Energie : répondre aux défis de l’électrification en AfriqueLundi 19 Mai 2025 - 23:35 Réunis à Dar es Salam, en Tanzanie, trente chefs d’État africains se sont engagés à raccorder 300 millions d’Africains à l’électricité d’ici à la fin de la décennie. Ils ont donné naissance à la « Mission 300 », dotée d’un soutien financier de plus de 50 milliards de dollars. Si l’accès à l’énergie est un droit fondamental qui figure parmi les dix-sept objectifs de développement durable, 600 millions d’Africains n’ont toujours pas accès à l’électricité. Pire encore, 1,2 milliard de citoyens du continent ne disposent pas de solution de cuisson propre, une menace pour leur santé et pour l’environnement. L’Afrique est un grand paradoxe : alors que le continent dispose de ressources énergétiques et naturelles exceptionnelles (riches sous-sols, fort taux d’ensoleillement, importantes réserves d’eau, etc.), il souffre d’un déficit de production patent. La comparaison avec la Chine, qui a peu ou prou le même nombre d’habitants, est vertigineuse. Ces cinq dernières années, l’Afrique a mis en service moins de 5% de ce que la Chine a mis en service en une année en termes de capacité de production. Si des pays comme le Maroc ou le Kenya font déjà figure d’exemples, le reste du continent doit combler son retard. Mais les ambitions ne manquent pas. En effet, nombre de pays africains se sont récemment dotés de stratégies d’électrification ambitieuses pour pallier ce déficit chronique de production, et donc d’accès à l’électricité des populations. A Dar es Salam, douze pays comme le Tchad, la République démocratique du Congo, le Nigeria ou la Zambie présentaient leur « pacte énergétique national », avec des objectifs concrets à l’horizon 2025 ou 2030. Miser sur le renouvelable et d’autres sources L’Afrique est plurielle et il n’existe pas de recette miracle. Celle-ci comprendrait tout ou partie du développement des énergies renouvelables. Si le continent exploite déjà bien son potentiel hydraulique, notamment en Éthiopie, il possède un potentiel en matière de production électrique photovoltaïque exceptionnel. Aujourd’hui, l’hydraulique représente 60% de la production électrique renouvelable du continent, contre 21% pour le solaire. Le potentiel de développement de ce dernier devrait permettre d’augmenter nettement la part du renouvelable dans son mix énergétique global. L’installation de nouvelles unités de production renouvelable doit s’accompagner d’investissements dans des réseaux de transport et de distribution souvent vieillissants. De tels investissements permettent de densifier le réseau, mais aussi de limiter les pertes occasionnées par la vétusté de celui-ci. En plus de pénaliser les ménages, le manque de fiabilité des réseaux électriques représente un véritable manque à gagner pour les économies du continent. En parallèle, les pays africains doivent poursuivre leurs efforts pour interconnecter leurs réseaux et créer des pôles régionaux. Vient ensuite le développement des solutions hors réseau. Enfin, les modes de production thermiques doivent être amortis tant que leur état le permet afin de maintenir une production stable. La région Ouest-africaine : un cas d’école L’Afrique de l’Ouest présente des enjeux énergétiques majeurs. La région accueille 30% de la population du continent, représente 20% de son produit intérieur brut, mais ne dispose que de 12% de la capacité de production installée. En outre, le taux d’accès à l’électricité, enjeu majeur de développement, n’est que de 42%. Mais ce contexte difficile représente une opportunité majeure et de nombreux pays l’ont compris. C’est le cas du Bénin, qui s’efforce de suivre la recette du succès susmentionnée, en s’appuyant sur la mobilisation des bailleurs internationaux et du secteur privé. Puis la Côte d’Ivoire, qui s’est dotée d’un « Pacte national énergie ». Elle se fixe plusieurs objectifs d’ici à 2030 comme l’électrification universelle, un accès à la cuisson propre pour 50% des ménages, ou encore 45% d’énergies renouvelables dans le mix électrique. Ces deux pays ont intégré le réseau Ouest-africain, soutenu par la Banque mondiale, qui a déjà permis la mise en service de 4000 km de ligne de transport reliant des pays comme le Bénin, le Burkina Faso, le Niger et le Nigeria. Le volontarisme des pays africains qui dessinent des stratégies structurées et ambitieuses mobilise l’aide publique internationale et va parfois jusqu’à libéraliser leur marché de l’électricité, prouvant que l’Afrique n’est pas condamnée au sous-développement. Mieux encore, le continent, qui regorge de terres rares, composantes indispensables des technologies de production d’électricité renouvelable, pourrait faire émerger des filières de production locale autour de partenariats public-privé. L’Afrique, le champion de l’énergie renouvelable de demain ? Noël Ndong Notification:Non |