Interview. Chris Antoine Walembaud : « Il faut donner un peu de temps au gouvernement Makosso »

Jeudi 25 Novembre 2021 - 14:29

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Dans une interview exclusive accordée au journal « Les Dépêches de Brazzaville », le président du Congrès des démocrates africains (Codema), Chris Antoine Walembaud, a déclaré qu’il faut accorder  un peu de temps au gouvernement Makosso avant d’apprécier son action. Il a également abordé des questions liées à la gouvernance électorale et aux dernières actualités économique et politique du Congo.

Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B) : Monsieur le président, votre partenaire politique, Antoine Thomas Nicéphore Fylla Saint-Eudes, n’est plus seul au gouvernement en tant que personnalité issue d’un groupement politique de l’opposition. Il y a également Honoré Sayi. Votre commentaire.

Chris Antoine Walembaud (C.A.W) : Nous sommes heureux de constater que ceux qui se sont évertués à nous combattre, à nous invectiver ont compris la quintessence de l’esprit insufflé par la nouvelle République, laquelle se veut être une République de partage où ceux qui gagnent ne gagnent pas tout et ceux qui perdent, ne perdent pas tout.

 Vous savez très bien que le Parti républicain libéral, la formation politique fondée par Nicéphore Fylla Saint-Eudes, n’avait pas pu être admise dans la plateforme dirigée par le chef de file de l’opposition, Pascal Tsaty Mabiala, au motif qu’il devrait être considéré désormais comme un parti membre de la majorité présidentielle, parce que son leader était devenu ministre. En son temps, la Convention des  partis républicains avait vigoureusement condamné ce refus viscéral, folklorique et caricatural. Avec l’entrée au gouvernement d'Honoré Sayi en qualité de ministre de l’Energie et de l’Hydraulique, nous pouvons considérer que ce débat est définitivement clos.

L.D.B : Le nouveau gouvernement venait d’être nommé par le chef de l’Etat avec à sa tête, Anatole Collinet Makosso.  Que dites-vous des résultats déjà obtenus par ce dernier et qu’attendez-vous concrètement de l’équipe gouvernementale qu’il dirige ?

C.A.W : Il est vrai que celui qui est actuellement le Premier ministre du Congo a été membre de l’équipe que dirigeait le défunt Clément Mouamba.  A ce titre, il est donc conscient de l’ampleur de sa tâche et de la nature des défis qu’il se doit de relever. Le travail gouvernemental s’inscrivant toujours dans une logique de continuité, nous n’avons pas entendu Collinet Makosso parlé de » rupture ». Si l’on s’en tient justement au bilan, il n’est pas de bon aloi de s’engager dans une démarche visant à apporter une appréciation sur ce qu’il a déjà fait ou sur qu’il est en train de faire, sans en avoir les éléments. Ma réponse à votre question ne sera donc pas une « charge politique ».

En effet, n’étant ni ministre, ni député, il me paraît difficile d’apprécier objectivement le gouvernement. La prudence voudrait que nous nous abstenions. Nous pouvons néanmoins nous interroger sur les réponses données par ledit gouvernement, aux préoccupations exprimées par la population congolaise. Aussi est-il utile de savoir si un schéma de traitement de la question de la colossale dette du Congo a déjà été élaboré nonobstant les décaissements promis par le Fonds monétaire international;  la résolution de la question des retraités est-elle véritablement en cours ?; y-a-t-il des solutions structurelles qui ont déjà été trouvées ?;  les bénéficiaires des pensions ont-ils été mis au courant de l’existence de ces solutions à court et à moyen terme ?;  l’incroyable problématique de l’eau et de l’électricité a-t-elle trouvé des réponses idoines ?; le gouvernement Makosso a-t-il déjà jeté les bases pour la résolution de la délicate question de l’emploi des jeunes diplômés? Des décisions portant sur l’emploi ou le recrutement de ces jeunes sont-elles réellement mises en œuvre ?

Il s’agit de dire aux Congolais et ce, de façon périodique, que le gouvernement est venu à bout de l’érosion dans tel ou tel autre quartier. Peut-être que le gouvernement de la République a déjà obtenu des résultats probants et qu’il se poserait, dans ce cas, un problème de communication qui occulterait ses réalisations dans les domaines que nous venons d’inventorier. Cela est possible. Nous pensons, pour notre part, que nos compatriotes commencent à être excédés par cette politique à géométrie variable et ils font le constat qui donne à penser que ceux qui dirigent ne font pas ce qu’ils disent.

Nous invitons toutefois le peuple à un peu plus de patience étant donné que le nouveau Premier ministre, qui a hérité d’une situation chaotique en raison de la baisse du prix du baril de pétrole, au demeurant exacerbée par la crise de la covid- 19, mérite de bénéficier d’un délai de grâce, mais aussi d’une certaine indulgence. En gros, il lui faut du temps pour redresser les choses.

L.D.B : En tant qu’acteur politique de l’opposition, qu’attendez-vous du nouveau ministre de l’Administration du territoire, de la Décentralisation et du Développement local ?

C.A.W : Nous attendons de lui beaucoup de choses. En capitalisant sur les acquis de son prédécesseur, le nouveau ministre devrait continuer à multiplier des efforts pour l’amélioration de la gouvernance électorale. Les scrutins sont souvent sources de conflits au Congo. Nous devrons épargner la population de cette charge psychologique.  Vous savez qu’une action politique ne s’apprécie que dans le temps.

L.D.B : Quels sont les projets du Codema pour les éléctions législatives et locales de  2022 ?

C.A.W : Le Codema, mon parti, est encore jeune. Toutefois, les cadres et les militants qui le composent envisagent de lui conférer une certaine dimension et une réelle représentativité nationale à l’occasion des législatives et des locales prévues en 2022. Le fief du Codema, c’est bien le département du Pool ; même si nous avons des conseillers à Pointe-Noire et dans la Sangha. Nous projetons de tout mettre en œuvre, pour avoir des élus là où nous avons une assise plus marquée.

L.D.B : Pensez-vous que le département du Pool dont vous êtes originaire est véritablement en paix ?

C.A.W : Vous parlez de paix véritable dans le département du Pool ? Ce n’est pas notre point de vue. A contrario, dire que les choses n’ont pas positivement évolué, c’est faire preuve de manque de  sincérité. La situation de 2016, 2017 n’est pas celle d’aujourd’hui. Mais comment expliquer que certains individus qui continuent à être auteurs d’infractions ou de violence sur leurs concitoyens ne soient pas poursuivis par la justice et mis aux arrêts ? Nous nous insurgeons contre l’impunité dont bénéficient ces fauteurs de troubles.

Le gouvernement se doit de faire une évaluation dans cette partie du pays  avant l’organisation des élections de 2022 et apporter des solutions à un certain nombre de problèmes particulièrement dans les domaines de la réinsertion des jeunes (il y a beaucoup de tapage médiatique dans les structures responsables de cette mission ; mais les résultats tardent à être visibles), de la libre circulation des personnes et des biens ( le phénomène des coupeurs de route est récurrent) et dans la répression du grand banditisme.

L.D.B : Nous sommes arrivés à la fin de cet entretien. Avez-vous une évocation tardive ?

C.A.W : La répétition étant  la mère des pédagogies, nous exhortons  le Premier ministre à s’attaquer aux problèmes réels qui minent le développement de notre pays ; mais nous reconnaissons également qu’il a hérité d’une situation catastrophique au plan financier. Il lui faut être très imaginatif et surtout se doter d’un courage pour imposer sa vision aux thuriféraires du régime et satisfaire aux attentes du président de la République, qui lui a fait confiance.

 

Propos suscités par Roger Ngombé

Légendes et crédits photo : 

Chris Antoine Walembaud

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