Dette publique : les pays africains figurent parmi les moins endettés du monde

Vendredi 22 Octobre 2021 - 14:15

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Les effets de la crise de la covid-19 ont fortement pesé sur les dettes publiques des pays africains. Les taux d’endettement de plusieurs pays ont explosé, dépassant le seuil de 100% selon les données du Fonds monétaire international (FMI).

La pandémie de la covid-19 a impacté négativement les pays africains qui ont pris des mesures sans précédent, en termes d’ampleur et d’urgence, ayant permis de sauver des vies et d’amortir le choc économique. Seulement, celles-ci ont également exacerbé les facteurs de vulnérabilité liés à la dette et entraîné une forte hausse des besoins de financement. En 2020, les gouvernements africains ont eu besoin d’un financement brut supplémentaire de 125 à 154 milliards de dollars pour faire face à la crise sanitaire. Ainsi, à fin mai 2021, la dette cumulée de tous les pays africains se situait à 1400 milliards de dollars, presque la moitié de la dette publique de la France.

Selon l’Institute of international finance, l’association des grandes banques et institutions financières mondiales, basé à Washington, la dette mondiale a atteint 296 000 milliards, à la fin du mois de juin 2021. C’est dire que l’Afrique ne pèse pas dans l’endettement mondial. Toutefois, le montant de la dette contractée en 2020, combiné à la récession économique du continent de -2%, a impacté négativement le ratio d’endettement- dette intérieure et extérieure/ Produits intérieur brut (PIB), principal indicateur du niveau d’endettement d’un Etat- du continent et des pays africains.

Globalement, les pays africains figurent parmi les moins endettés du monde. Le taux d’endettement moyen des pays du continent se situe autour de 60%. Toutefois, cette moyenne cache des disparités énormes. En effet, de nombreux pays ont encore des taux d’endettement bas, très bas même pour certains d’entre eux, comme la République démocratique du Congo (12%), le Botswana (25%), les Comores (30%), le Nigeria (32%), la première puissance économique du continent. Ce qui laisse des marges d’endettement importantes.

A l’opposé, de nombreux pays du continent affichent actuellement des taux d’endettement supérieurs à 100%, autrement dit, le montant de leurs dettes est supérieur à leur PIB, c’est-à-dire à leur création de richesse. Et avec ce ratio de 212%. Autrement dit, le montant de sa dette dépasse deux fois sa création de richesse. L’Erythrée (176%), le Cap-Vert (138%), le Mozambique (125%), la Zambie (119%), l’Angola (111%) et les Seychelles (110%), ont des niveaux de dette supérieurs à leur richesse créée. D’autres pays sont à des niveaux proches du seuil des 100%. C’est le cas de l’Egypte (93%), de la Tunisie (91%) et du Congo (91%).

De nombreux pays développés affichent actuellement des taux d’endettement largement supérieurs à 100%

Certains pays ont des taux d’endettement largement supérieurs au chiffre officiel à cause des dettes cachées. Seulement, les taux d’endettement dépassant les 100% ne sont pas de l’apanage uniquement des seuls pays africains. De nombreux pays développés affichent actuellement des taux d’endettement largement supérieurs à 100% à l’instar des Etats-Unis, première puissance économique mondiale, avec un taux de 125%.

C’est également le cas du Japon dont la dette a largement dépassé 10 000 milliards d’euros (260% du PIB), ce qui en est l’économie la plus endettée, selon ce critère. Contrairement aux pays africains, le japon ne s’inquiète pas de cette dette. Et pour cause, il se prête à lui-même avec sa propre monnaie et sa propre banque centrale.

C’est aussi le cas de la France dont la dette atteint 118,2% du PIB à fin mars 2021, en s’établissant à 2 739 milliards d’euros, contre 98,1% une année auparavant. Elle a franchi la barre des 100% du PIB à cause des mesures de relance et des outils de soutien à l’emploi et aux entreprises prises par les autorités françaises pour faire face à la pandémie, ce qui a gonflé la dette publique de 89 milliards d’euros.

Si les pays développés ont les moyens de faire face à leur endettement, c’est loin d’être le cas pour les pays africains.

Au niveau des pays africains, les taux d’intérêt sont fixés par le marché international des capitaux et plus le risque pays est jugé élevé par les agences de notation, plus le niveau du taux grimpe à cause de la prime de risque.

En outre, il y a le problème de remboursement des services de dettes en devises qui se traduit par des ponctions sur les avoirs en devises des pays africains. Une situation qui inquiète de plus en plus, surtout après une année 2020 marquée par une chute vertigineuse des recettes d’exportations de matières premières (mines, pétroles, gaz…) qui sont les principales sources d’entrer de devises de nombreux pays du continent.

Enfin, l’effet de change qui pèse fortement sur les économies africaines, notamment celles dont les monnaies se déprécient vis-à-vis des devises étrangères. Une situation qui se traduit par des services de la dette qui pèsent lourdement sur les budgets de ces pays, laissant de faibles marges de manœuvre pour les rubriques investissements publics de ces Etats.

Ainsi, si les dettes des pays développés sont globalement soutenables, celles des pays africains, pour une grande partie, le sont beaucoup moins, même si jusqu’à présent aucun pays du continent n’a été déclaré en faillite. Toutefois, certains ont de plus en plus du mal à faire face aux échéances de leur dette.

C’est pourquoi, les appels à l’annulation des dettes se sont multipliés au cours de ces deux dernières années sans toutefois bénéficier de réponses favorables de la part des pays créanciers. Pire, alors que les pays du continent espéraient tirer profit de l’émission de 650 milliards de dollars de Droit de tirage spéciaux, au final, les cinquante-quatre pays du continent n’ont reçu que trente-trois milliards de dollars correspondant à la quote-part des pays africains aux ressources du FMI.

Après le rééchelonnement des dettes obtenues en 2020 par certains pays, les remboursements des services des dettes vont peser lourd dans les budgets de nombreux pays africains et constituer des goulots d’étranglement pour certains d’entre eux, hypothéquant leur croissance dans le court et moyen terme.

Josiane Mambou Loukoula

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