Découpage territorial : les katangais toujours sceptiques

Jeudi 16 Juillet 2015 - 17:00

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Le Katanga est, depuis le 16 juillet, officiellement démembré en quatre nouvelles provinces, à savoir: le Tanganyika, le Haut-Lomami, le Lualaba et le Haut-Katanga.

Annoncé de longue date, le découpage de la riche province du Katanga est désormais effectif. À la suite de l’Equateur et de la Province orientale qui étaient les premières à se jeter à l’eau pour expérimenter la nouvelle donne géopolitique, c’est au tour du Katanga de leur emboiter le pas. Les députés provinciaux ont, en effet, pris acte le jeudi 16 juillet, du rapport de la commission du démembrement de leur province. Un geste qui théoriquement consacre l’éclatement du Katanga en quatre nouvelles provinces (le Tanganyika, le Haut-Lomami, le Lualaba et le Haut-Katanga) en attendant de leur doter des bases administratives saines avec tout ce qui s’ensuit en termes de viabilisation de nouvelles entités.

La pilule était difficile à passer dans ce qui était jusque-là considéré comme l’épicentre de la contestation et de la dynamique anti-découpage. Mais au finish, les contestataires étaient bien obligés de ranger leurs armes devant l’obstination du gouvernement à aller au bout de sa logique. La mort dans l’âme, le président de l’Assemblée provinciale de l’ex Katanga parle d’une partie remise sans renoncer à l‘idée de réchauffer, le moment venu, la pétition contre le découpage initiée par son parti, l’Union nationale des fédéralistes du Congo (Unafec). Plus d’un million de signatures auraient déjà été récoltées, a-t-il indiqué tout en invitant les Katangais à rester unis malgré le démembrement de leur province. « On a découpé l’administration du Katanga mais non la katanganité, ni les Katangais », a laissé entendre Gabriel Kyungu lors de la dernière plénière consacrée à cette question.

En fait, des inquiétudes demeurent quant à la matérialisation de ce découpage au Katanga. Le respect de la Constitution sur la gestion des actifs de l’ex-province du Katanga s’impose, comme l’a fait remarquer Gabriel Kyungu, étant entendu que le gouvernement central n’a rétrocédé à la province que 6% des recettes générées sur les 40% exigées par la Constitution. Maints observateurs se demandent si le gouvernement qui n’a pas pu respecter la retenue à la source des 40 % des recettes pour les onze provinces actuelles, sera un peu plus souple dans la nouvelle configuration territoriale. Rien n’est sûr. Il appartiendra donc aux animateurs de nouvelles provinces démembrées de se battre pour créer la richesse et développer leurs entités sans attendre la manne de Kinshasa. Cela est d’autant plus vrai que le processus de réorganisation territoriale n’a été prévu ni dans le budget national ni dans celui des provinces pour l’année 2015. « N’ayez pas peur d’avoir de nouvelles provinces dès lors que vous allez vous battre pour récupérer ce que le pouvoir central nous doit », a lâché Gabriel Kyungu à l’endroit de ses pairs.

Autre souci; c’est le déséquilibre qui se pose au Katanga où le niveau de développement n’est pas le même partout. Les provinces découpées du Haut Lomami et du Tanganyika ont toujours été considérées comme pauvres malgré leur potentiel agropastoral à l’opposé du Haut-Katanga et de Lualaba, réputées riches parce que disposant d’immenses ressources minières. Ce déséquilibre pourrait, s’il n’est pas bien encadré, donner lieu à des frustrations susceptibles de mettre en mal l’unité katangaise sur un fond de replis sur soi exacerbé par l’option tendancieuse de la territoriale des originaires. La peur de voir ressurgir des relents tribalo ethniques est perceptible. Déjà, dans l’Assemblée provinciale où  les députés font leurs valises pour rejoindre leurs districts d’origine, espérant se voir attribuer des postes clés au sein des nouvelles institutions provinciales, le discours est redevenu sectaire.

Qu’à cela ne tienne. C’est avec circonspection et anxiété que les katangais observent le processus de découpage quand bien même il est garanti par la Constitution de 2006. D’aucuns y voient une manœuvre visant à affaiblir certaines autorités de la province tel que le gouverneur Moise Katumbi en rupture de ban avec la Majorité au pouvoir pendant que d’autres mettent d’ores et déjà en garde contre toute velléité de déstabilisation du Katanga. Wait and see.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Carte représentant le nouveau découpage de la RDC.

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