur l’ensemble du pays, de consolider la cohésion nationale, de poursuivre l’œuvre de la reconstruction, d’appuyer le processus de décentralisation et d’améliorer les conditions sociales des citoyens.

Poursuivre le cycle électoral

Tout en souscrivant à toutes les recommandations prises dans le cadre des concertations nationales, Joseph Kabila a noté la nécessité de planifier leur mise en œuvre à court, moyen et long terme au niveau tant national, provincial que local. Et parmi les priorités, l’organisation des élections locales, municipales, provinciales et sénatoriales figure en bonne place. Aussi a-t-il exhorté la Commission électorale nationale indépendante (Céni) à présenter en toute diligence au Parlement le calendrier électoral et à poursuivre le cycle électoral sans atermoiements. Quant au Sénat et les Assemblées provinciales en fonction, le chef de l’État estime qu’il est nécessaire de les maintenir jusqu’à l’installation effective de nouvelles institutions correspondantes issues des élections à organiser dans un délai court.

Sur la même lancée, Joseph Kabila a réitéré sa proposition de faire obligation aux formations politiques de présenter sur chaque liste électorale des candidats éligibles au moins 30% des femmes. Tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un progrès notable qui ne garantit cependant pas une augmentation sensible de la gente féminine dans les assemblées délibérantes, il a néanmoins invité le législateur « à examiner la possibilité d’ajouter dans chaque circonscription de trois sièges ou plus, un siège pour qui la compétition ne sera ouverte qu’aux femmes ». Et pour assurer la crédibilité des élections à venir, il a déclaré souscrire à l’organisation du recensement général (la dernière remonte en 1984) et à l’identification des Congolais, voie obligée pour la délivrance de nouvelles cartes d’identité.

Bannir l’affairisme au sein de l’armée et la police

Rejoignant les recommandations des concertateurs en rapport avec la thématique « Désarmement, démobilisation, réinsertion sociale ou rapatriement », le chef de l’État a noté la persistance de l’instabilité dans les territoires de Rutshuru, de Nyrangongo et de l’Ituri perpétrée par des groupes armés à la solde des intérêts étrangers en violation du droit international. Il a indiqué souscrire totalement à l’idée d’éradication des groupes armés. « Ces groupes, quels qu’ils soient, n’ont d’autre choix que de déposer les armes et de se rendre ou d’y être contraints par la force », a-t-il martelé. Dans la foulée, il a exhorté le gouvernement à veiller à la professionnalisation et à la montée en puissance des Fardc. Là-dessus, il a loué les récents hauts faits d’armes de l’armée nationale dans la défense de l’intégrité du territoire et dans la sécurité des personnes et de leurs biens. Il a, sur le même ordre d’idées, plaidé pour la poursuite de la réforme du secteur de sécurité qui passe à ses yeux pour la priorité des priorités. Une feuille de route a déjà été élaboré par le gouvernement afin d’opérationnaliser cette réforme.

Aussi, pour renforcer davantage la discipline au sein des Fardc, a indiqué Joseph Kabila, l’auditeur général est appelé à accentuer les enquêtes à charge d‘officiers supérieurs et subalternes ainsi que des hommes de troupes soupçonnés de pillages des ressources et de détournement des soldes des militaires. « Tout affairisme doit être banni dans l’armée et la police », a en outre souligné Joseph Kabila tout en ajoutant que les cadres et agents des services de sécurité devraient dorénavant être soumis aux règles rigoureuses d’éthique. Il a, par ailleurs, annoncé la nomination prochaine d’un représentant du chef de l’État en charge de promouvoir la lutte contre les violences sexuelles ainsi que le recrutement d’enfants soldats censé servir d’interface avec la communauté internationale dans ce domaine.

Libération en vue des prisonniers militaires et civils

Au chapitre de la « Paix et de la réconciliation nationale », Joseph Kabila a annoncé à l’assistance la signature le même jour d’une ordonnance portant mesure de grâce. Une fois terminée, la libération conditionnelle des prisonniers civils, a-t-il indiqué, il sera procédé à celle des prisonniers militaires. Les militaires détenus sans jugement ou condamnés mais éligibles à la grâce présidentielle devront attendre la loi d’amnistie dont le projet sera bientôt transmis au Parlement. Il a invité le Parlement à faire diligence pour que ledit projet soit examiné et adopté dans les meilleurs délais. Et pour instaurer un nouveau climat de confiance entre les Congolais, il a déclaré que des dispositions seront prises en vue du rapatriement de la dépouille de l'ancien président Mobutu Sese Seko et de l’ancien Premier ministre Moïse Tshombe et ce, en accord avec leurs familles respectives.

Dans le domaine économique, l’on retiendra entre autres, il a égrené quelques mesures parmi lesquelles l’organisation des états généraux des agriculteurs et des paysans, la réforme du secteur fiscal, la poursuite de l’évolution de la certification des ressources minières, forestières, halieutiques et en hydrocarbures, la restructuration de la Cour des comptes, la consolidation du climat des affaires, etc.  

Obligation de déclarer les biens

Et compte tenu de l’ambiance de corruption généralisée, de détournement des deniers publics, de coulage des recettes, Joseph Kabila a plaidé pour le renforcement de la lutte contre l’impunité par la redynamisation des mécanismes de répression existants. Et le président de la République d’inviter le Parlement et les Assemblées provinciales à réactiver leur pouvoir de contrôle. Toutefois, la quête de la cohésion nationale n’étant pas synonyme de l’impunité, il a insisté sur la poursuite de la réforme de l’appareil judiciaire sur fond d’une collaboration agissante avec la Cour pénale internationale.  

Dans la foulée, il a annoncé la nomination imminente d’un conseiller spécial du chef de l’État en charge de cette question. Il sera chargé d’assurer le monitoring permanent de l’évolution des patrimoines ainsi que d’inventorier les cas de malversation, de corruption et d’enrichissement illicite dans le chef des responsables politiques, de hauts fonctionnaires, des cadres de l’administration publique, des mandataires publics, etc. « J’instruis le gouvernement de soumettre au Parlement un projet de loi généralisant l’obligation de déclarer les biens à tous les mandataires publics », a-t-il déclaré en substance.

Enfin, Joseph Kabila a dit faire siennes toutes les recommandations issues des concertations nationales car, comme il l’a souligné en liminaire, « quelque pertinente que soit une recommandation, sa capacité contributive à la transformation de la société est fonction de sa mise en œuvre ».                     

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

          

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Photo 1: Denis Sassou Nguesso et Joseph Kabila faisant leur entrée dans la salle de Congrès; Photo 2: Joseph Kabila s'adressant aux congressistes; Photo 3: Aubin Minaku, Denis Sassou N'Guesso, Joseph Kabila et Léon Kengo wa Dondo; Photo 4: Denis Sassou N'Guesso et Joseph Kabila