France : un économiste refuse la Légion d’Honneur

Samedi 3 Janvier 2015 - 12:30

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L’auteur du "Capital au XXIè siècle", défenseur d’une grande réforme fiscale, l’économiste français Thomas Piketty a refusé sa nomination pour la Légion d’honneur. Il qualifiait encore, il y a quelques mois d’ « improvisation » la politique du gouvernement en matière fiscale.

Thomas Piketty ne pense pas que « ce soit le rôle d’un gouvernement de décider qui est honorable », l’invitant à « se consacrer à la relance de la croissance en France et en Europe ». Il ajoute qu’il n’avait pas été prévenu de cette nomination « sinon je les en aurai immédiatement dissuadé ». C’est sur proposition de la secrétaire d’Etat à l’Enseignement et à la recherche, Geneviève Fioraso que Thomas Piketty a été retenu au titre de chevalier. Son geste a suscité des réactions assez diverses.

La légion d’honneur relève d’une proposition par un tiers, lui-même titulaire de la distinction. En général, son refus se manifeste par l’absence du récipiendaire à la cérémonie.

Le gouvernement a critiqué la position de l’économiste

Son porte-parole, Stéphane Le Foll a estimé que c’était le choix de Thomas Piketty. « Il essaye de donner quelques conseils, ça fait partie du débat », a-t-il dit. Le secrétaire d’Etat à la Réforme de l’Etat et à la simplification, Thierry Mandon pense, pour sa part que la grande réforme prônée par Thomas Piketty était « inapplicable, car elle est tellement compliquée, tellement globale et a de tels effets de redistribution entre les Français que, si on la faisait, il y aurait une protestation généralisée ». Mais il ajoute : « c'est au gouvernement de distinguer les méritants », considérant la décision  de l’économiste «  plutôt politique ».

Sur la forme, la secrétaire d'État chargée du Numérique Axelle Lemaire a critiqué la décision de l’économiste : « on peut refuser sans forcément le dire dans une dépêche AFP un1er janvier », a-t-elle déclaré. Elle pense que l’économiste « confond le fait qu'une Légion d'honneur c'est une récompense pour un mérite qui est reconnu par la Nation et pas une adhésion à une politique économique d'un gouvernement ».

Jadis proche du Parti socialiste (PS), et soutien du futur président François Hollande en 2012, Thomas Piketty, connaît un rayonnement mondial en 2014 avec son livre qui traite des inégalités et du capitalisme patrimonial, vendu à plus de 1,5 million d’exemplaires. Les idées de Thomas Piketty ont nourri le PS notamment sur les questions fiscales, avant de connaître un retentissement international aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.                                                                              

Grand chancelier de la Légion d’honneur, le général Jean-Louis Georgelin  regrette le refus de l’économiste, jugeant qu’il ne s’agissait que d’une péripétie dans les deux siècles de son histoire ». Thomas Piketty faisait partie de 690 personnalités promues.

Avant Thomas Piketty, les anciens ministres Pierre Messmer, Philippe Seguin, les écrivains Simone de Beauvoir, Jean Paul Sartre, Albert Camus, les scientifiques Pierre et Marie Curie, les chanteurs Georges Brassens, l’abbé Pierre et bien d’autres, ont décliné la Légion d’honneur.                                                             

 Thomas Piketty, 43 ans,  enseigne à la MIT de Cambridge, et à l’école d’économie de Paris, dans les universités américaines. Son best-seller, « Capital au XXIè siècle » est un pavé de près de 700 pages.

Noël Ndong