Révision du Code minier : un non-évènement

Samedi 13 Février 2016 - 13:38

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"Ils ont dit que tel n'était pas la vraie pensée du ministre des Mines", a réagi un expert spécialisé dans l'exploitation minière en République démocratique du Congo (RDC). En effet, selon le cabinet du ministre Martin Kabwelulu, "la révision du Code minier de 2002 est un principe retenu par le gouvernement". Et la mise au point du cabinet visait "à dissiper un malentendu né d'une interprétation erronée des propos tenus par Martin Kabwelulu lors de la conférence minière au Cap, en Afrique du Sud". Aussi une question se pose-t-elle : "jusqu'où ira le gouvernement ?", a martelé l'expert.

À ce stade, il est difficile d'éluder le profond malaise qui règne autour de la question de la révision ou pas du Code élaboré en 2002 pour attirer les grands groupes miniers mais qui commence à peser sur la capacité de l'État congolais à mobiliser les recettes surtout du secteur minier. Pour certains acteurs de la société civile, la RDC est la grande perdante de l'instauration de ce régime des facilités. Selon eux, les groupes miniers gagnent un peu plus de 40 milliards de dollars américains alors que le pays mobilise moins de deux milliards. Dans son rapport d'octobre 2015, le FMI avance même quelques chiffres. Le taux de redevance sur le cuivre est de 2% en RDC, contre 4% en Indonésie, 6% en Zambie et jusqu'à 14% en Chili. Ces derniers mois d'ailleurs, plusieurs partenaires de la RDC dont la Banque mondiale ont continué à faire pression sur le pays afin qu'il améliore ses recettes minières pour arriver à mettre en oeuvre des politiques de développement plus efficaces. À cela, il faut ajouter la pression de certaines organisations internationales comme Global Witness. Pour cette ONG, "l'abandon de l'effort de réforme de cette loi est une énorme occasion manquée dans un pays où, si elles étaient bien gérées, les ressources de l'exploitation minière pourraient offrir une voie critique pour sortir de la pauvreté". En effet, les mines ne contribuent qu'à hauteur de 10% au budget de l'État.

Genèse d'une réforme  

À l'occasion des dix ans d'application du Code minier, en 2013, le gouvernement a enclenché une réforme minière. Pour les miniers, il fallait opérer des choix judicieux pour ne pas anéantir le bilan relativement positif d'une dizaine d'années d'application de l'ancienne loi. Mais en quoi consistait justement cette réforme ? Selon le ministre, il était important de réaliser une véritable refonte sur les points portant sur la gestion des titres, les droits miniers, la responsabilité sociale des entreprises minières, les obligations des intervenants, etc. Les discussions devaient également trouver des solutions consensuelles au pourcentage qui revient à l'État dans tout projet minier. Pour le gouvernement, il était indispensable de le revoir à la hausse au regard des avantages fiscaux et douaniers accordés aux opérateurs miniers. On le sait, les autorités avaient fait des propositions qui ont provoqué une vive contestation du secteur privé. Depuis, les discussions ont stagné en dépit de la pression soutenue des partenaires au développement sur le gouvernement.

Retour à la case de départ

 Le projet tient toujours après la controverse suscitée par les propos de Martin Kabwelulu au cours de sa dernière sortie médiatique. Du côté des experts, l'on met en garde contre toute surenchère autour de cette réforme minière. Pour eux, il est important que l'État arrive à maîtriser les chiffres et à briser l'opacité. "D'où viendrait que les données fournies à l'État soient peu fiables, et que l'État ne sanctionne pas les auteurs de ces fraudes". La réforme ne devrait porter que sur les faiblesses identifiées. Et l'État ne doit pas à tour violer ses propres lois, ont-ils poursuivi. "Un investisseur censé choisira en fonction des opportunités. L'Etat devrait plutôt poursuivre ses recherches géologiques pour connaître son sol".

Et la société civile réagit aussi aux enjeux des discussions en cours. Selon elle, il faut d'abord commencer par bien appliquer ce code pour en tirer un meilleur profit. La loi devrait être plutôt renforcée dans la dimension environnement et gestion des impacts.

Laurent Essolomwa

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