Moanda, Kongo central : le phénomène « déplacé climatique » devrait croître dans les années à venir

Mardi 6 Avril 2021 - 17:24

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L’avancée de la mer sur les terres va aboutir à un profond changement de la carte de la ville côtière. Au-delà de l’habitat aujourd’hui menacé, toute la biodiversité urbaine est en train de subir un bouleversement. En l’espace de 20 ans, les mangroves ont perdu plus de 45 % de leurs superficies.

La ville côtière de Moanda comptera bientôt plus de déplacés climatiques que partout ailleurs dans le pays dans la mesure où le changement climatique n’est pas la seule affaire du Kongo central. Par rapport à ce phénomène, il s’agit des populations qui sont contraintes d’abandonner leurs maisons face à l’érosion grandissante de la côte au bord de l’Océan Atlantique. La menace est tellement prise très au sérieux par le Conseil économique et social qu’elle a décidé d’alerter l’opinion nationale et internationale. « Un cauchemar pour les populations qui voient leur habitat de plus en plus menacé par l'avancée de la mer sur les terres; un phénomène d'origine naturelle, aux causes multiples et qui, jusqu'à récemment, se régulait de lui-même. L’une des causes principales est sans doute l'élévation du niveau de la mer due au réchauffement de la planète », a expliqué son président, Jean-Pierre Kiwakana.

Si nous n’en sommes pas encore à l’instauration carrément d’un état d’urgence, les impacts relevés ne sont pas moins préoccupants. Sur le plan social, il est désormais établi que la ville de Moanda va compter un nombre croissant de déplacés climatiques. « Les populations affectées se retrouvent en général dans une situation précaire ». Même sur le plan économique, le Conseil économique et social note que les effets néfastes vont dérégler certaines activités lucratives locales, notamment la pêche et le tourisme essentiellement balnéaire. « Les hôtels situés sur la côte ont perdu l’essentiel de leurs plages ». Enfin, il est difficile de clore ce chapitre sans parler des effets néfastes sur l’environnement. Les mangroves, l’une des zones riches en biodiversité et en stocks carbone, ont perdu plus de 45 % de leurs superficies au cours des 20 dernières années.

Selon Jean-Pierre Kiwakana, la situation mérite un regain d’intérêt de l’ensemble du pays. Déjà, il existe un programme communautaire du gouvernement de la République qui bénéficie de l’accompagnement des partenaires au développement, dont le Pnud et la GEF. Son objectif est de renforcer la résilience des populations. Plus concrètement, l’idée est de les aider à faire face aux changements climatiques à travers la construction d’ouvrages de protection en dur et des solutions en harmonie avec la nature, comme la plantation des bambous et des roseaux.  En chiffres, ce programme communautaire dit de « riposte à l’urgence » prévoit de planter un milliard d’arbres d’ici à 2023 pour restaurer trois millions d’hectares, sauver un million d’hectares de forêts primaires et de conserver dix millions d’hectares de coffres-forts carbone comme les mangroves, les tourbières et les forêts denses.

Même si les initiatives prochaines représentent des pas importants franchis dans le cadre de la riposte, il va sans dire que la réponse ne peut pas éluder la dimension politique. « Au-delà des engagements des partenaires, la responsabilité politique et économique revient d’abord à l’État RD-congolais à qui il revient de droit le devoir de protéger la côte de Moanda dont l’importance stratégique n’est pas à démontrer ».  En effet, il s’agit de la seule voie de sortie vers l’extérieur de la zone et même de l’ensemble du territoire national. Ces 40 km de côte aujourd’hui menacés viennent briser en quelque sorte l’enclavement du vaste pays.

Laurent Essolomwa

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Jean-Pierre Kiwakana, président du Conseil économique et social Photo 2 : L'avancée de la mer sur les terres le long de la côte de Moanda

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