Feux de Brazza : les organisateurs mettent l’accent sur l’importance de la musique traditionnelle et son instrument

Samedi 19 Avril 2014 - 2:11

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Le point a été soulevé lors d’une causerie-débat présidée par le secrétaire exécutif du Centre international de recherche et de documentation sur les traditions et les langues africaines (Cerdotola), Charles Binam Bikoï, le 15 avril à Brazzaville

Cet entretien à bâtons rompus entre les universitaires, les hommes de culture du Congo-Brazzaville et les experts en la matière (les sachants), notamment les professeurs Charles Binam Bikoï, du Cameroun, et Mbuyamba Lupwishi, de la RD-Congo, avait pour thème « Musique traditionnelle et développement durable ».

Cette thématique a été esquissée en premier lieu par Charles Binam Bikoï, pour qui la musique est le premier élément qui introduit l’homme dans la société, prenant l’exemple de la berceuse d’une mère à son nouveau-né, et un binôme irréductible. « La musique nous accompagne dans les différents métiers que nous apprenons. Elle est toujours au rendez-vous des sacralités et du pouvoir », a-t-il renchéri. 

C’est dans cette perspective que la musique traditionnelle que d’aucuns qualifient de musique du passé, qui pourtant ne reste pas figée dans ce passé, porte le destin des peuples partout où l’homme africain est passé. Pour modèle, poursuit-il, « nous avons les chants des esclaves africains qui ont donnés naissance à divers types de musique. Parmi lesquels le jazz et le gospel. La musique traditionnelle est dans ce sens une sauvegarde de l’identité et un patrimoine national. »

Le professeur Mbuyamba Lupwishi a de son côté insisté sur l’importance que revêt l’instrument traditionnel qui est à l’origine de la musique. Il a rappelé qu’il y a encore quelques années, précisément en 1995, la première conclusion d’un colloque sur la musique traditionnelle et son instrument tenu à Madagascar faisait référence à la rétractabilité de l’identité humaine par l’instrument musical. Il a aussi soulevé la place capitale qu’occupent ces instruments dans le développement durable et l’émergence d’un pays : « La promotion des instruments traditionnels est bénéfique aussi bien pour des fabricants que pour le marché de l’art. Il est donc nécessaire d’alimenter les politiques culturelles et promouvoir les ateliers de fabrication d’art, qui sont pour le moment minimes dans nos pays. »

Le professeur Mbuyamba Lupwishi a par ailleurs déploré la disparition de certains arbres spécifiques servant à fabriquer les instruments de cette musique. Il s’agit notamment du sanza ou de l’imbila. Il a invité les autorités compétentes à renforcer les stratégies de protection de l’environnement pour conserver la pureté de la musique et l’originalité du son dégagé par l’instrument fabriqué à base d’un arbre qui lui est destiné.

Des échanges fructueux

Les échanges entre intervenants et conférenciers ont été très fructueux. Par exemple, à la question d’un intervenant liée à l’apport du Cerdotola dans la visibilité et la conservation de la musique traditionnelle congolaise en particulier et africaine en générale, le secrétaire exécutif de cette institution, Charles Binam Bikoï, a répondu qu’il était important que l’Africain se documente sur soi pour qu’il écrive sa propre histoire afin de préserver l’ordre établi des choses. Il est donc capital que la tradition africaine, qui jusqu’à lors demeure beaucoup plus orale, passe au textuel pour garantir une transmission de la richesse culturelle africaine aux générations futures.

Le Cerdotola a pour ce faire mis en place le serveur Projet Alora, qui est un système d’archivage numérique et qui résout tant soit peu la problématique de la pérennisation des données. « L’important n’est pas seulement de collecter les informations liées à la tradition africaine par le biais d’un témoignage oral mais de les conserver dans tous ses aspects le plus longtemps possible. Au-delà, ce thème nous convoque devant le tribunal de l’intelligence, qui exige  une transmission de l’oralité et du textuel pour recréer les liens qui favorisent la cohésion sociale et le respect de l’identité de l’autre », a déclaré le professeur Charles Binam Bikoï.

Rappelons que cette conférence est un prélude au colloque qui se tiendra en août concernant ce festival.

Durly-Émilia Gankama

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Le professeur Charles Binam Bikoï prononçant son exposé. (© DR) ; Photo 2 : Des universitaires et personnalités culturelles congolais. (© DR)