Numéro spécial Francophonie : Du passeport francophone au pacte de solidarité, un futur partagé

Samedi 15 Novembre 2014 - 17:45

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La dynamique de l’OIF se situe bien au-delà de ses formes d’institutionnalisation, soumise aux épreuves concrètes du contexte de surdétermination qui est le sien. Les prétentions de l’organisation n’en restent pas moins fondées sur un certain nombre de valeurs humanistes de respect, d’égalité, de dignité et de progrès. La circularité des idées et des personnes en procèdent nécessairement, dans ce vaste ensemble de 77 pays dont la complexité des interactions doit être prise en compte. Dure réalité des relations internationales qu’il faut nous résoudre à transcender dans la perspective d’un pacte de solidarité francophone, premier jalon d’une intégration effective et matérielle des hommes et de leurs projets

Germain-Hervé Mbia-Yebega Hypothétique passeport francophone

L’Alliance francophone a animé un atelier le 17 octobre 2014 à Metz en Moselle (lors des Assises internationales du journalisme), intitulé « 800 millions de francophones en 2050, quelle offre éditoriale pour ces futurs publics ? »

La question récurrente d’obtention de visas d’entrée en France ne nous a pas permis d’atteindre certains objectifs escomptés, nombre de consulats généraux français dans les pays de résidence des personnalités invitées faisant même valoir des pannes d’imprimantes à visas à titre d’argument explicatif de la non-délivrance des précieux sésames.

Le scandale est à la hauteur des humiliations vécues par nos amis et frères d’Afrique, et nous-mêmes, nous renvoyant aux exigences essentielles du projet communautaire que nous envisageons de bâtir. De quelle communauté parlons-nous lorsque des dispositions restrictives sont conçues et mises en application quotidiennement par les membres d’une même organisation ? Les forteresses qui s’édifient sans cesse sont d’abord celles des manières de penser, puis celles des manières d’agir. Ce qui contrevient fondamentalement à ce qui fait sens premier, cet idéal senghorien de la civilisation de l’universel au cœur des préoccupations ayant porté l’OIF sur les fonts baptismaux.

L’Alliance francophone n’a cessé de faire sienne cette préoccupation de la création d’un passeport francophone, depuis une vingtaine d’années, comme le rappelait son président, Jean Guion, lors de son intervention d’ouverture à l’atelier de Metz. Sans en minimiser pour autant les lourdeurs, pesanteurs et peurs insidieuses d’une configuration des relations internationales plutôt craintive que volontariste.

L’institution du pacte de solidarité francophone

Un partenariat se vit donc de l’intérieur. Le refus d’accorder des visas par des pays du Nord à des participants originaires, en premier lieu de pays africains, et invités officiellement à des manifestations francophones porte atteinte à la crédibilité du partenariat francophone. De telles décisions à caractère discriminatoire portent gravement atteinte aux principes de la Francophonie, alors que les partenaires du Sud font preuve sans relâche d’un comportement ouvert et participatif lorsque de telles manifestations sont organisées dans leurs pays.

C’est pourquoi l’Alliance francophone propose l’instauration d’un pacte de solidarité qui concerne l’ensemble des acteurs publics et privés de la Francophonie. Ce pacte est destiné à faciliter les déplacements de personnes francophones dans le cadre de manifestations officielles francophones et à l’intérieur de l’espace francophone. Il répondrait ainsi à un souci d’équité s’articulant de la manière suivante : tout participant invité à une manifestation officielle organisée dans un État membre de la Francophonie présente aux autorités compétentes le dossier requis en vue de l’obtention d’un visa. Ce dossier fera l’objet d’un traitement circonstancié sur la base de la lettre d’invitation et du programme annexé qui précisera le domaine couvert par la Francophonie ; si un nombre conséquent de participants, soit un tiers de l’ensemble des participants invités, n’est pas en mesure de prendre part à la manifestation francophone à la suite de refus de délivrance de visas, les organisateurs seront en droit d’annuler la tenue de la manifestation programmée. Ces deux paragraphes devront figurer dans la lettre d’invitation et également dans tout contrat de partenariat.

Cette approche ne peut être menée à bonne fin sans le soutien actif de l’OIF. En effet, la Francophonie est arrivée à un point de non-retour : sa légitimité dépend plus que jamais de l’adhésion de tous les acteurs francophones publics et privés à ses objectifs et à ses valeurs dans le cadre d’un partenariat partagé et équilibré.

Germain-Hervé Mbia-Yebega est politologue, chercheur associé au Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité et à la Fondation Paul-Ango-Ela de géopolitique en Afrique centrale, administrateur de l’Alliance francophone

Germain-Hervé Mbia-Yebega