Centrafrique : quand le pape viendra

Jeudi 26 Novembre 2015 - 17:30

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Heureux ceux qui reçoivent le Saint-Père chez eux ; bénis ceux qui en profitent pour implorer Dieu de leur venir en aide, pourrait-on lancer au peuple de Centrafrique à quelques jours de l’arrivée du pape François dans leur pays. Il n’est pas besoin de deviner qu’à l’occasion de cette visite sur laquelle pèseront jusqu'au dernier moment bien d'appréhensions sécuritaires à même de la faire foirer, le chef de l’Eglise catholique adressera à la foule bigarrée qui l’accueillera le message de paix et de réconciliation. Les Centrafricains en feront-ils une clé pour leur ouvrir les portes de la concorde nationale avant l’échéance cruciale des élections de fin d’année ?

Nous l’avons écrit ici-même à plusieurs reprises : il n’y a que les Centrafricains, et eux seuls, pour rendre la dignité, la paix et la tranquillité à leur Nation meurtrie. Les pays amis qui leur viennent en aide, la communauté internationale qui se dépense tant depuis des années à travers le déploiement de nombreuses missions d’interposition ou d’accompagnement des « transitions » ne parviendront à aucun résultat tangible si les filles et les fils de ce pays, dont certains se sont mués en Séléka ou en Anti-balaka, ne décideront pas d’enterrer définitivement la hache de guerre.

En cinquante-cinq ans d’indépendance, comme la plupart de ses voisins, la Centrafrique a connu son lot de pronunciamientos, de désordres qui accompagnent des alternances chaotiques, de morts, de blessés, de sans-abri, de déplacés et d’exilés volontaires ou forcés. Elle a aussi connu des moments de répit, certes brefs, mais qui firent croire à ses habitants qu’ils pouvaient s’attendre à un mieux vivre, au progrès et à la prospérité. Chaque fois s’intercalaient, malheureusement, de longues périodes d’incertitude qui l’ont menacée d’implosion. Si, en dépit des soubresauts, ce pays garde la tête hors de l’eau, ses institutions de transition tiennent et sont reconnues par le concert des Nations, c’est qu’il y a espoir que la Centrafrique sortira de ces épreuves grandie.

Il restera à considérer la partition que chacun de ceux qui aspirent à diriger le pays de Barthelémy Boganda jouera dans un avenir proche. Le 27 décembre prochain est la date retenue pour l’élection présidentielle et les élections législatives censées mettre fin à une transition qui s’étire en longueur pour diverses raisons. Aussitôt cette échéance annoncée, les candidatures à la fonction suprême se sont amoncelées. A ce jour, vingt-sept personnalités ont confectionné leur dossier dans le but de solliciter les suffrages de leurs compatriotes. Autant dire que sur ce plan aussi, la Centrafrique n’échappe pas à la règle car sur le continent, le nombre de candidats-présidents a le plus souvent dépassé la moyenne de dix. Ceci quel que soit l’état de déliquescence dans lequel se trouve le pays concerné, quel que soit aussi le volume du tiroir-caisse public.

Pour ceux qui observent de près la situation en Centrafrique, les défis ne se posent pas seulement en termes de trésorerie. On a en effet vu des pays moins fournis en ressources du sol et du sous-sol prospérer sur l’expertise et le génie de leurs habitants, l’audace de leurs cadres et la vision de leurs dirigeants. Les défis centrafricains sont aussi d’ordre sécuritaire parce qu’à l’heure qu’il est, les forces armées, de police et de gendarmerie, en hibernation, ne sont pas un relai sur lequel les institutions issues des futures élections pourront compter pour restaurer l’autorité de l’Etat. Sans cette autorité, les mécanismes de retour à la vie normale qui impliquent dans un tout-cohérent le rétablissement de l’administration, de la justice, la relance de l’école et des programmes de santé sur l’ensemble du territoire centrafricain, seront difficiles à mettre en œuvre.

À côté des problèmes régaliens de rétablissement de l’autorité de l’Etat, les Centrafricains devront songer à un sursaut essentiel : réapprendre à vivre ensemble comme ils l’avaient toujours fait au tout début de la naissance de leur Etat, sans denier aux uns et aux autres leurs appartenances ethniques ou tribales, leurs croyances religieuses, leurs attachements ancestraux. La réconciliation dont leur parlera assurément le pape François durant son séjour à Bangui s’en trouvera renforcée s’ils éloignent le repli communautariste à l’exacerbation duquel, nombreux de leurs compatriotes ont payé de leur vie. Peuple en quête de paix, Nation en quête de renaissance, amis Centrafricains, jeter vos armes ! Le Saint-Père arrive !

 

 

Gankama N'Siah

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