Achevé sur une finale fermée et peu séduisante, remportée par la Libye face au Ghana, ce Championnat d’Afrique des nations (Chan) laisse un goût d’inachevé : après un premier tour plutôt enthousiasmant et des quarts de finale captivants, les demi-finales et la finale ont été très décevantes. Une édition mi-figue mi-raisin qui ne doit toutefois pas remettre en question une compétition importante pour le développement du football africain
La dernière impression n’aura donc pas été la bonne : la finale de la troisième édition du Chan a été ennuyeuse, mis à part une séance de tirs au but spectaculaire. Les deux demi-finales n’ont pas été non plus des sommets de football.
Des matchs spectaculaires en poules et en quarts de finale…
Pourtant, cette édition sud-africaine a offert de beaux matchs aux spectateurs et téléspectateurs, en particulier lors de la phase de poules et en quarts de finale. Citons par exemple le quart de finale entre le Nigeria et le Maroc (4-3). La Mauritanie a offert deux matchs à rebondissement et suspens face au Burundi (3-2) et le Gabon (2-4). Malgré un dénouement déchirant pour le Congo, la prestation face à la Libye a été de bonne facture (2-2).
… mais un dernier carré décevant
Malheureusement, mais c’est la loi du sport, les équipes les plus joueuses n’ont pas forcément été récompensées. Le Nigeria, de loin la meilleure attaque (13 buts en 6 matchs), a été « privé » de finale par un Ghana qui a toujours refusé le jeu. Le Gabon, qualifié en barrages, a également montré de bonnes choses, mais s’est aussi heurté à une Libye plus solide que brillante.
Les chiffres de 2014 sont pourtant meilleurs que ceux de 2011
Les chiffres sont pourtant plutôt bons : en 2014, 73 buts ont été inscrits (59 en 24 matchs de poules, 14 lors des 8 matchs à élimination directe) contre un total de 59 buts marqués en 2011 (46 en 24 matchs de poules, 13 en 8 matchs à élimination directe). Rappelons que la première édition, en 2009, ne s’était pas jouée sur le même format (seulement deux groupes et accès direct en demi-finale), avec un bilan tout de même positif de 30 buts en 16 matchs.
En dehors des matchs des Bafana, les affluences sont décevantes
En termes d’ambiance, la tendance reste similaire à celle de la CAN : quand l’équipe locale ne joue pas, les stades sonnent creux, quel que soit le prix des places. L’élimination précoce de l’Afrique du Sud n’a donc pas aidé à encourager les affluences. En dehors des rencontres des Bafana, qui ont toujours dépassé la barre des 20 000 spectateurs (avec un pic à 35 000 face au Nigeria), peu de rencontres ont dépassé les 10 000 spectateurs, y compris lors des matchs à élimination directe. Concernant le Congo, la meilleure affluence aura été lors de la victoire face à l’Éthiopie (10 000 spectateurs). La finale ne culmine qu’à un triste total de 16 000 spectateurs.
Un meilleur joueur et un meilleur buteur de retour d’Europe
Parmi les individualités, quelques joueurs ont tiré leur épingle du jeu : désigné meilleur joueur du tournoi, le Nigérian Ejike Uzoenyi a fait bonne impression, mais n’est vraiment une révélation. Passé par le centre de formation de Rennes, sans y laisser un souvenir impérissable (2 apparitions en Ligue 1, 3 en CFA 2 entre 2012 et 2013), il était revenu au pays, à Enugu Rangers, en 2013. Même constat pour le Sud-Africain Bernard Parker, meilleur buteur du tournoi, mais déjà bien connu des recruteurs après des passages en Pologne, aux Pays-Bas et en Grèce.
Hardy Binguila parmi les meilleurs joueurs du tournoi
Chez les Diables rouges, Hardy Binguila, désigné à deux reprises meilleur joueur du match et sélectionné parmi les remplaçants de l’équipe-type, a confirmé tout le bien que l’on pensait de lui. Sinon, ce sont surtout les joueurs défensifs qui se sont illustrés : on pense bien entendu à Mohamed Abdaula, le Libyen, et Stephen Adams, le Ghanéen. Quelques éléments ont pourtant déjà profité de la visibilité du tournoi, à l’image du Léopard Jean-Marc Makusu Mundele (21 ans), recruté par le Standard de Liège après son doublé face au Burundi.
Faut-il ouvrir le Chan à tous les joueurs évoluant en Afrique ?
Cette absence de star continentale pourrait peut-être permettre de lancer un débat ; faut-il ouvrir la compétition à tous les joueurs évoluant sur le continent ? Avec des joueurs du calibre de Trésor Mputu, Déo Kanda, Fabrice Ondama ou Emmanuel Clottey qui évoluent dans des clubs africains, la compétition aurait probablement gagné en spectacle. Les détracteurs répondront qu’ils feront de l’ombre aux joueurs des championnats locaux et empêcheront l’émergence de nouveaux talents. Possible, mais pas contestable. Les joueurs locaux ont davantage de chances de se révéler durant la saison, dans leur championnat respectif et lors des compétitions continentales.
Les Fédérations demeurent les premiers acteurs du développement
Car si le Chan peut devenir une scène de visibilité pour le football local, ce sont bel et bien les Fédérations nationales qui doivent œuvrer au développement du football africain. Les difficultés financières des Fédérations sont une réalité, mais l’utilisation des aides de la Fifa, au travers des opérations « Goal » est parfois défaillante. Ce que dénonce le Tchadien Japhet Ndoram dans les colonnes de France Football : « Au Tchad, nous avons eu quatre projets Goal financés par la Fifa, et pourtant aucun terrain ou centre n’existe pour les jeunes. » Pour attirer d’éventuels sponsors, les championnats doivent être attractifs. Il faut donc parvenir à une organisation régulière de championnats homogènes, tout en mettant l’accent sur le football de jeunes, pour permettre l’éclosion des talents de demain.
Poursuivre la pérennisation du Chan pour le bien du football africain
Quoiqu’il en soit, cette compétition est bénéfique pour le football africain. Elle se doit de continuer à progresser, comme le fait sa « grande sœur », la CAN, dont le niveau, et l’exposition médiatique, a beaucoup évolué lors des vingt dernières années. Rendez-vous donc, dans deux ans, pour l’édition Rwanda 2016.