Pourparlers États-Unis-Cuba : Washington et la Havane envisagent de rouvrir leurs ambassades respectives

Samedi 28 Février 2015 - 12:58

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Plus d’une cinquantaine d’années après la rupture des relations diplomatiques en pleine guerre froide, Washington pourrait rouvrir sa chancellerie à La Havane et y dépêcher un ambassadeur. C’est du moins ce qu’a indiqué le 27 février la secrétaire d’État adjointe pour l’Amérique latine, Roberta Jacobson, qui mène les négociations côté américain.

« Je pense que nous pouvons l’avoir fait à temps avant le Sommet des Amériques qui se tiendra à Panama les 10 et 11 avril », a précisé Roberta Jacobson, interrogée lors d’une conférence de presse sur un possible rétablissement des relations diplomatiques. Les présidents Barack Obama et Raul Castro devraient assister au Sommet des Amériques. Ce qui, comme annoncé, sera l’occasion pour une éventuelle rencontre historique et pour leurs représentations diplomatiques.

Roberta Jacobson ne s’est pas étendue sur la teneur des discussions, mais s’est félicitée des « progrès significatifs » et de « discussions constructives et encourageantes » avec la partie cubaine représentée par la directrice chargée des Etats-Unis au ministère des Affaires étrangères, Josefina Vidal.

Tout comme les États-Unis, Cuba prévoit aussi de rouvrir son ambassade à Washington. Sa délégation a salué la réussite du dialogue historique américano-cubain, censé clore un demi-siècle de conflit.

En dépit des avancées réalisées lors de ce second cycle de pourparlers officiels à Washington, les délégations américaine et cubaine ont reconnu qu’il restait de « graves désaccords » avant une normalisation complète de leurs relations. Parmi les points au centre de leur contentieux,  figure la présence de Cuba sur une liste américaine d’États « soutenant le terrorisme ». À ce sujet, la Maison Blanche s’apprêterait, d’après des sources concordantes, à rayer La Havane sur cette liste noire.

Les pourparlers de vendredi faisaient suite à une première rencontre officielle à La Havane fin janvier. Elle était intervenue après l’annonce, le 17 décembre par les présidents américain et cubain, du dégel de leurs relations diplomatiques.

L’assouplissement des relations entre les États-Unis et Cuba est le fruit d’un sérieux travail dont les tractations se faisaient souvent en coulisses. Ce rapprochement est notamment l’aboutissement de négociations secrètes qui se sont déroulées de juin 2013 à novembre 2014 au Canada. L’accord final a été conclu au Vatican. Un haut responsable américain a d’ailleurs affirmé que le pape François a joué un rôle-clé dans cette percée diplomatique après avoir lancé des appels personnels aux deux présidents.

Les relations entre les États-Unis et Cuba étaient neutres au moment de la révolution cubaine qui se solda en 1959 par le renversement à Cuba du régime du dictateur pro-américain Fulgencio Batista par une guérilla amorcée par Fidel Castro et le mouvement du 26 juillet. Elles se sont dégradées dès l’année suivante, avec l’expropriation des compagnies des États-Unis et le refus américain d’acheter le sucre cubain, malgré les tentatives de médiation opérées par le président argentin Arturo Frondizi.

Il en résulta des rapports très tendus : Washington décida en avril 1961 de lancer le débarquement de la baie des Cochons avec les membres de la Brigade 2506, qui fut un fiasco. Plus d’une décennie plus tard, soit en 1973, les deux pays signent  un pacte sur le détournement d’avion, qui leur permettra d’échanger un certain nombre des pirates de l’air. Depuis des années, les relations américano-cubaines alternent entre période de refroidissement et d’adoucissement. Récemment, l’administration américaine a organisé un dégel de ces relations, en ordonnant la levée des restrictions sur les voyages et les transferts de fonds envoyés à Cuba par les immigrants cubains aux États-Unis. Les autorités américaines ont, par ailleurs, retiré leur veto mis depuis 1962 à l’intégration de Cuba dans l’Organisation des États américains. Dans ce même cadre, les deux parties ont multiplié des gestes de bonne volonté ces derniers temps. Il sied de signaler aussi que le gouvernement cubain a libéré récemment cinquante-trois prisonniers politiques, l’une des exigences des États-Unis.

Nestor N'Gampoula