Médias et communication : le Tchad dévoile ses ambitions panafricaines

Samedi 7 Février 2015 - 14:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Dans quelques mois, N’Djamena, la capitale tchadienne, deviendra-t-elle le point de mire de l’activité médiatique en Afrique ? La question mérite en effet d’être posée au regard de l’ambition que nourrit le Tchad, à travers son projet de création d’un Centre africain  des technologies de l’information (CATI). Les travaux de construction du siège de l’institution avaient été lancés au mois de septembre dernier par le président Idriss Deby Itno.

D’après le ministre tchadien de la Communication, Hassan Sylla Bakari, qui s’exprimait le 2 février lors d’une communication à N’Djamena devant les journalistes venus participer au forum africain des éditeurs, ce projet vise à doter l’Afrique, d’une radio et d’une télévision panafricaines répondant à la volonté d’indépendance du continent dans le domaine du traitement et de la diffusion de l’information.

Le constat fait par tout le monde, soulignait le ministre tchadien, est que bien souvent les puissants médias internationaux sont très sélectifs lorsqu’ils traitent l’actualité africaine. Il a cité en passant l’exemple du conflit au nord du Mali où, d’après lui, les informations venues du front tenu par les troupes tchadiennes en butte aux islamistes n’étaient pas toujours exploitées comme il se doit sur les chaînes d’information étrangères. Il a notamment rappelé l’annonce en « demi-teinte » par les médias occidentaux de la mort d’un des chefs des islamistes d’Al Qaida, Abou Zeid, tombé sous les balles du contingent tchadien. Lorsqu’il sera opérationnel, le CATI qui aspire corriger de tels déséquilibres promet de faire appel aux compétences essentiellement continentales (quelque 4000 agents) avec des équipes installées dans différents pays. « Comme les Arabes qui ont réussi le pari avec Al Jazzera, les Africains peuvent aussi compter sur la Radio et télévision panafricaine », renchérissait le ministre Sylla.

60 milliards FCFA pour une presse africaine libre et moderne 

Durant le forum africain des éditeurs, tenu du 2 au 4 février sur le thème « Les médias et les crises en Afrique : épidémies et insécurité », les autorités tchadiennes, dont le Premier ministre, Kalzeube Päyimi Deubet, répétaient leur détermination de voir émerger « une presse africaine libre et moderne ». Le Centre en projet répond sans doute à cette vision qui attend d’être concrétisée dans la forme et dans le fond. Le critère de forme est l’achèvement de l’immeuble en construction pour lequel l’État tchadien, soutenu dans ce projet par l’Union africaine, déboursera 60 milliards FCFA. Le critère de fond sera celui d’accorder aux professionnels de la future radio-télévision panafricaine et à tous les autres, sur place, les moyens juridiques d’exercer librement leur métier.  L’exemple pourrait alors faire tache d’huile.

L'autre front...

Présent sur un autre front, plus bruyant, celui de son engagement contre Boko Haram, après les campagnes de Centrafrique et du Mali, le Tchad est sans doute en train de peaufiner son étoffe de puissance militaire sous-régionale.  Si l’on doit noter qu’en Centrafrique, et aujourd’hui au Cameroun, au Nigeria et au Niger, N’Djamena vise avant tout à éloigner ou endiguer la menace terroriste à ses frontières, ces efforts lui confèrent par ailleurs un prestige certain au plan extérieur.

Mais, c’est à peu près en complément de sa réussite militaire que le Tchad investit à présent dans la radio-télévision panafricaine. Le temps de faire des deux chantiers des outils de puissance et de développement dans un monde en proie aux troubles de tous genres où expliquer ce que l’on fait et pourquoi on le fait rime presque désormais avec modernité.
 

Gankama N'Siah