Dialogue politique : l’opposition a du mal à se déterminer

Jeudi 4 Décembre 2014 - 15:00

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L’UNC de Vital Kamerhe vient de lancer une opération de boycott de ce forum si jamais il était convoqué et s’évertue désormais à convaincre ses alliés politiques à lui emboîter le pas.

La question de la convocation du dialogue entre les différentes sensibilités politiques selon l’esprit et la lettre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba revient sur la sellette. C’est le président de l’Union pour la Nation (UNC), Vital Kamerhe qui vient de la remettre sur le tapis à la faveur d’une récente intervention médiatique. Alors qu’il y a peu, l’ex-speaker de la chambre basse faisait de ce dialogue une fixation à la limite de l’obsession sur fond d’un activisme outré, d’aucuns s’étonnent qu’il juge à présent la convocation desdites assises inutile et sans objet. Le leader de l’UNC n’est plus disposé à dialoguer avec le pouvoir estimant que le temps restant ne pourrait permettre une réelle introspection susceptible d’apporter un nouvel éclairage sur la conduite du pays.

En fait, Vital Kamerhe en bon calculateur pense qu’au regard du délai imparti pour la fin de la mandature actuelle de Joseph Kabila, la priorité devrait plutôt être le strict respect du délai butoir de 2016. Dans deux ans, dit-il, l’actuelle législature est censée prendre fin et le fait de convoquer un dialogue aujourd’hui risque d’avoir une incidence sur cette échéance. Concrètement, l’opposant redoute que ce dialogue entre acteurs politiques et de la société civile ne débouche sur une transition pouvant prendre deux à trois ans au grand dam de la population dont les souffrances risqueront de se prolonger. Cette transition serait  coiffée par l’actuel chef de l’État. Ce qui ne fait pas l’affaire de Vital Kamerhe qui voudrait le voir rendre le tablier dans le délai constitutionnel. D’où le boycott du dialogue qu’il prône. Vital Kamerhe entend, de ce fait, embarquer tous ses partenaires de l’opposition dans sa logique contestataire.

Vital Kamerhe étonne plus d’un lorsqu’on sait qu’il y a encore quelques semaines son parti avait piloté une série des manifestations avec, à la clé, un sit-in devant le siège de la Monusco pour exiger la convocation illico presto du dialogue politique conformément à l’Accord-cadre d’Addis-Abeba. Reste à savoir si ses alliés, à l’instar de l’Union pour la démocratie et le progrès social, vont le suivre sur cette voie au moment où la majorité, hier opposée à cette idée, commence à afficher des signes d’ouverture. Bloqués par rapport au schéma des Concertations nationales pour n’avoir pas réussi à happer quelques ténors de l’opposition dans la perspective d’un gouvernement de cohésion nationale, les stratèges de la majorité semblent maintenant pencher en faveur d’un dialogue politique. Le spectre du gouvernement de cohésion nationale n’étant toujours pas écarté, il est clair que l’appel au boycott de Vital Kamerhe risque de ressembler à un prêche dans le désert au regard de la frénésie boulimique qui caractérise la classe politique congolaise en général et l’opposition en particulier.

Tout en continuant de lutter pour un dialogue politique inclusif, la plupart d’opposants ont certainement des agendas cachés liés à leur besoin de repositionnement politique. En tout état de cause, si ce dialogue politique entre dans l’esprit d’un échange enrichissant afin de baliser l’avenir immédiat du pays, d’aucuns n’y voient aucun inconvénient. Cependant s’il tend à se muer en une tribune où pourrait se négocier le sort de l’actuel pouvoir dans une perspective de prolongation de son mandat, il est clair que les résultats attendus ne rejoindront forcément pas les attentes du grand nombre. C’est le lieu de définir les termes de référence et de les intérioriser avant d’engager les conciliabules. Question de prévenir d’éventuels dérapages.   

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Vital Kamerhe