COP 21. Guillaume Sainteny: “Le changement climatique est aussi la conséquence des autres problèmes environnementaux”

Lundi 23 Novembre 2015 - 15:30

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Guillaume Sainteny est président de GS conseil ainsi qu’enseignant à AgroParisTech. Il était l’un des intervants à la rencontre-débat sur le thème “La lutte contre le changement climatique doit-il être l’essentiel du développment durable”, organisée le 17 novembre à Paris par le Comité 21.

Les Dépêches de Brazzaville : Vous venez de publier l’ouvrage « Le climat qui cache la forêt » Pourriez-vous nous en faire l’économie ?

Guillaume Sainteny : Le livre a pour objectif de rappeler que le changement climatique est un enjeu extrêmement important, mais que parmi les différents problèmes d’environnement qui se posent, il n’est pas le seul. D’autres enjeux sont importants, notamment l’accès à l’eau, dans sa qualité et dans sa quantité; la préservation de la biodiversité qui disparaît malheureusement à une vitesse très rapide; la pollution atmosphérique, la dégradation des sols ainsi que l’épuisement de certaines ressources naturelles très utiles pour l’homme comme les stocks halieutiques et les ressources génétiques dont on peut tirer des médicaments.

LDB : Tous les éléments que vous citez ne sont-ils pas liés au changement climatique ?

GS : Pas complètement. Le changement climatique peut avoir des effets dommageables sur la biodiversité, la sécheresse ou sur l’eau, mais beaucoup de ces problèmes environnementaux sont causés par autre chose que le changement climatique. Par exemple la surexploitation des ressources naturelles et de la biodiversité sont causées par l’action de l’homme qui exploite au delà de ce qu’il faudrait le taux de reproduction de ces espaces naturelles ou de ces espèces. Bien plus, l’homme rend artificiel ces espèces ou pollue ces milieux par d’autres polluants qui ne sont pas les gaz à effet de serre. Par ailleurs, l’érosion de la biodiversité, la déforestation tropicale, le retournement des prairies, les zones humides contribuent pour 20 à 25 % aux émissions des gaz à effet de serre. Donc, le changement climatique n’est pas seulement une cause des autres questions d’environnement, il en est aussi la conséquence.

LDB : Les problèmes environnementaux que vous citez se posent-ils au même niveau en Afrique et ailleurs dans le monde ?

GS : C’est une question difficile car, comme vous le savez, les pays africains sont eux-mêmes très différents. Ce sont des pays qui émettent peu de gaz à effet de serre aujourd’hui. En revanche, l’Afrique est un très grand réservoir de biodiversité. C’est un des coins du monde où la biodiversité est la mieux préservée. Puisqu’ils émettent peu de gaz à effet de serre, il existe deux types de politique climatique : des politiques d’atténuation de production de gaz à effet de serre et des politiques d’adaptation au changement climatique. Ces dernières sont nécessaires de toute façon puisque l’on s’achemine vers un changement climatique quelles que soient les causes, l’ampleur et la dimension. Dans les pays qui sont les petits émetteurs de gaz à effet de serre, les politiques d’adaptation sont plus importantes que les politiques d’atténuation. Par ailleurs, comme certains pays d’Afrique ont en ce moment des taux de croissance assez importants notamment en Afrique australe et dans certains pays de l’Afrique de l’Ouest, leur pourcentage dans les émissions de gaz à effet de serre va augmenter. Ils vont devenir davantage émetteurs et leur responsabilité sera plus importante. Mais dans ces pays, les populations les plus pauvres, contrairement à l’Europe, sont beaucoup plus dépendantes des produits de la biodiversité, avec la pêche, le bois, les autres produits de la nature, etc. Donc, l’amenuisement de la biodiversité peut leur être davantage nuisible que le changement climatique.

LDB : Au regard de ces problèmes, quelles sont les pistes de solution que vous proposez ?

GS : Les pays faiblement émetteurs devraient privilégier les politiques d’adaptation plutôt que celles de l’atténuation. Il faudrait également faciliter les transferts de technologie quand c’est possible. C’est aussi que ces pays n’attendent pas tout de l’extérieur et qu’ils s’attaquent sérieusement aux subventions et aux énergies fossiles qui sont très développées dans des pays comme le Nigeria, l’Égypte et d’une manière générale dans les pays qui sont producteurs de pétrole.

LDB : Êtes-vous optimiste sur l’issue de la COP21 ?

GS : Il y aura sûrement un accord. Mais il reste à savoir quelle sera sa dimension et de quelle manière il sera contraignant. Néanmoins, il faut noter qu’après la COP21 se tiendra la COP22 l’année prochaine au Maroc. Pour la première fois un pays africain organisera une COP. Le continent africain sera ainsi au devant de la scène puisqu’il devra montrer les solutions et le savoir qu’il est prêt à mettre en place pour les années à venir.

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

Guillaume Sainteny

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