Gestion foncière : adopter une procédure inclusive dans l’élaboration des lois

Mardi 13 Décembre 2022 - 17:30

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Dans sa thèse de doctorat soutenue le 10 décembre à Brazzaville sur le thème « La propriété foncière en République du Congo », Elie Jean-Pierre Nongou a proposé au législateur congolais de faire l’effort de légiférer à partir des réalités des fonctionnements sociaux et non à partir des concepts idéologiques désincarnés.

Titulaire d’un master de droit privé (recherche fondamentale), Elie Jean-Pierre Nongou est désormais docteur de droit privé en sciences criminelles de l’Université Marien-Ngouabi. Selon lui, la propriété foncière en République du Congo est soumise à un régime d’immatriculation obligatoire visant à assurer une sécurité foncière absolue. Ce régime suspend l’exercice de droit de propriété de la détention du titre foncier. Dans ces conditions, la garantie du droit de propriété sur les sols ainsi que celle des autres droits réels résultent de leur immatriculation et de leur publicité

« Mais, dans un système où la corruption et les autres antivaleurs demeurent un grand défi à relever, la sécurisation foncière au moyen d’un titre de propriété au caractère définitif et inattaquable semble créer plus de problèmes qu’elle n’en résout. La loi n°26-2022 du 25 mai 2022 fixant les règles d’immatriculation de la propriété immobilière dite réformatrice créée davantage de confusions sur la nature juridique du titre foncier », a résumé Elie Jean-Pierre Nongou dans sa thèse de 533 pages.

Pour lui, la loi qui admet que le titre foncier est un acte administratif autonome le soustrait, paradoxalement, du régime de recours pour excès de pouvoir. Le législateur congolais semble par-là instaurer un droit qui contredit le droit. « La réforme de 2022 paraît inachevée. Au même titre que le régime foncier précédent, elle ne contribue pas suffisamment à la garantie des droits des propriétaires fonciers et au renforcement de la sécurité juridique. En réalité, la législation congolaise conduit, de manière déguisée, à l’expropriation des propriétaires terriens au profit des plus nantis. Elle est élitiste et ne protège pas du tout le paysan. Elle conduit plutôt ce dernier à vendre ses terres pour devenir ouvrier agricole », a poursuivi l’impétrant.

D’où la nécessité de revoir le système foncier congolais car, les principes du système actuel sont conçus dans un but diamétralement opposé à celui qui doit être poursuivi. Le droit doit correspondre aux réalités sociales. « Le législateur congolais devrait faire l’effort de légiférer à partir des réalités des fonctionnements sociaux et non à partir des concepts idéologiques désincarnés. Nous avons un régime de la propriété foncière qui existe au Congo, notre thèse prend un peu à contre-pied le système d’immatriculation actuel. Nous pensons que ce système tel que conçu est juste un héritage colonial, il ne prend pas en compte le paysan et est élaboré sans tenir compte de la réalité sociale congolaise », a-t-il expliqué après la thèse, précisant que la nouvelle loi sur le titre foncier est une réforme inachevée.

Le travail de recherche d’Elie Jean-Pierre Nongou a reçu l’assentiment des membres du jury qui lui ont attribué une mention très honorable avec félicitations. Notons que le jury était composé des Prs Robert Nemedeu de l’Université de Yaoundé II-Soa (président), Raoul Kienge-Kienge Intudi de l’Université de Kinshassa (rapporteur externe), du maître de conférence Placide Moudoudou de l’Université Marien-Ngouabi (rapporteur interne). Le Pr Jean-Marie Tchakoua de l’université de Yaoundé II-Soa a été l’examinateur de cette thèse dont Elie Joseph Loko-Balossa, maître de conférence de droit privé de l’université Marien-Ngouabi, a été le directeur.

Parfait Wilfried Douniama

Légendes et crédits photo : 

Le Dr Elie Jean-Pierre Nongou/Adiac

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