Partenariat Allemagne-Afrique : l’heure de la refondation stratégiqueLundi 18 Août 2025 - 13:50 Face à Pékin, Ankara et les Émirats, Berlin doit revoir sa copie pour peser en Afrique centrale. L’Allemagne ambitionne de redéfinir sa politique africaine. Mais en Afrique centrale - du Cameroun à la RDC, en passant par le Tchad et le Gabon - Berlin semble toujours absente des grands projets stratégiques, pendant que la Chine, l’Inde ou les Émirats Arabes Unis redessinent les infrastructures, les mines et les chaînes d’approvisionnement du continent. Pourtant, les besoins sont considérables : urbanisation rapide, accès à l’énergie, digitalisation, valorisation minière. Le Cameroun, par exemple, projette plus de 6 milliards de dollars d’investissements dans ses infrastructures routières et énergétiques d’ici 2030. Or, moins de 3 % de ces projets sont attribués à des entreprises allemandes, contre près de 40 % pour des groupes chinois, selon les données du Cameroun Investment Promotion Agency. « L’Afrique centrale est un pivot géoéconomique ignoré de l’Allemagne, faute de vision intégrée et d’outils de projection stratégique », analyse le politologue Paul Djouka. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les exportations allemandes vers toute l’Afrique plafonnent à 14,2 milliards d’euros en 2024, soit à peine 1 % de ses exportations mondiales. L’essentiel est capté par l’Afrique du Sud, l’Égypte et le Maroc. En Afrique centrale, la présence allemande reste marginale, souvent cantonnée à la coopération technique via la GIZ, sans projection industrielle forte. Or, le continent évolue : les pays du Golfe financent des ports, les Turcs construisent des aéroports et la Chine contrôle déjà plus de 60 % des marchés miniers stratégiques comme le cobalt ou le lithium, cruciaux pour la transition énergétique allemande. « Le Cameroun peut offrir à l’Allemagne une position d’ancrage logistique et technologique en Afrique centrale, à condition de traiter les États africains comme des partenaires industriels, et non comme des zones de risques à éviter », estime Dr Hans Meier, consultant en géoéconomie à Francfort. Si Berlin veut redevenir compétitive, elle doit activer les leviers de l’intelligence économique : cartographie des chaînes de valeur, diplomatie commerciale active, soutien aux PME allemandes via des garanties publiques ciblées et, surtout, adaptation aux réalités locales (fiscalité, visas, accords de double imposition). L’heure n’est plus à la prudence bureaucratique, mais à une offensive coordonnée, multisectorielle et respectueuse de la souveraineté économique africaine. Le prochain sommet Allemagne-Afrique prévu pour 2026 devra clarifier cette ambition. Noël Ndong Notification:Non |