Santé : les exigences du FMI auraient affaibli les systèmes du secteur des pays touchés par Ebola

Mardi 30 Décembre 2014 - 18:44

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Une étude menée par des experts du département de sociologie de l’Université de Cambridge, de l’Université d’Oxford et de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, révèle que les exigences du FMI en matière de rigueur budgétaire ont affaibli les systèmes de santé des pays les plus touchés par l’épidémie.

Dans cette étude les chercheurs ont passé en revue les politiques mises en œuvre par le FMI avant l’épidémie en utilisant des données fournies par les programmes de prêts financiers accordés par l’institution entre 1990 et 2014. Après avoir analysé les effets de ces politiques dans les pays les plus affectés, notamment la Guinée, le Liberia et la Sierra Leone, les chercheurs ont souligné que les exigences de l’institution ont effectivement empêché une réponse coordonnée pour lutter contre l’épidémie dans ces trois pays. Ils ont convenu que les programmes de réformes exigés par le FMI ont surtout ralenti le développement de services de santé efficaces dans ces Etats, épicentre de l’épidémie qui a fait plus de 7.370 morts en un an.

D’après ces chercheurs, les systèmes de santé ont été affaiblis par les exigences de réformes économiques et de réduction des dépenses publiques et des salaires dans la fonction publique, et de décentralisation des systèmes de santé. « L’une des principales raisons de la rapidité de l’expansion de l’épidémie a été la faiblesse des systèmes de santé dans la région et il serait malvenu de ne pas s’intéresser aux causes sous-jacentes », a expliqué le principal auteur de l’étude, le sociologue de Cambridge, Alexander Kentikelenis. « Les programmes, dont le FMI s’est fait l’avocat, ont contribué aux problèmes de manque de moyens financiers et de personnels et au manque de préparation des systèmes de santé dans les pays frappés par Ebola », a-t-il précisé.

Le sociologue de Cambridge et le co-auteur de l’étude Lawrence King ont relevé qu’en 2013, juste avant l’éruption d’Ebola, les trois pays avaient été confrontés aux directives économiques du FMI. « Aucun n’a pu augmenter ses dépenses sociales malgré des besoins pressants dans le domaine de la santé », ont-ils estimé.

Réagissant à la suite de la publication de l’étude, un porte-parole du FMI a répliqué que le mandat de l’organisation n’incluait pas spécifiquement le domaine de la santé.  « De telles accusations sont basées sur un malentendu, et dans certains cas sur une déformation des politiques économiques pratiquées par le FMI », a-t-il insisté, ajoutant qu’il est totalement faux d’affirmer que la propagation d’Ebola est une conséquence de la politique du FMI.

« Depuis 2009, des prêts accordés à des pays à faible revenu l’ont été sans taux d’intérêt ce qui a libéré des ressources disponibles pour des pays désireux de dépenser plus dans les domaines de la santé et de l’éducation », a ajouté le porte-parole.  L’institution avait fourni une aide financière de 130 millions de dollars en septembre dans le cadre de la lutte contre Ebola et elle envisageait de fournir l’année prochaine une somme similaire en faveur des pays les plus touchés, a-t-il conclu.

 

Nestor N'Gampoula