Point de vue : Gilda Rosemonde Moutsara Gambou donne sa vision sur les questions politiques de l’heure

Mardi 3 Juin 2014 - 15:20

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Au cours d’un entretien accordé au journal Les Dépêches de Brazzaville, Gilda Rosemonde Moutsara Gambou, écrivaine de profession, a exprimé son point de vue sur les grandes questions politiques du moment, notamment sur le débat portant sur le changement ou la révision de la Constitution du 20 janvier 2002

 

Les Dépêches de Brazzaville : Chère Madame, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Gilda Rosemonde Moutsara Gambou : Je m’appelle Gilda Rosemonde Moutsara Gambou. Je suis congolaise, j’ai fait des études de lettres et je suis écrivaine. En 1998, j’obtiens le 4e prix de l’ACCT avec ma nouvelle intitulée Le socle en pleurs. Je suis également auteure de deux romans : Les nouvelles d’Eloïse et Les papiers de maman.

LDB : Comment justifiez-vous le basculement de l’écriture à la politique ?

GRMG : On s’accorde très souvent à dire que de l’écriture à la politique, il n’y a qu’un pas. Je pense que le rôle de l’écrivain est de porter un regard critique sur sa société. Ce qui justifie le fait que mes écrits, une fois rassemblés, incarnent une peinture sociale. J’observe beaucoup la société dans laquelle je vis pour la comprendre et pour mieux l’expliquer. Observer la société, c’est aussi observer la politique, car la réalité sociale d’un pays est le reflet de la politique menée par ses dirigeants.

LDB : Pourquoi le faites-vous maintenant ?

GRMG : Avec la conférence nationale souveraine de 1992, le Congo a fait le choix de la démocratie. La fin du monopartisme et de la confusion des pouvoirs a laissé la place à un État de droit, et je pense que c’est le devoir de tout citoyen congolais de défendre cet État de droit. Le projet portant sur la révision ou le changement de la Constitution du 20 janvier 2002 constitue, à mes yeux, un danger pour notre démocratie et une menace pour notre nation. L’écrivaine que je suis ne peut donc pas rester en marge du débat en cours, puisque j’ai aussi pour mission de tirer la sonnette d’alarme et d’éveiller les consciences. Je considère que le temps est venu pour chaque citoyen congolais de défendre les acquis de la conférence nationale souveraine.

LDB : Pourquoi dites-vous non au changement de la Constitution du 20 janvier 2002 ?

GRMG : Les dirigeants politiques de la majorité présidentielle par le biais du président de l’Assemblée nationale, soutiennent que la Constitution du 20 janvier 2002 doit être soit modifiée soit changée. Lors de la tournée du président de la République à Dolisie dans le Niari, les sages de ce département ont appelé le chef de l’État à modifier la constitution au nom de la paix, de la stabilité et du développement. C’est à ce moment que la boîte de pandore a été ouverte. Et depuis, cette question divise non seulement la classe politique congolaise, mais aussi l’ensemble des citoyens.

Je m’oppose au projet de révision ou de changement de la Constitution du 20 janvier 2002 car j’ai l’intime conviction que cette démarche est entreprise dans le seul but de maintenir un homme au pouvoir. Cela m’indigne beaucoup car l’article 57 de la Constitution du 20 janvier 2002 limite à deux le nombre de mandats présidentiels. De ce fait, la Constitution du 20 janvier 2002 garantit, d’une part, l’alternance politique indispensable à une installation durable de la démocratie dans notre pays. D’autre part, elle donne l’opportunité au peuple congolais de connaître une nouvelle gouvernance.

LDB : Quels sont les moyens ?

GRMG : La Constitution du 20 janvier 2002 me garantit le droit d’exprimer librement ma pensée, notamment mes opinions politiques. C’est là un droit fondamental que je fais valoir dans ma prise de position.

LDB : Comment allez-vous procéder ?

GRMG : Notre pays, le Congo, se trouve indiscutablement à un tournant de son histoire. Nous devons pour cela prendre la mesure de nos responsabilités. Pour que ma prise de position porte ses fruits, je vais mobiliser les citoyens congolais notamment les jeunes contre le projet de révision ou le changement de la Constitution du 20 janvier 2002. Cela se fera principalement par des rencontres citoyennes dans le but d’éveiller les consciences, d’amener les citoyens à s’opposer fermement à ce qui n’est rien d’autre qu’un coup d’État constitutionnel.

LDB : Quel est votre état d’esprit ?

GRMG : C’est en toute liberté de conscience que je prends position contre le projet de révision ou de changement de la Constitution du 20 janvier 2002. Je me laisse porter par le sentiment d’indignation que ce projet suscite en moi, et par la conviction qu’en tant que citoyenne de mon pays, en tant que femme et en tant qu’écrivaine, je dois prendre ma part de responsabilité face à l’histoire. La vision que j’ai de mon pays est celle d’un État de droit et démocratique, et je suis déterminée à défendre cette vision.

LDB : Que pouvez-vous dire en guise de conclusion à notre entretien ?

GRMG : Mon combat se résume au respect de la démocratie et à son installation durable au Congo. Je crois que c’est une lutte juste et légitime.

Propos recueillis par Jean-Jacques Koubemba

 

Jean Jacques Koubemba

Légendes et crédits photo : 

Gilda Rosemonde Moutsara Gambou lors de l’interview.