Onec/RDC : la commission spéciale d’agrément veut organiser une prestation de serment irrégulière

Samedi 10 Décembre 2016 - 16:55

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 112%

Version imprimable

La tension ne s’apaise pas au sein de l’Ordre nationale des experts-comptables de la RDC (Onec). Des experts comptables exerçant la profession depuis une décennie n’ont pas été agréés dans l’Ordre, alors que certaines personnes concernées par les incompatibilités ont été admises dans l’ordre par la commission spéciale d’agrément. Et celle-ci compte organiser une prestation de serment des premiers membres de l’Ordre au mépris de la loi et de la Constitution. Les personnes lésées dans ce dossier s’opposent farouchement à cette méprise.

L’article 39 de la loi n°015/002 du 12 février 2015 portant création et organisation de l’Onec est stipulé : « Toute personne admise à l’Ordre prête, devant la Cour d’appel du ressort, le serment suivant : Je jure obéissance à la Constitution et aux lois de la République démocratique du Congo de remplir fidèlement et loyalement les missions qui me sont confiées en qualité d’expert-comptable de l’Ordre national des experts comptables ».

Ainsi, seul l’expert-comptable admis dans l’Ordre est qualifié à prêter ce serment. La loi précitée fixe les modes de l’exercice de l’expertise comptable. Elle s’exerce de façon libérale, suivant trois types selon l’article 45 de la même loi. Premièrement, elle est pratiquée de manière indépendante à titre individuel, deuxièmement, en qualité de salarié d’un expert-comptable indépendant ou d’une société d’expertise comptable, et troisièmement, en tant que société d’expertise  comptable. La profession étant libérale, la loi fixe des incompatibilités. L’article 53 mentionne que l’expert-comptable ne peut être salarié dans une entité autre que la société d’expertise comptable, ne peut exercer les activités commerciales, exercer une charge d’officier public ou ministérielle ou tout emploi salarié dans la Fonction publique, exercer des activités incompatibles avec la dignité de la profession libérale, exercer une profession libérale que celle d’expert-comptable, exercer le mandat d’administrateur dans une entreprise dans laquelle il est expert-comptable.

On a appris que sur les 310 experts-comptables retenus comme premiers membres de l’Onec de la RDC, près de 60% d’entre eux n’exerçant pas la profession de manière libérale comme l’exige l’article 45 de la loi sur l’Onec. Et selon l’article 53, ils sont frappés par les incompatibilités. La liste, établie par la commission spéciale d’agrément dans le cadre de leur mission, comprend des salariés qui sont dans des sociétés commerciales, dans la Fonction publique et dans autres structures de l’État, notamment le Conseil permanent de la comptabilité au Congo (CPCC) et Conseil supérieur du portefeuille, l’Inspection générale des finances (IGF). Cette liste reprend pour le compte du CPCC les noms de Foko Tomena, secrétaire général du CPCC, Lusilao Lungela, Loko Tuzolana, Ntumba Mputu (directeur général du CPCC). La liste reprend pour l’IGF les noms de Miyakudi Mayiza, Luvuezo Bikindu, Nkanka Bokanga. Pour les sociétés commerciales, il y a Foko Dikila, fils de Foko Tomena, vice-président de la commission spéciale assumant l’intérim du président, et agent à la banque commerciale Standard Bank, Mataka Bilanga, agent démissionnaire de la société Airtel RDC deux mois auparavant.

Les membres de la Commission spéciale ayant à sa tête André Foko Tomena comptaient organiser le 2 décembre la prestation de serment avec les experts comptables frappés par les incompatibilités. Cela n’a pas eu lieu du fait de l’opposition déposée à la Cour d’appel de Gombe/Kinshasa par 29 impétrants n’étant pas retenus comme experts-comptables malgré leur expérience dans la profession et par l’arrestation pendant 26 heures de Foko Tomena André au Parquet de Kinshasa/Gombe pour refus de répondre au mandat de comparution qui lui a été lancé à trois reprises dans le cadre du dossier d’un réviseur comptable non retenu comme expert-comptable en dépit de son expérience de plus 10 ans dans la profession comptable. « En organisant la cérémonie de prestation de serment, il y a de poser la question de savoir quel sera les mots utilisés au moment de la prestation par les personnes incompatibles, car le libellé du serment prévu par la loi est clair (comme indiqué plus haut). Les personnes frappées par l’incompatibilité et n’exerçant par la profession conformément à l’article 45 de la loi auraient automatiquement été en violation de la Constitution et aux lois de la République. Ils seraient devenus experts comptables en violation de l’article 45 du fait de ne pas exercer la profession de manière libérale. Et l’article 53 serait également violé parce qu’ils sont des salariés, soit dans des entreprises, soit dans des structure de l’État, soit dans la Fonction publique », renseigne-t-on.

Bradage de la profession d'expert-comptable...

En admettant que ces personnes n’exercent pas la profession selon l’article 45 et frappées par les incompatibilités selon l’article 53, les membres de la commission spéciale violent les dispositions de l’Arrêté ministériel n°016/CAB/MIN/FINANCES/2015 du 22 mai 2015 portant organisation et fonctionnement de la commission spéciale chargée d’agréer les premiers membres de l’Ordre national des experts comptables en son article 27 du fait qu’ils viennent de poser un acte qui porte atteinte aux activités et à l’honorabilité de la Commission spéciale. Ils violent aussi l’article 29.1 qui interdit de nuire la dignité et la qualité de membre de la commission spéciale. L’acte posé vient de nuire la qualité et la dignité des membres de la commission spéciale et brade la profession.

La justice s’est donc saisie du dossier afin de rétablir les plaignants dans leur droit, et également initier un travail de la revue de l’ensemble des dossiers déposés en vue de s’assurer de l’analyse régulière. Cela, en vue de corriger les irrégularités occasionnées par l’admission des incompatibles. C’est d’autant important que l’expert-comptable est l’un des piliers de l’économie nationale à travers sa mission de certification des comptes. « Si au départ, on arrive à avoir des incompatibles comme experts-comptables, cela posera un souci dans le recrutement des commissaires aux comptes », fait-on observer. Et les membres de la commission spéciale doivent répondre de leurs actes, cette structure se comporte comme n’ayant aucun compte à rendre, a tempêté un expert-comptable non agréé.

Martin Enyimo

Notification: 

Non