Littérature : Jean Bofane fait voyager sa plume entre Kinshasa et Haïti

Lundi 25 Novembre 2019 - 12:15

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Dans son prochain roman, pour lequel il a entamé une résidence d’écriture cette semaine, l'écrivain congolais a choisi de parler d’esclavage et de libération en promenant son personnage entre l’Afrique et l’Amérique du Nord, à travers des lieux qui, à ses yeux, comportent de réelles similitudes.

Jean Bofane (Photo Adiac)« Je suis en train de préparer un nouveau roman qui parle d’esclavage et de libération et dont la moitié de l’histoire se déroulera à Kinshasa et l’autre à Haïti », a confié au Courrier de Kinshasa, le 20 novembre, à Bruxelles In Koli Jean Bofane. L’auteur de La Belle de Casa semble s’être entiché de la région maghrébine. En effet, après son dernier roman qui avait pour cadre le Maroc, il a cette fois choisi de se rendre dans le désert algérien d’où il va réaliser « une résidence d’écriture de douze à treize jours », nous a-t-il dit. Depuis le 23 novembre donc, il s’y est rendu pour écrire « l’histoire d’un écrivain congolais qui cherche à savoir comment les Kongo se sont libérés à Haïti ».

Le personnage que l’on va découvrir dans le prochain roman va entreprendre ce voyage « parce que la majorité des guerriers de Toussaint Louverture à Haïti étaient des Kongo issus du royaume Kongo. C’est grâce à eux qu’a pu se produire la libération d’Haïti », explique Bofane. Et d’ajouter : « Nous avons été partout et nous avons fait des choses partout. Donc, à travers ce roman, je vais rappeler aux gens, rappeler peut-être aux Haïtiens qu’ils sont aussi Kongo. Par ailleurs, la souffrance d’Haïti au niveau politique, c’est un peu la même chose que chez nous. Un coup cela semble aller, puis cela ne va plus. Cela semble de nouveau aller, par la suite cela ne va de nouveau plus : un éternel recommencement. Je trouve beaucoup de similitudes entre ces deux terres ».

Par ailleurs, Jean Bofane soutient qu’il a en vue de « chercher l’état d’esprit de la libération ». Et de ce point de vue, « l’on ne va pas seulement parler de la libération de l’esclavage des peuples et des nations mais aussi des libérations personnelles : les lassitudes, les addictions, tout ce qui nous enchaîne », affirme-t-il. Et, au Courrier de Kinshasa qui lui a demandé s’il ne s’identifiait pas lui-même au personnage, il a tout de suite répondu par la négative. Il a même avancé : « Dès le début quand vous le lirez, vous verrez que ce gars-là, ce n’est vraiment pas moi. J’ai bien fait exprès de le placer de sorte que l’on voit bien que ce n’est pas Bofane. Il ne me ressemble pas physiquement, psychologiquement non plus. C’est un sale type », a-t-il affirmé dans un grand rire.

Hanté par le Congo

Avec ce personnage congolais au cœur de l’histoire, In Koli Jean Bofane montre encore une fois qu’il est resté très attaché à son Congo natal. Il ne l’a pas seulement dans l’âme mais bien plus encore dans la peau. Il ne s’en cache pas et le clame : « Je cherche les solutions du Congo. J’y vais par des pistes de réflexion. Le Congo me hante comme il hante le personnage ». L’auteur reconnaît sur ce point avoir tout de même un point de similitude avec lui. « De ce côté-là , il me ressemble fort. C’est parce que le Congo me hante que j’écris tous ces livres. C’est le Congo qui me motive à chaque fois », souligne Jean Bofane. Il rappelle ici que plus récemment encore dans La Belle de Casa, il n’avait pas manqué de placer un Congolais dans le décor. « Même le dernier roman que j’ai écrit, l’histoire se passe au Maroc, mais il y a un Congolais. Je parle de Mobutu. Dans le roman tous sont Marocains mais il y a tout de même un Congolais. C’est pour dire que ce qui importe pour moi, c’est le Congo, le Congo, le Congo », martèle l’auteur avec énergie.

Et, cet amour que Bofane porte pour sa mère patrie transparaît encore mieux quand on l’entend dire  : « Mon rêve pour le Congo, ce serait carrément abolir le suffrage universel. J’ai trouvé d’autres moyens d’appliquer la démocratie. Je pense que les mécanismes de démocratie sont arrivés au bout. Peut-être que l’Afrique devrait penser à faire les choses autrement, penser à autre chose. Mon rêve n’est pas seulement pour le Congo, il est aussi pour l’Afrique. Il faudrait qu’elle pense à une autre manière de choisir ses dirigeants ». Et de renchérir : « Mais encore, la souveraineté n’est pas seulement économique, nationale, c’est aussi nos idées. Et je crois que les idées priment, c’est tout. Car avec elles l’on peut faire tout le reste ».

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo : Jean Bofane / Adiac

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