Interview. Ernis : « J’obéis à mon intuition, à cette voix qui me souffle des idées »

Vendredi 23 Décembre 2022 - 12:06

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Jeune femme d’origine camerounaise, Ernis est écrivaine, poétesse et slameuse d’environ 28 ans qui a fait des études de philosophie à l’Université de Yaoundé. Son premier roman « Comme une reine », porté par la force des femmes de son village et de son pays, lui a permis de remporter la troisième édition du prix Voix  d’Afriques en septembre dernier. Elle a partagé son expérience, son vécu et ses émotions lors de la conférence-débat tenue à Brazzaville, le 19 décembre, a l’occasion de la treizième édition du festival Mantsina sur scène. Entretien.

Les Dépêches du Bassin du Congo (L.D.B.C.): Ernis, de l’ombre à la lumière, un roman, un prix. Racontez-nous ce qui s’est réellement passé.

Ernis: L’écriture de ce roman n’a pas du tout été facile. « Comme une reine » est étendu entre modernité et tradition, avec au cœur la liberté des femmes. Je me suis posée plusieurs  questions sur la polygamie, l'avortement, la sorcellerie, la maternité, le VIH/sida. Autant de thèmes sensibles qui concernent et suscitent l’expression des femmes. Je la présente comme celle qui n’est pas résiliente mais qui trouve des solutions aux problèmes que rencontre sa société.

L.D.B.C. : Quelle a été la source de votre inspiration pour écrire ce roman ?

Ernis: J’ai quitté Douala, la capitale économique du Cameroun, pour retourner dans mon village natal  où les femmes de ma famille m’ont élevée, m’apprenant les rites, les traditions, l’histoire des miens. Depuis, je portais en moi  ces récits et ces dons sans trop savoir quoi en faire, ses visions me rappelaient que j’appartenais à une longue lignée de femmes puissantes. Rien ne m’avait préparée à ce retour, au réveil des visions, aux paroles des aînés, au rôle que je pouvais jouer dans ma communauté. Je me suis donc inspiré de mon arrière grand-mère et de ces femmes de mon village. Le village Bamiléké.

L.D.B.C: Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors du script de ce roman ?

Ernis: C’est quand je parlais de mon arrière grand-mère qui m’a visitée en songe. Elle m’a passé la tradition. De temps à autre je pleurais parce que ce n’est qu’en 2021 que je me rendais compte de tout ce qu’elle m’avait donné. Elle m’avait en fait donné des armes pour affronter la vie et cela, je ne le comprenais pas. C’est ce que j’appelle la transmission qui voyage de génération en génération.

L.D.B.C: Quel est message essentiel que le lecteur peut retenir de roman ?

Ernis: La femme a toujours été là, elle a toujours été présente et a toujours lutté aux cotés des hommes et parfois sans les hommes. Il s’agit de la puissance de médiumnité mais aussi de la puissance de l’éducation. Elle transmet les valeurs, ne renonce jamais, même lorsqu’elle divorce, elle s’inquiète encore pour cet homme. Dans l’histoire de la décolonisation au pays Bamiléké pendant les maquisards, on appelait les femmes les « chars d’assaut », parce qu’elles prenaient les armes et allaient au combat pour lutter contre les colons.

L.D.B.C: Combien de pages  compte le roman « Comme une reine » et où peut–on le trouver ?

Ernis: Le livre compte 247 pages et est édité par la maison Jean Claude Lathès, basée en France. Il est disponible sur Amazon.  « Comme une reine » a vu le jour le 21 septembre dernier en librairie.

L.D.B.C: Quel a été votre ressenti lorsque vous avez remporté le prix Voix d’Afrique 2022 ?

Ernis: Je ne m'étais pas préparée. Mais je savais que j’étais éligible après avoir lu les critères de l’appel à candidatures. Nous étions 373 candidats et j’avais des doutes. Je suis très heureuse aujourd’hui parce que je me sens légitime. Ce prix m’a fait asseoir et m’a rappelé combien j’ai eu raison de me faire confiance.

L.D.B.C: Un dernier message?

Ernis: Les femmes doivent se donner la main. On ne peut s’affirmer dans nos sociétés que si on forme une certaine sororité, tuer le tabou et se dire qu’on peut écrire ensemble des jours meilleurs.

Propos recueillis par Divine Ongagna

Légendes et crédits photo : 

Ernis

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