Crise à la Céni : Mbonigaba propose le pilotage du processus électoral par l’Union africaine

Mercredi 11 Août 2021 - 15:45

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La désignation du prochain président de la Centrale électorale suscite des réactions en sens divers, à travers le territoire congolais.

Spécialiste des questions électorales, de démocratie et de développement en Afrique au regard d’une trentaine d’articles, ouvrages, interviews audiovisuelles et autres communications autour de ces thèmes, Modeste Mbonigaba Mugaruka a indiqué que les élections n'auront véritablement tout leur sens, tout leur contenu et toute leur portée que le jour où le votant aura imprimé dans sa tête le mental du propriétaire.

Pour lui, la démocratie doit aller au-delà de la simple procédure, pour devenir un comportement guidé par le souci de prendre part à une œuvre commune dans la tolérance et l'esprit d'ouverture. Quant au développement, Mbonigaba note que cela se construit premièrement dans la tête, on ne peut pas se développer si on n’a pas une mentalité de développement. Considérée comme le socle, le point de départ de tout le reste, l'urne (les bonnes élections) constitue la fondation sur laquelle doit s'édifier un Congo-Kinshasa réellement porteur d'espoirs non seulement pour lui-même mais aussi pour sa sous-région. Aussi donne-t-il son opinion sur l’actuel blocage constaté dans la procédure de désignation du président de la Commission électorale nationale indépendante ( Céni).

« La crise à laquelle nous assistons présentement concernant la Céni est le point culminant d'une expérience qui, dès le départ, avait montré ses faiblesses s’agissant de la structuration interne de la composante "Confessions religieuses". Dès le début de la transition post Dialogue intercongolais de Sun City, la désignation de l'abbé Apollinaire Malu Malu, pourtant issu de l'Église catholique, ne s'était pas, en effet, faite de façon heureuse pour tout le monde. Ce fâcheux précédent se répétera pour toutes les échéances ultérieures jusqu'au paroxysme de 2018. Au lieu de réfléchir sérieusement, comme l'avait demandé la quasi-unanimité de la société congolaise, sur  une réforme en profondeur de tout le système électoral, on a cherché à reconduire, pour 2023, les tares qu'il fallait pourtant éradiquer. Et là, les deux ténors des Confessions religieuses semblent avoir définitivement dit niet », fait-il observer.

Pour lui, l’on doit se rendre à l’évidence que cette crise va au-delà de la Céni et est en réalité l'arbre qui cache la forêt ; c’est la crise de la gouvernance globale, non seulement en République démocratique du Congo, mais aussi un peu partout en Afrique. « Les élections ont, en effet, cessé de jouer leur véritable rôle ou ne l’ont jamais joué, celui d'être ce moment fort où le patron (ou employeur) change ou reconduit son employé. Aujourd'hui en Afrique, les élections servent plus à donner un semblant de légitimité à des pouvoirs qu'à choisir réellement des dirigeants », affirme Modeste Mbonigaba. D’après lui, on devra sortir des sentiers battus pour se détourner de cette impasse. « Il faut commencer par admettre humblement qu'on s'est littéralement planté pour avoir ainsi le courage de la remise à zéro des compteurs. Nous sommes co-fondateurs de l'Union africaine (ex-OUA), nous devrions courageusement accepter de mettre entre parenthèses notre souveraineté pour confier à cette organisation continentale le pilotage d'un processus électoral véritablement fondateur d'un  nouvel ordre politique au Congo Kinshasa et même au-delà », propose-t-il.

Et de conclure : « Mais, il faut d'ores et déjà préciser les choses au sujet du profil des personnes appelées à faire partie de cette équipe et surtout les pays dont elles proviendraient. Il faudrait, en effet, chercher ces hommes et femmes du côté des pays qui sont effectivement des exemples à imiter comme le Botswana, le Ghana, Le Cap-Vert, l'Île Maurice. Pour donner encore plus de vigueur à cette équipe, on pourrait la renforcer par un quartet de pays européens et autres peu suspects de relents néocolonialistes ou impérialistes comme la Suède, le Danemark, la Norvège et le Japon ».

Martin Enyimo

Légendes et crédits photo : 

Modeste Mbonigaba Mugaruka

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