Centrafrique : de nombreux défis pour le nouveau Premier ministre

Lundi 11 Août 2014 - 11:00

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Mahamat Kamoun, le nouveau Premier ministre désigné le 10 août par la présidente de transition, Catherine Samba-Panza, aura pour mission de relancer la transition politique dans son pays en proie aux violences entre milices rivales.

Concrètement, le nouveau Premier ministre qui remplace André Nzapayéké, démissionnaire, et dirigera la transition centrafricaine aura une tâ che ardue en gérant le pays aux côtés de Catherine Samba Panza jusqu’à l’organisation des élections devant marquer la fin de la transition. Il devra, après la formation de l'équipe gouvernementale dans les jours qui suivent, faire de son mieux, de concert avec la présidente, pour satisfaire les attentes du peuple concernant des questions prioritaires que sont : l’unité nationale, la sécurité, le retour à la vie normale dans toutes les régions. Toutes ces préoccupations passent inéluctablement par la mise en œuvre de l’accord de fin des hostilités signé à Brazzaville entre les protagonistes de la crise centrafricaine, dont l’ex-Séléka, à prédominance musulmane et les anti-Balaka, milices majoritairement chrétiennes. Or, il se trouve que ces accords sont violés tous les jours par les belligérants qui s’accusent mutuellement de ne pas les appliquer.

Pas plus longtemps que la semaine dernière, les affrontements ont opposé la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca) sous mandat africain et la force française Sangaris à la Séléka, causant une soixantaine de morts du côté de l’ex rébellion.

L’un des principaux enjeux dans la formation du prochain gouvernement réside dans le fait que Mahamat Kamoun doit faire en sorte que les groupes armés, anti-Balaka et Séléka, soient représentés au sein de cette équipe gouvernementale. Une question qui fait polémique et fait couler beaucoup d’encre dans le pays ainsi qu’au plan régional et international.

La désignation de Mahamat Kamoun, un musulman, au poste de Premier ministre est une première en Centrafrique depuis l’indépendance de cette ancienne colonie française. Ce nouveau chef du gouvernement occupait précédemment les fonctions de conseiller spécial de l’ancien président François Bozizé (au pouvoir de 2003 à mars 2013). Spécialiste des finances, il a été directeur général du Trésor sous sa présidence. Avant d’être désigné en qualité de Premier ministre, Mahamat Kamoun, 53 ans, était un proche collaborateur de Michel Djotodia, ancien chef des rebelles Séléka qui était arrivé au pouvoir après avoir chassé François Bozizé. Mahamat Kamoun assumait les responsabilités de ministre d’État, conseiller spécial de Catherine Samba-Panza. Il se doit de mettre son expérience politique à profit, avec le soutien de l’actuelle présidente centrafricaine pour arrêter la démence des groupes armés et travailler pour redonner l’espoir à la reprise de l’économie nationale.

Mahamat Kamoun entend se poser en rassembleur

Même s’il est de confession musulmane, le nouveau Premier ministre entend se poser en rassembleur du peuple centrafricain divisé par une guerre fratricide et sanglante. « Le critère confessionnel, a-t-il dit aussitôt après sa désignation, a joué un rôle mineur dans ma nomination contrairement à ce que les uns et les autres peuvent penser. Je me pose comme un homme d’État, un homme ouvert, rassembleur et donc la réconciliation fait partie des actions que le gouvernement de transition est appelé à mettre en œuvre en cette période difficile de notre pays. Avec tous les Centrafricains, le gouvernement et la communauté internationale, nous allons œuvrer dans ce sens »

Et d’ajouter : « Les anti-balaka, les Seleka, les Centrafricains nous connaissent. Ils savent de quoi nous sommes capables. Je vais les engager à des résultats sur les accords qui ont été signés lors du Forum de Brazzaville. Ces deux entités ont démontré aux yeux du monde entier qu’elles étaient pour la paix et qu’elles étaient prêtes à déposer les armes pour se consacrer à la reconstruction nationale. Donc nous avons confiance aux responsables de ces deux entités pour nous soutenir dans cette œuvre difficile de reconstruction de notre pays.»

Pour de nombreux observateurs, la désignation de Mahamat Kamoun est la preuve que la présidente de transition a usé effectivement de son indépendance vis-à-vis de la communauté internationale puisque le nouveau chef du gouvernement n’était pas le candidat favori de la communauté internationale. C’est dire que le Premier ministre désigné qui, selon certains Centrafricains, ne fait pas l’unanimité de la classe politique, devra aussi avoir comme urgence dans son action de convaincre la communauté internationale qui finance intégralement l’administration du pays. À cela s’ajoute la nécessité de faire face à la situation humanitaire puisque des milliers de déplacés, vivant dans les camps, sont toujours en proie à la malnutrition et à l’insécurité.

Le 23 juillet dernier, lors du forum inter-centrafricain de Brazzaville, les protagonistes de la crise centrafricaine, dont les ex-Séléka et les anti-Balaka avaient signé un accord de cessation des hostilités grâce à la médiation des autorités congolaises. Le texte était signé pour l’ex-coalition musulmane par Mohamed Moussa Dhaffane et pour les anti-balaka par Patrice Ngaïssona.

Dans ce texte, les signataires s’étaient aussi engagés à cantonner leurs hommes dans un délai raisonnable et donnaient libre cour à l’État d’avoir accès à l’ensemble du pays. Il s’agissait notamment d’en finir avec les barrages érigés de part et d’autre du territoire national, mais aussi de mettre un terme aux administrations parallèles faisant obstacle au rétablissement de l’autorité de l’État partout. 

Le Premier ministre sortant, André Nzapayéké, et son gouvernement composé essentiellement de technocrates avaient démissionné à la demande de la présidente de transition, qui a mené de sérieuses consultations sur la situation dans son pays.

La présidente de transition dirige le pays depuis le début de cette année en remplacement de Michel Djotodia, un ex-Séléka écarté de la présidence centrafricaine par les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Cééac), dont la Centrafrique fait partie.

 

Nestor N'Gampoula