Discours d'Anatole Collinet Makosso au CEDS

Samedi 14 Juin 2025 - 18:29

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Cérémonie d'élevation au grade de docteur honoris causa du Centre d'études diplomatiques et stratégiques de Dakar - CEDS-

Distinction du PMCG Anatole Collinet Makosso au grade de Docteur Honoris Causa du CEDS,  Dakar, juin 2025Monsieur le ministre des Armées, représentant Monsieur le  Premier ministre, chef du gouvernement du Sénégal,

Mesdames et messieurs les ministres du Congo et du Sénégal,

Excellences mesdames et messieurs les ambassadeurs et chefs de missions diplomatiques,

Monsieur le directeur général du Centre d’études diplomatiques et stratégiques de Dakar,

Monsieur le deuxième vice-président de l’Assemblée nationale de la République du Congo, 

Monsieur les présidents du jury d’honneur

Professeur Charles Moumouni, directeur de l’école doctorale du CEDS de Dakar et rapporteur du jury d’honneur

Honorables invités,

Mesdames, Messieurs,

Il m’est arrivé, dans la vie, de prononcer bien des discours. Certains étaient destinés à convaincre, comme lorsque le 21 juin 2021, je prononçais, devant les Députés de l’Assemblée nationale de mon pays, le programme d’action du Gouvernement. D’autres visaient à rassurer, une tâche devenue fréquente ces derniers temps, face aux parlementaires, mais aussi devant les populations dans un contexte où, en proie au désespoir, avec une opinion publique, dans tous les États du monde, de plus en plus exigeante, les peuples font de moins en moins confiance aux Gouvernants, les rendant responsables des innombrables défis qui assaillent l’Humanité.

Dans de pareilles circonstances, on ne peut être sûr de faire l’unanimité, ni d’avoir convaincu ou rassuré.

Ce discours-ci, en revanche, Mesdames et Messieurs, je le prononce pour remercier. Au moins, les remerciements peuvent faire l’unanimité car nul ne peut les refuser. Et je le fais avec ce que j’ai de plus vrai : un cœur très ému, et un léger tremblement dans la voix, qui trahit ce que les mots n’osent pas toujours dire.

Mais surtout, avec une mémoire en éveil, qui réveille en moi le souvenir de Léopold Sédar Senghor, grande figure africaine qui savait manier la langue de Molière en faisant l’amour des mots, pour parler comme Sony Labou Tansi, et qui, dans ses poèmes, rappelle la nécessité de reconnaitre les bienfaits reçus de l’autre, pour que s’ouvre le sésame de la gratitude.

Monsieur le Premier ministre,

Monsieur le directeur général du CEDS,

Mesdames et messieurs,

Parlant de faire l’amour des mots, en reprenant les termes de Sony Labou Tansi, à qui soit dit en passant, nous devons rendre hommage demain à l’occasion du 30ème anniversaire de sa disparition le 14 juin 2025, trois mots vont constituer la trame de mon discours : Graduation, gratification, gratitude. Car la graduation dont je suis gratifié ce jour mérite, de ma part, gratitude.

La sagesse nous enseigne que l’expression de la gratitude commence par un petit mot dont les enfants apprennent à tester les vertus : « merci ».

Je voudrais, ainsi, pour commencer, en reprenant l’inspiration de Camara Laye, dire merci « A ma mère », cette femme noire, cette femme africaine qui me porta sur le dos, qui m’allaita et qui me fit ouvrir les yeux aux prodiges de la terre.

Oui ! J’aurais aimé être en ce moment « assis sur les genoux de ma mère », celle que vante le conteur congolo-canadien Jean Pierre Makosso, fils du lait de ma mère. Celle qui, pour paraphraser l’artiste musicien Papa Wemba, parlant de la sienne, sans être monitrice, a su me donner une éducation tellement exemplaire que si elle avait été ministre de l’éducation, comme je le fus, les parquets et les prisons auraient fermé leurs portes du fait des valeurs qu’elle aurait transmises aux uns et aux autres, alors que ses enseignements n’avaient pas besoin d’être évalués ni d’être sanctionnés par des diplômes, des parchemins ou des graduations. Oui, femme noire, femme africaine, principale artisane du Docteur Honoris causa que je vais devenir, normalement « la fête d’aujourd’hui, est la tienne ». Hélas ! je regarde dans l’assistance. Tu n’es pas là.

Et dans le sillage de Barak Obama, je pense aussi aux « rêves de mon père », cet homme de valeurs dont les taloches et les conseils m’ont appris à grandir et dont la vie, est demeurée pour moi et pour mes frères, tout un mystère. Ce jour est ton jour de gloire, mon père. J’espère que tu le vis ainsi, de là où tu te trouves, puisque toi non plus n’est pas dans la salle. Ta place est vide, toi qui n’avais pour rêve, pour obsession, que de me voir réussir une carrière à la fois universitaire et politique.

Ma gratitude va également à mon épouse, Aurélie, celle qui cerne ma vie d’une façon particulière et qui, prenant le relais de ma mère, endure avec patience, les aventures d’un homme encombré, déchiré entre les devoirs de la République et la passion de la recherche académique, en quête permanente du savoir au point de ne lui accorder que trop peu de temps. Merci pour ton cierge, toujours allumé.

C’est ici le lieu de témoigner mon infinie gratitude à Son Excellence Monsieur le Président de la République Denis Sassou N’Guesso qui, par son leadership, a su sanctuariser mon destin en m’élevant à de hautes fonctions et en me confiant de grandes responsabilités qui me valent aujourd’hui, entre autres, cette graduation.

A son école, j’ai été formé, et ce titre, destiné, à en croire les exigences de sa création par le Centre d’Etudes Diplomatiques et Stratégiques (CDES), aux « personnalités de haut degré d’excellence dans leur carrière au service de leur pays ou de leur continent », c’est à lui que je le dois pour m’avoir mis face aux défis actuels et futurs dans différents domaines, notamment l’économie, la justice, l’environnement, la défense des médias et la culture, l’égalité des genres, le tout sous sa houlette.

Je salue tout autant son épouse, Madame Antoinette Sassou N’Guesso, cette Dame au grand cœur qui m’a appris l’altruisme et m’a exercé dans l’humanitaire. 

Permettez-moi également de rendre un vibrant hommage à Son Excellence Monsieur le Président Bassirou Diomaye Faye, Président de la République du Sénégal, qui a eu l’amabilité de me recevoir en audience pendant mon séjour, et m’a nourri de son expérience. Tachez lui traduire, Monsieur le Ministre, l’expression de ma Très profonde gratitude, la plus sincère.

Je me dois aussi de saluer, avec la plus haute considération, mon homologue et frère qui, à la suite d’un empêchement de dernière minute, n’a pas pu se joindre à nous et qui, en se faisant représenter par les membres de son Gouvernement garde avec moi la conviction que le pouvoir, lorsqu’il est éclairé, se met au service de la connaissance avec humilité, mettant ainsi l’intelligence au service de l’État, et  l’État au service de la pensée.

Enfin, permettez-moi de rendre hommage à ceux sans qui cette cérémonie n’aurait pas été possible.

Monsieur Babacar Diallo, Directeur général du CEDS de Dakar, cœur battant de cette institution. Homme discret et infatigable, sa persévérance et son dévouement sont une inspiration pour nous tous. Je me souviens d’un matin brumeux à Saint-Malo, où j’ai rencontré, presque par hasard, Son Excellence monsieur Diallo. Ce fut une rencontre singulière, empreinte d’une sorte de poésie silencieuse : Une poignée de main, un regard, un sourire : les prémices d’une fraternité intellectuelle que je chéris aujourd’hui.

Qui aurait cru qu’un tel instant scellerait un lien durable entre le Sénégal et le Congo ?

Ma gratitude s’étend aussi au Professeur Emmanuel Caulier, mon directeur académique au CEDS de Paris, aujourd’hui, conseiller spécial du Directeur général du CEDS de Dakar et l’un de mes précieux guides. Son intelligence, son humanisme, sa fidélité et sa rigueur intellectuelle sont pour moi un phare, une boussole dans les tumultes de l’engagement académique.

Monsieur le président du jury,

Messieurs les membres du jury

Professeur Charles Moumouni, rapporteur du jury,

Ce doctorat honoris causa dont vous me gratifiez me touche au plus profond de l’âme. Il ne vient pas seul. Il porte vos mots, votre confiance, et une fraternité intellectuelle qui est le socle des grandes œuvres.

Rassurez-vous,  chers professeurs, ce diplôme, n’est pas une fin, mais un engagement en faveur de la jeunesse africaine, en faveur de notre continent de lumière qui mérite d’être illuminé davantage par l’éducation, la recherche et la culture.

Sénèque disait : « La vie sans la science est pareille à une image sans lumière. » Face aux ténèbres de l’ignorance et de la division, il nous revient d’allumer cette flamme -non celle des projecteurs, mais celle des bibliothèques silencieuses, des salles de classe modestes, des échanges intimes entre maître et élève, chercheur et sujet, diplomate et partenaire.

Ce sont ces expériences, ces moments de soif et de découverte, qui me rapprochent de votre institution, ici à Dakar : cette foi inébranlable en la puissance de la pensée au service du bien commun.

Pour Platon, « l’éducation est l’allumage d’une flamme, non le remplissage d’un vase. ». Vous êtes ces allumeurs de flammes, gardiens d’une lueur inextinguible. Aujourd’hui, je viens humblement chercher une part de cette lumière.

Monsieur le Premier ministre,

Monsieur le directeur du CEDS,

Monsieur le président du jury,

Mesdames et messieurs,

La gratitude va de pair avec l’humilité. Par elle fleurit la reconnaissance que j’exprime à cœur joie, ce jour, pour avoir bénéficié de votre confiance en portant votre choix sur ma modeste personne pour la distinction de Docteur honoris causa.

Je me tiens aujourd’hui devant vous, non pas en tant qu’homme d’État, ministre ou universitaire, mais comme un homme reconnaissant. Reconnaissant envers une institution qui honore l’Afrique ; reconnaissant envers un cercle de pensée qui fait de la diplomatie un art, et du savoir un pont entre les peuples.

Je ne suis pas venu chercher un honneur que je ne mériterais pas certainement. Car comme s’interrogerait à juste titre, le philosophe français, Olivier Abel, « Pourquoi tant d’ingratitude, et combien sommes-nous rétrécis de faire comme si ce que nous avons et ce que nous sommes nous était dû ? Comme si nous le méritions ? ».

La gratitude, cette vertu exquise, ce plaisir vertueux, m’a conduit ici pour partager la fierté silencieuse que procure le don de l’autre.

Dans cette belle enceinte de l’Institut national de défense, honoré par cette maison de l’intelligence qu’est le CEDS de Dakar, je me tiens devant vous, non pas comme un homme accompli, mais comme un éternel apprenant. Je n’ai pas toujours été professeur, mais j’ai toujours été élève, je n’ai pas toujours enseigné, mais j’ai toujours appris. Je n’ai pas toujours siégé dans les assemblées, mais j’ai toujours répondu aux questions orales comme écrites et aux interpellations. Je n’ai pas toujours écrit, mais j’ai toujours lu. Je me souviens de ces instants où, enfant, j’ouvrais un livre avec une curiosité émerveillée. Ma vie entière a été une quête, souvent humble, parfois joyeuse, parfois solitaire, mais toujours passionnée, pour comprendre le monde et transmettre ce que j’ai reçu. Ces éclairs d’émerveillement sont les fondations de tout grand savoir.

Je m’interroge presque à voix basse, comme face à un miracle discret, comment un enfant de Pointe-Noire, façonné dans le tumulte de l’Histoire, porté par les passions de son peuple et les promesses de l’Afrique, se retrouve aujourd’hui honoré de votre plus haute gratification.

Je pense à mes enseignants, bâtisseurs de ponts, de pensées et d’espérances, qui m’ont transmis les savoirs, ici représentés par Moïse Sola, Bernard Tchicaya, Dieunedort Nzouabeth, Aristide Badji, Yaya Bodian Ndiaw Diouf . Je pense à mes étudiants. 

Je dédie cette distinction à ceux qui ont pavé ma route, ici représentés par Max Toussaint Loemba, Roland Bouiti Viaudo.

Je la dédie à mes enfants, à mes petits enfants et aux enfants du Congo et d’ailleurs, qui voient, grâce à l’école, s’ouvrir les portes de toutes les possibilités.

Je pense à tous mes parents, mes amis, mes condisciples, mes collègues, mes collaborateurs. Et je pense, en ce lieu, à tous les bâtisseurs silencieux du savoir et à tous les combattants engagés pour la paix : les chercheurs, les enseignants, les diplomates, les penseurs, mais aussi vous, les défenseurs de nos nations.

Ceux qui, comme le disait Sénèque, « vivent non pas pour eux-mêmes, mais pour les autres. » Je me sens leur frère. Leur compagnon. Leur débiteur.

Je me sens aussi, en ce jour, fils de deux patries : la mienne, le Congo, et celle du savoir sans frontières. À cet instant, ma voix est congolaise, mais ma gratitude est universelle.

Monsieur le président du jury

Messieurs les membres du jury,

Mesdames et messieurs

Il est des moments où le temps semble s’effacer, où le passé et le présent se fondent en une seule émotion.

Je vis cet instant aujourd’hui, ici, à Dakar, avec une intensité insoupçonnée.

Recevoir ce Doctorat Honoris Causa, ici à Dakar au Sénégal, dépasse la simple distinction. C’est un geste d’amitié, une main tendue. Mais au-delà, c’est tout un symbole, une lumière allumée dans la nuit du monde.

En visitant Dakar, le jour comme la nuit, et en contemplant cette salle, je vois des visages, des histoires, des combats. Cicéron disait : « À l’homme cultivé, tout lieu est une patrie. ».  En ce jour, Dakar, terre d’histoire et de culture, devient pour moi une patrie d’esprit et de cœur. Voilà qui me fait penser au combat intellectuel mené par Cheikh Anta Diop, en compagnie de son disciple Théophile Obenga.

En réalité, il n’y a pas de hasard à cela. Faisons un clin d’œil dans l’histoire pour comprendre qu’il n’y a pas de hasard et que le Sénégal et le Congo sont liés par une communauté de destin. Le Congo et le Sénégal à travers la baie de Loango et l’Ile de Gorée ont été les plaques tournantes du commerce triangulaire entre le XVème et le XIXème siècle.

L’exploration de Brazzaville, souvenons-nous a été l’œuvre d’un franco-italien, qui avait pour compagnon le Sergent Malamine, un ressortissant sénégalais.

Brazzaville, capitale de l’Afrique équatoriale française, était la sœur jumelle de Dakar, capitale de l’Afrique occidentale française. Que de similitudes !

Le Congo a vu ses fils combattre aux côtés des tirailleurs sénégalais pour la liberté et la paix dans le monde.  Le combat pour la liberté, fut-elle celle d’autrui, n’a pas de prix. Le peuple congolais et le peuple sénégalais le savent, pour avoir été témoin du sacrifice suprême de nombre de fils d’Afrique, qui ont payé le prix pour être allés défendre la liberté des autres.

Puissent nos deux Nations continuer de bâtir sur leur passé commun un avenir d’espérances et d’accueillir avec bienveillance ce plaidoyer pour la gratitude. Et puissent la France et les autres puissances entendre cet appel à la gratitude.

Léopold Sédar Senghor écrivait avec une délicatesse inégalée : « La culture est ce qui fait que l’homme ne se perd pas dans la nature. ». C’est ici, dans ce sanctuaire du savoir et de la réflexion, que cette culture s’incarne, que cette mémoire vive s’écrit jour après jour.

Ce que vous avez choisi de faire de moi est comme ce sillon où les exigences de cette gratification m’obligent à cultiver les fleurs de l’amour entre humains, les fleurs de la paix entre peuples ou nations, les fleurs d’une humanité réconciliée avec elle-même.

C’est par cette porte que vous m’ouvrez ce jour au sein de cette institution, qu’il me sera possible de scruter le temps et les circonstances qui ont forgé l’identité de notre Afrique, en créant des passerelles d’entente entre les peuples.

« L’Afrique, enjeu de la planète » dit Denis Sassou N’Guesso, souvent racontée avec clichés et peurs, est ici magnifiée dans sa grandeur et sa richesse. Elle appelle à la gratitude.

Gratitude de la part de tous ceux qui lui doivent une partie de leur histoire. Gratitude pour ses bras valides qui ont contribué à construire des grandes Nations avec leurs gratte-ciels. Gratitude pour ses richesses naturelles qui ont permis le développement de la technologie. Gratitude pour le souffle écologique qui oxygène la planète.  Gratitude, Encore la gratitude, rien que la gratitude.

L’Afrique est un carrefour, une force vive qui pense, enseigne et transmet. Elle est un hymne à la diversité, à la résilience, à l’avenir.

Léopold Sédar Senghor nous le rappellait déjà à juste titre en faisant allusion aux « Noirs dans les camps nazis » : « Non, vous n’êtes pas des morts gratuits. Vous êtes les témoins de l’Afrique immortelle, vous êtes les témoins du monde nouveau qui sera demain ». Il scande par là un consciencisme africain tel que le pensait Nkwamé Nkrumah, comme moteur du développement et de la transformation sociale de nos Nations, afin de « penser et agir par nous-mêmes et pour nous-mêmes, en Nègres..., accéder à la modernité sans piétiner notre authenticité. ».

Cette pensée senghorienne que je me dois de magnifier ici et maintenant, est comme une sorte de catharsis qui nous rappelle la fierté de l’identité de notre continent qui doit s’affirmer et se nourrir de sa diversité culturelle et de ses richesses naturelles.

L’Afrique dispose de 35% de minerais du monde pour juste un milliard d’habitants au moment où à travers le monde, la question des ressources prend une dimension particulièrement cruciale pour la survie des nations.

Par la maîtrise des questions géopolitiques et géoéconomiques, l’élite africaine peut analyser avec efficience, les changements majeurs des temps présents à la lisière des enjeux de sécurité dans les différentes sous régions d’Afrique où les guerres intra-étatiques ou inter-étatiques ne sont que le résultat de l’esprit prédateur des puissances au point de nous surprendre tous de la tournure que prennent les événements à l’échelle mondiale.

Aussi, fier et reconnaissant de cette distinction honorifique, vous renforcez en moi la conviction et la lucidité d’analyser les grands défis auxquels l’Afrique de demain sera confrontée, de susciter l’éveil de son élite, d’initier les stratégies à mettre en place face aux bouleversements démographiques qui demeurent un problème majeur pour la sécurité humaine.

Pour l’avenir de notre Humanité, pour la paix dans nos pays, nos continents, nous devons repenser nos modèles économique, politique et social et redéfinir les rôles respectifs de nos États.

Ainsi fait, nous prouverons notre capacité à entretenir des rapports courtois entre nations, sans intention de domination mais en privilégiant le co-développement, la co-construction et le vivre ensemble dans un monde qui veut la paix, et dans lequel la science et le progrès participent au bien-être de l’homme.

C’est donc  ‘’Le temps de l'Afrique ‘’ nous dira Jean Michel Severino: “Le XXIe siècle sera celui de l'Afrique.” Elle est désormais au centre de nouveaux grands enjeux mondiaux.

Monsieur le président du jury

Messieurs les membres du jury,

Monsieur le directeur général,

Mesdames et messieurs

Cette toge que je vais revêtir est plus qu’un symbole : c’est un ferme engagement. Celui de défendre la culture, l’éducation, la coopération, et surtout cette idée essentielle: la paix naît de l’écoute et de la compréhension mutuelle.

Senghor nous a légué une idéologie puissante : « La négritude est l’affirmation de la valeur du nègre et de la culture noire dans le concert des civilisations. ».

Elle est l’amour de la culture, la joie de l’âme, la beauté du geste, le rythme dans la parole, la richesse du silence. Il nous faut donc pour répondre à son invite « penser et agir par nous-mêmes et pour nous-mêmes, accéder à la modernité, sans piétiner notre authenticité »

Ces mots ne sont pas que poésie ; ils sont un cri, un appel à la dignité et à la fierté. Ils portent en eux la lumière d’un continent qui refuse d’être réduit à des stéréotypes. Un continent qui sait que le vrai pouvoir réside dans le savoir. J’ai appris, en me mettant au service des hommes, que la grandeur ne réside ni dans les fonctions ni dans les titres, mais dans la fidélité à un idéal.

Et pour moi, cet idéal s’est toujours décliné en trois mots : éducation, jeunesse, Afrique.

Oui, Mesdames et Messieurs, l’éducation, en Afrique, n’est pas une commodité : c’est une urgence. Une urgence joyeuse, brûlante, belle. Comme le disait Platon, « L’éducation est l’art de donner au corps et à l’âme toute la beauté et toute la perfection dont ils sont capables. ».

Pourquoi ne pas citer Nelson Mandela ? « L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde. ».

Et c’est dans cette quête effrénée du savoir, dans la recherche de la perfection, dans la construction de ce chemin vers l’excellence, que réside la vraie souveraineté.

En le disant, je pense à la jeunesse congolaise, sénégalaise et au-delà à la jeunesse africaine, cette jeunesse qui aspire à vivre debout, éclairée et digne, réclamant non la charité des puissants, mais la reconnaissance et la gratitude des humains, non la compassion des nantis, mais l’égalité dans l’accès à la connaissance.

Je ne suis pas ici pour simplement recevoir un hommage. Je suis ici pour rappeler, avec vous, que l’éducation est notre cause commune. Sans elle, pas de paix durable, ni de justice équitable. Avec elle, l’Afrique surprendra le monde.

L’Afrique est une idée neuve. Non pas une idée rêvée, figée, ou exotique, mais une idée debout, une idée en plein mouvement, une idée qui marche. Une idée qui écrit, qui enseigne, qui débat, qui pense, et qui s’affirme chaque jour davantage.

Avec une certaine jubilation communicative, je souhaite donner à mon propos l’art de célébrer la vie, en convoquant notre imaginaire à adhérer à une idéologie de paix et de dialogue qui par sa fraîcheur, nous projettera tout à la fois hors de notre temps et au cœur de notre temps, en tant que témoin des réalités pour le moins difficiles mais aussi des avancées non négligeables pour un bel avenir de notre humanité.

Il s’agit par ce jeu fécond de permettre à nos rêves, à l’imagination de prospérer et se mouler dans une sorte de conquête à l’aube du troisième millénaire tout en évitant de passer d’un simple « conflit de civilisations à des guerres de substitution » comme nous le recommande Mezri Haddad.

Et je conclus avec Marc Aurèle, ce sage antique : « Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé, le courage de changer ce qui peut l’être, et la sagesse de distinguer l’un de l’autre. » C’est cette sagesse que je vous souhaite à tous, réunis ici aujourd’hui pour que vous sachiez à votre tour témoigner la gratitude à ceux à qui vous la devez.

Vive le CEDS de Dakar

Vive la coopération Congo-Sénégal

Merci pour votre aimable attention.

 

Anatole Collinet Makosso

Légendes et crédits photo : 

Distinction du PMCG Anatole Collinet Makosso au grade de docteur honoris causa du CEDS, Dakar, juin 2025

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