Diplomatie : des déclarations polémiques refroidissent l’axe Paris-Bamako

Mercredi 3 Novembre 2021 - 11:16

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Depuis septembre dernier au siège de l’ONU jusqu’à ses récentes interventions devant les médias en passant par le fait qu’il est soutenu ouvertement dans certaines rencontres nationales, le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga persiste à dénoncer un « abandon en plein vol » de la France, allusion faite à la décision de retrait du Mali de la force Barkhane. Des accusations qualifiées de « honte » par le président français, Emmanuel Macron.

Les relations entre la France et le Mali sont au plus bas depuis que le chef du gouvernement malien parle haut et fort du « lâchage » présumé de Paris avec le redéploiement de Barkhane. Estimant que la force française est « incapable d’enrayer la montée du terrorisme » dans son pays, Choguel Kokalla Maïga réaffirme que Bamako a le droit et même le devoir de se tourner vers d’autres partenaires pour sécuriser le Mali, y compris le très controversé groupe de mercenaires russes Wagner.

Face à cette situation, le gouvernement malien, qui « a bien compris que s’il ne compte que sur un seul partenaire, (...) pourra à tout moment être abandonné, en cherche d’autres », explique maintes fois son Premier ministre, démentant toutefois des discussions avec le groupe privé russe, qu’il qualifie de « rumeurs ».

Répondant aux accusations du Premier ministre malien, le chef de l’Etat français n’a pas mâché ses mots. « Sans la France au Sahel, il n’y aurait plus de gouvernement au Mali. Les terroristes auraient pris le contrôle d’abord de Bamako et de tout le pays », a-t-il fait remarquer, ajoutant : « Nous ne sommes pas le peuple à sa place ». « L’armée française n’a pas à se substituer au non travail, si je puis dire, de l’Etat malien », actuellement dirigé par une junte militaire, a lancé récemment Emmanuel Macron dans un entretien diffusé sur France Inter, soulignant « qu’on ne peut pas demander à nos soldats de remplacer ce qui est le travail de votre Etat ».

Les dirigeants maliens appelés à prendre toutes leurs responsabilités

« Il faut que l’Etat revienne avec sa justice, son éducation, sa police partout, en particulier au Mali », où des pans entiers de territoire restent livrés à eux-mêmes face aux djihadistes, aux tensions intercommunautaires et aux trafics, a-t-il dit, évoquant aussi le Burkina Faso voisin, en proie à des violences récurrentes. Et vantant « des vrais résultats » et « des vrais succès » de l’armée française, présente depuis huit ans au Sahel, qui va se concentrer dorénavant « sur la stricte lutte contre les groupes terroristes », Emmanuel Macron a appelé le gouvernement malien à prendre ses responsabilités au risque de voir les « terroristes reprendre » les territoires libérés « puisqu’il n’y a pas de perspectives ».

La France qui intervient militairement au Sahel depuis 2013 a entrepris en juin de réorganiser son dispositif militaire en quittant notamment les bases les plus au nord du Mali (Kidal, Tombouctou et Tessalit) et en prévoyant de réduire ses effectifs dans la région d’ici 2023 à 2 500-3 000 hommes, contre plus de 5 000 aujourd’hui. Ses autorités voient au même moment leur influence contestée au Mali, notamment par la Russie dont les services des paramilitaires de la société privée Wagner sont sollicités par la junte malienne au pouvoir.

Présent, entre autres, en Libye et en Centrafrique, où il est accusé d’exactions, le groupe Wagner est soupçonné, notamment par Paris, d’agir pour le compte du Kremlin là où ce dernier ne veut pas apparaître officiellement. Une situation qui a conduit la France, l’Allemagne ou l’Estonie à avertir qu’elles réexamineraient leur présence militaire au Mali si un accord était conclu entre Bamako et le groupe privé Wagner.

Au moment où la tension monte entre le Mali et la France, qui comme de nombreux pays africains et européens s’inquiètent d’un possible recours de ce pays aux mercenaires de Wagner, quatre hélicoptères militaires russes de type Mi-171, des armes et des munitions viennent d’être fournis à l’armée malienne. Le ministre malien de la Défense, le colonel Sadio Camara, qui a réceptionné cet armement, salue la fiabilité et le sérieux du partenariat bilatéral qui « donne satisfaction » à Bamako.

 

Nestor N'Gampoula

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