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Si l'on ignore l'ONU

Samedi 1 Avril 2023 - 18:00

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De l’âge ? Oui, la petite vieille dame venue au monde en l’an 45 du siècle dernier, au moment où l’humanité sortait d’un terrible fourvoiement- la Seconde Guerre mondiale-, en a sans doute pris. A 78 ans, le 24 octobre prochain, l’Organisation des Nations unies (ONU), comme tout organe vivant, subit des attaques venant de tous côtés. Certains crient à hue et à dia sur son parcours qualifié de chaotique, d’autres lui trouvent des excuses « compréhensibles » et plaident pour sa réforme.

De l’une chose l’autre. Si l’on penche pour les voies qui appellent à la redéfinition des statuts de l’organisation internationale, on est proche du consensus formé au lendemain du conflit rappelé plus haut, quand le choc traumatique de l’affreuse guerre mondiale, la seconde en l’espace d’un quart de siècle, érigea la conscience collective en une digue contre la folie humaine. Ne pas laisser mourir l’ONU est donc, qu’on le veuille ou non, un impératif existentiel. Mais comment sauver l’âme du désir partagé de paix sans être à son écoute ?

Depuis plusieurs années, les opinions sont émises sur la place publique, ou dans les chancelleries, sur le fait qu’après près de huit décennies, l’ONU mérite d’être « toilettée ». Ce n’est pas de lui trouver une autre appellation qu’il s’agit, c’est de prendre en compte les réalités que nos regards ne peuvent plus dissimuler. Parmi lesquelles l’émergence d’autres ensembles régionaux qui ne devraient plus être tenus à la périphérie des cercles de décisions engageant l’avenir de l’humanité.

Les Etats-Unis, la Russie, la France, la Chine et la Grande-Bretagne ne peuvent plus seuls décider pour tout le monde, pour tous les autres, étant entendu que tout au long des soixante-dix-huit dernières années, au lieu d’assumer le rôle qui leur revenait d’ensemencer le consensus, ils ont au contraire montré que leurs intérêts spécifiques fondaient la raison d’être de leur véto. Chaque fois qu’une main puissante était levée à l’ONU, elle prenait la défense d’un partenaire en faute, à qui l’on ne devait rien reprocher quel qu’en fut la loi transgressée.

Au fil des ans, l’état de grâce installé par la crainte d’un nouveau conflit a fait place au scepticisme parmi les nations les plus faibles, puis au refus par le plus grand nombre d’entre elles de croire les « Grands » dans l’idée qu’ils étaient les protecteurs du monde postconflit. De cinq, ils sont devenus représentatifs de deux groupes d’intérêt antagoniques portés par une volonté inébranlable de prendre les armes et de s’entredéchirer en cas de besoin. Bien sûr que la clairvoyance avait fini par l’emporter, en particulier entre les deux têtes de pont de la guerre froide qu’étaient les Etats-Unis et l’ex-Union des républiques socialistes soviétiques.

Aujourd’hui que le fameux équilibre de la terreur entre l’Est et l’Ouest est devenu un vain mot, à quoi assiste-t-on ? A une série d’expéditions punitives dont les victimes se comptent par dizaines, par centaines et par milliers dans plusieurs régions du monde en proie à une instabilité chronique. Ces expéditions sont toutes décidées en dehors de la maison commune de New York, laquelle ne table plus que sur les affaires plus « rondes » comme crier de l’aide pour la population fuyant les conflits armés, ou prier les donateurs de mettre la main à la poche pour financer les pandémies.

Tel que l’on traite l’ONU aujourd’hui, tel que le monde risque de plonger dans l’inconnu sans crier gare. De grâce, qu’il plaise à tous de réinventer l’organisation internationale, c’est-à-dire à peu près le retour à la concertation si la notion de multilatéralisme, plus juste, est source de contrariétés.

Gankama N'Siah

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