Centrafrique : la France met fin à l’opération Sangaris mais reste dans le pays

Mardi 1 Novembre 2016 - 10:30

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Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a assuré aux Centrafricains : « le retrait de la Sangaris sera compensé par une présence renforcée dans la Minusca ».

En déplacement à Bangui en Centrafrique, Jean-Yves Le Drian a mis un terme le 31 octobre à l’opération Sangaris entamée le 5 décembre 2013 par la France. L’objectif était alors d’éviter que les affrontements qui ont suivi la chute de François Bozizé ne transforment le pays en chaos. L’opération Sangaris va appuyer la Mission de soutien à la Centrafrique (Misca).

Jean-Yves le Drian dresse le bilan de l’opération Sangaris                                                                                                                

Paris se retire donc de la Centrafrique après un bilan que le ministre français a qualifié de « positif », considérant que cette force a « rempli pleinement sa mission » après sa contribution « de manière déterminante à la stabilisation du pays ». Il a rappelé la mobilisation organisée par la France auprès de la communauté internationale (Nations unies, Union européenne…) ainsi que son engagement politique et financier pour stabiliser la Centrafrique.  

Il a assuré que la France sera aux côtés des Centrafricains lors de la conférence de Bruxelles du 17 novembre prochain, pour appuyer sa stratégie de reconstruction et de développement, qui passe par « la réconciliation et la reconstruction de l’Etat, la relance des activités productives, en particulier l’agriculture, et la réponse aux besoins de base des populations que sont l’éducation, la santé, et le désenclavement ». Les missions remplies par l’opération Sangaris ont été de  « mettre fin au chaos, accompagner la montée en puissance des forces internationales et permettre la tenue d'élections démocratiques », a relevé Jean-Yves Le Drian.

Un retrait jugé prématuré par des observateurs                                                                                                                                

Devant les Parlementaires centrafricains, Jean-Yves Le Drian a déclaré : « la force Sangaris a contribué de manière déterminante à la stabilisation du pays ; elle a enrayé les cycles d’exaction de masse, de représailles, de vengeances… ». Et rassurant, il a indiqué que si une nouvelle spirale de violence l’imposait, les dispositifs français présents au Gabon et au Tchad pourraient être dépêchés. La France, a-t-il ajouté, maintiendra sa contribution à la restructuration des Forces armées centrafricaines (Faca) sous le contrôle des forces de l’Union européenne de l’EUTM. Ce retrait « ne signifie pas la fin des relations militaires entre la France et la Centrafrique », l’armée française restera « certes moins visible mais présente, active et vigilante », a souligné le ministre.   

Du nom d’un papillon, Sangaris, l’opération a été lancée en décembre 2013 en vue de mettre fin à une escalade de violences entre des communautés ; plus de 2000 hommes ont pu été mobilisés au plus fort de la crise. Depuis juin dernier, les effectifs ont été ramenés à 350 soldats. Il passera à 300 hommes d’ici début 2017. Le relais est pris par 12 500 Casques bleus de la Minusca, avec l’appui de l'Union euroépenne.

Une présence qui n’aura pas tout résolu                                                                                                                                               

Au moment où Jean-Yves Le Drian annonçait le retrait de Sangaris, on apprenait la mort d’au moins 4 personnes, après les 25 victimes du 28 octobre à Bambari, au nord-est de Bangui. La veille, plusieurs groupes d’auto-défense s’affrontaient au PK5 à Bangui, faisant une dizaine de morts, selon la Minusca. 

De fait, le pays est toujours contrôlé de l’intérieur par des groupes ethno-religio-politiques. Paris a prétendu rétablir la paix dans ce pays plus vaste que la France avec 1600 hommes et en concentrant ses effectifs autour de l’aéroport international. Mais à entendre les Centrafricains, le pays est coupé en deux, voire en trois. Entre le sud, le nord et Bangui. 

Pour le Général Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris) à Paris, la mission de l’opération Sangaris consistait à « assister l’Etat et les forces centrafricaines dans le maintien de la paix ». Pour lui, la France a réussi cette partie de sa mission, à condition que le président Faustin Archange Touadéra parvienne à maintenir la paix dans le pays. « on pourra dire dans quelques semaines, dans quelques mois si c’est une vraie réussite ou un véritable échec », a-t-il déclaré rappelant néanmoins quelques accusations de viols de mineurs portées contre certains soldats français. Ces accusations ont laissé des traces mais il fait une différence entre  l’opération Sangaris  qui prend fin et la présence prolongée du même effectif militaire.  

Sangaris « étant quelque chose qui avait un nom, une autorisation du gouvernement [de Centrafrique], un fonctionnement avec une montée en puissance et une descente en puissance ». Attentiste, le Général Jean-Vincent Brisset attend maintenant de « voir ce qui va se passer, entre la situation de maintenant, c’est-à-dire un pays divisé, et le pari du président français François Hollande quand il a lancé l’opération ». Selon lui, si les combats reprennent, la France ne sera certainement plus en mesure, politiquement, d’y envoyer à nouveau des troupes. Et si les actions recommencent, il est en faveur d’ « une réaction plus forte ».

Ainsi, l’opération Sangaris a passé le relais à la Mission des Nations unies dont la mission est la protection des populations civiles, avec pour rôle l’appui au rétablissement de la sécurité et de la souveraineté, par les autorités centrafricaines. 

Noël Ndong

Légendes et crédits photo : 

"Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian et le président de la République centrafricaine Faustin-Archange Touadera à la base militaire de Mpoko à Bangui le 31 octobre 2016".

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